Le casque devient obligatoire pour les enfants à vélo : mais pourquoi n'est-il pas imposé (aussi) aux adultes ?

Maître Jean-Baptiste Le Dall (édité par L.V.)
Publié le 18 mars 2017 à 14h09
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Source : Sujet JT LCI

VÉLO - Les moins de douze ans qui roulent à bicyclette devront porter un casque à compter du 22 mars 2017. Pour les irréductibles, c’est un PV qui se profile. Les explications de Maître Jean-Baptiste, avocat spécialiste du droit de la route.

Plus que dix jours avant l’entrée en vigueur de cette nouvelle obligation : le port du casque à vélo pour les moins de douze ans. L’idée n’est pas totalement nouvelle puisqu’elle figurait déjà en bonne place sur la liste des mesures annoncées lors du Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) du 2 octobre 2015. 

Avec la mesure n°16, le gouvernement entendait renforcer le dispositif de sécurité routière à destination d’une catégorie d’usagers exposés et que les nouvelles politiques de la ville souhaitent voir augmenter : les cyclistes. Avec une hausse en 2016 de 7% par rapport à l’année précédente, les chiffres donnent hélas raison aux préoccupations du gouvernement.

Les raisons qui ont poussé à laisser de côté l'idée du casque pour tous

Dans l’idéal, la généralisation du port du casque permettrait de mieux protéger cette catégorie d’utilisateurs particulièrement fragile. Mais les réticences sont multiples, non seulement chez les cyclistes eux-mêmes, qui voient dans le port obligatoire du casque une contrainte qui viendrait gâcher le sentiment de liberté que peut procurer la bicyclette, mais aussi chez les décideurs. 

En ce qui concerne les politiques publiques, la crainte est de voir finalement la pratique du vélo diminuer avec un impact négatif sur l’état de santé des usagers. Le gain en matière de sécurité routière pourrait, ainsi, être gommé par une augmentation des pathologies liées à la sédentarité. 

Autre frein au port du casque obligatoire : le développement des services de location de vélos en libre-service : Vélib’ à Paris, Vélo'v à Lyon,  VéloCité à Besançon… pourrait pâtir d’une telle mesure. Le succès de ces équipements repose largement sur l’aspect pratique : l’utilisateur n’a à se soucier de rien, pas de vélo à accrocher, de selle à retirer… Clairement, l’obligation de conserver son casque entre deux trajets limiterait l’enthousiasme de nombreux utilisateurs.

A défaut d’imposer le port du casque à l’ensemble des cyclistes comme en Finlande, l’idée s’est imposée notamment avec le CISR de 2015 de le rendre obligatoire pour les plus jeunes, sans doute encore plus exposés que les cyclistes plus expérimentés. Et là, pas de problème de santé publique ou de contraintes liées à des trajets domicile-travail.

En imposant le casque aux plus jeunes, l’idée est également de les habituer à cet équipement pour que son port devienne une évidence plus tard à l’adolescence ou à l’âge adulte. Cette mesure peut également inciter les parents à adopter le casque pour montrer le bon exemple à leurs enfants.

Un casque désormais obligatoire pour les moins de douze ans

Le décret n°2016-1800 du 21 décembre 2016 relatif à l'obligation de porter un casque pour les enfants à vélo a introduit dans le Code de la route un nouvel article R. 431-1-3

"En circulation, le conducteur et le passager d'un cycle, s'ils sont âgés de moins de douze ans, doivent être coiffés d'un casque conforme à la réglementation relative aux équipements de protection individuelle. Ce casque doit être attaché. S'il est âgé d'au moins dix-huit ans, le conducteur de cycle qui transporte un passager âgé de moins de douze ans doit s'assurer que ce passager est coiffé d'un casque […] De même, la personne âgée d'au moins dix-huit ans qui accompagne au moins un conducteur de cycle âgé de moins de douze ans doit s'assurer, lorsqu'elle exerce une autorité de droit ou de fait sur ce ou ces conducteurs, que chacun est coiffé d'un casque."

La sanction pour l'accompagnateur (pas forcément le parent)

On se rappellera que les mineurs de moins de treize ans ne peuvent se voir appliquer la procédure de l’amende forfaitaire, comme le veut l'article 122-8 du Code pénal. Ce n’est donc pas sur eux que va s’abattre la sanction prévue par le décret (amende de 135 euros, minorée à 90 euros). On aurait pu penser à viser systématiquement les parents, certainement les plus à même de faire respecter cette obligation du port du casque et peut-être de les équiper.

Mais non, le pouvoir réglementaire opte pour l’accompagnateur. La notion d’accompagnateur permettra de sanctionner n’importe quel adulte responsable mais pourra également donner lieu à quelques interrogations.

S’il est possible de comparer cette disposition au port de la ceinture de sécurité en voiture, la détermination du responsable pénale pose plus difficulté. En voiture, c’est le conducteur (là également sans référence à un quelconque lien de parenté) qui est en première ligne s’il transporte des passagers mineurs sans ceinture, mais par définition un véhicule n’est conduit que par une seule personne. L’identification de l’accompagnateur au sens de l’article  R. 431-1-3 du Code de la route pourra ainsi poser quelques difficultés en présence de plusieurs adultes. 

En tout état de cause, l’'entrée en vigueur de cette obligation est effective à compter du 22 mars 2017. Les parents ou accompagnateurs de jeunes cyclistes vont, donc, devoir s’assurer du correct équipement.

Le bon casque : il doit porter le marquage CE

Il ne suffit pas de ressortir du placard une antiquité ou un accessoire de déguisement pour se mettre en règle. L’arrêté du 21 décembre 2016 "relatif aux caractéristiques des casques portés par les conducteurs et les passagers de cycle âgés de moins de douze ans",  précise que l’équipement obligatoire est un casque pour cycliste conforme à la réglementation relative aux équipements de protection individuelle et portant le marquage CE. Ce casque devra, bien évidemment, être correctement attaché.

Et en Europe ?

Pour les enfants les plus récalcitrants, les parents pourront expliquer que la chose pourrait être "pire" : certains de nos voisins européens imposent le casque bien plus tardivement, y compris aux ados rebelles. Ainsi, comme en France, le jeune cycliste devra accrocher son casque jusqu’à ses douze ans en Autriche et en Lettonie, jusqu’à ses quinze ans en  Slovaquie, Slovénie, Suède, jusqu’à ses seize ans en  Espagne, Croatie, Estonie et même jusqu’à ses dix-huit ans en République tchèque et en Lituanie.

Maître Le Dall, docteur en droit et vice-président de l'Automobile Club des Avocats intervient sur son blog et sur LCI.

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