Guillermo Del Toro : "Les fantômes sont mes amis pour la vie"

Mehdi Omaïs
Publié le 13 octobre 2015 à 13h34
Guillermo Del Toro : "Les fantômes sont mes amis pour la vie"

BESTIAIRE - Après son blockbuster "Pacific Rim", le réalisateur mexicain Guillermo Del Toro retrouve ses racines artistiques avec "Crimson Peak", en salles ce mercredi. Dans la veine de "L'échine du diable" et du "Labyrinthe de Pan", en nettement moins bien, l'oeuvre en question prend la forme d'une fable romantico-gothique à la beauté formelle imparable. Précisions.

Quand Guillermo Del Toro parle de cinéma, ses yeux brillent autant que ceux d’un gamin enfermé dans une chocolaterie. Affable et attentionné, le cinéaste mexicain explique avoir délaissé les "robots rouillés qui se battent sous la pluie" de Pacific Rim , sa précédente réalisation, pour revenir à ses premières amours. Crimson Peak, projet qu’il a développé depuis 2006, lui a en effet permis de renouer avec son fameux bestiaire peuplé de créatures et de lieux étranges. "J’ai tenu à tourner ce film Outre Atlantique car il obéit à une tradition anglo-saxonne : la romance gothique."

Ledit long métrage, inspiré notamment du cinéma de Mario Bava et de La chute de la maison Usher d’Edgar Allan Poe, situe son intrigue au début du siècle dernier. Plus précisément à Buffalo, état de New York, où Edith Cushing (Mia Wasikowska), romancière prometteuse, est hantée par sa défunte mère. Laquelle prévient : "Prends garde à Crimson Peak". Entendez le lieu de résidence flippant et rougeoyant du docteur Alan McMichael (Tom Hiddleston), qui la courtise sous l’oeil méfiant de sa soeur atrabilaire (Jessica Chastain). 

Amitiés monstrueuses

"J’ai été élevé dans ce romantisme aux accents gothiques", explique Guillermo Del Toro. "Le premier film que j’ai vu à 4 ans était Les hauts de Hurlevent avec Laurence Olivier. J’ai par ailleurs lu Jane Eyre très tôt. C’est une matrice du genre. Sans elle, Rebecca d’Hitchcock n’existerait pas." Regrettant le racornissement du genre, qui connut un âge d’or entre 1940 et 1950, l’intéressé entend donc l’exhumer avec Crimson Peak, tout en le conjuguant à sa fameuse grammaire visuelle. "J’ai également tenu à mettre la femme au centre de l’intrigue. C’est elle qui sauve l’homme, et non l’inverse. Mon ami Alfonso Cuaron (réalisateur de Gravity, ndlr) m’a dit que j’avais réveillé la fillette qui sommeillait en moi. (rires)"

Bien que trop classique, voire paresseux, le scénario est miraculeusement transcendé par des décors à couper le souffle et à faire sourire les prunelles. Un univers léché propice à l’émergence d’une forme élégante d’effroi… "La peur est quelque chose que mes personnages essaient de conquérir pour révéler leur bravoure. J’aime l’imagerie de l’horreur mais pas ses mécanismes. Je refuse par exemple d’utiliser la notion judéo-chrétienne du mal. Mes fantômes sont tristes et jamais méchants." Exactement comme ceux ceux qu’il croisait enfant, dans ses rêves lucides. "Un jour, je leur ai dit que s’ils me laissaient pisser tranquillement la nuit, ils seraient mes amis pour la vie." Promesse tenue !


Mehdi Omaïs

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