Permis : vous pouvez bel et bien perdre tous vos points sans prendre le volant

Maître Jean-Baptiste le Dall (édité par L.V.)
Publié le 21 octobre 2017 à 8h39

Source : JT 20h Semaine

INVRAISEMBLABLE - Difficile de perdre un permis sans le savoir. Et pourtant en cas de stationnement dangereux, de véhicule prêté ou même de divorce, cela peut arriver. C'est ce que nous explique Maître Jean-Baptiste le Dall, avocat en droit automobile.

La perte de points est la plupart du temps associée à des actes de conduite que l'auteur des faits ne peut pas ignorer. Difficile alors de perdre le permis sans le savoir, mais pas impossible pour autant. Explications.

Une règle, une exception

En matière de retrait de points la règle connue de tous est assez simple, les pertes de points concernent les infractions à la conduite. Et il est vrai que pour un stationnement impayé ou un arrêt un peu trop prolongé sur un emplacement de livraison, le conducteur ne risque pas de voir fondre son capital de points.

Trois points en moins en cas de stationnement dangereux

Mais point de règle sans exception : une verbalisation pour stationnement dangereux en coûtera trois points à son auteur. C'est ce que prévoit l'article R.417-9 du Code de la route : "tout véhicule à l'arrêt ou en stationnement doit être placé de manière à ne pas constituer un danger pour les usagers. Sont notamment considérés comme dangereux, lorsque la visibilité est insuffisante l'arrêt et le stationnement à proximité des intersections de routes, des virages, des sommets de côte et des passages à niveau." Cette contravention "donne lieu de plein droit à la réduction de trois points du permis de conduire."

Les agents des forces de l'ordre qui constatent une telle infraction peuvent parfaitement intercepter le conducteur. Ils peuvent ainsi se diriger vers un automobiliste qui vient de se stationner pour lui demander de quitter les lieux, ils peuvent également lui demander son identité et son permis de conduire et procéder à la verbalisation. Si le véhicule stationné dangereusement est retrouvé sans personne au volant, les agents constateront également l'infraction, mais l'avis de contravention sera adressé au titulaire du certificat d'immatriculation.

 Un véhicule mal stationné par son propriétaire ou un autre utilisateur peut ainsi venir grignoter le capital de points de ce propriétaire, que l'amende soit réglée un peu trop rapidement sans avoir examiné attentivement l'avis de contravention ou que celui-ci soit tombé aux oubliettes. L'absence de paiement de l'amende ne permet, en effet, aucunement d'éluder le retrait de point. Ne pas procéder au règlement ne fait que repousser l'échéance jusqu'à l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée (l'amende passe alors à 375 euros).

Attention au prêt de véhicule

La constatation d'une infraction par le biais d'un radar automatique donne lieu à l'émission d'un avis de contravention qui sera adressé au titulaire du certificat d'immatriculation. Depuis la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle et son décret du 28 décembre 2016, les infractions pouvant être constatées par le biais de radars automatisés sont bien plus nombreuses qu'auparavant : défaut de port de la ceinture, usage du téléphone portable tenu en main, circulation, arrêt ou stationnement sur bande d'arrêt d'urgence, chevauchement et franchissement de lignes continues, non respect des règles de dépassement, non respect des sas vélos, défaut de port du casque. Ces infractions s'ajoutent à celles qui pouvaient déjà être constatées par radars automatiques : non respect des signalisations imposant l’arrêt des véhicules (stop ou feu rouge), non respect des vitesses maximales autorisées, non respect des distances de sécurité entre les véhicules et usage de voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules (voies de bus par exemple).

Autant d'infractions, qui peuvent coûter au propriétaire du véhicule de précieux points alors même qu'il n'était pas au volant au moment des faits. Le paiement d'un avis de contravention entraîne un retrait de points sur le capital du conducteur qui est mentionné en premier sur la carte grise ou désormais le certificat d'immatriculation. 

En présence de deux co-titulaires sur ce document, le paiement, sans autre démarche, de l'amende par le deuxième titulaire entraînera un retrait de point pour... le premier. Pour ces avis de contravention, si le deuxième titulaire a commis l'infraction et si le premier titulaire ne souhaite pas perdre ses points, l'avis de contravention devra être contesté. Le second titulaire pourra alors être désigné comme véritable auteur de l'infraction.

Stages de récupération de points : attention aux arnaques Source : JT 13h Semaine
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Pensez à la voiture lors d'un divorce ou séparation

C'est souvent la dernière chose à laquelle on pense lorsqu'un couple se sépare, une des voitures du couple peut être laissée à l'un des époux sans que celui-ci ne procède au changement sur le certificat d'immatriculation. L'absence de démarche de sa part ne relève pas forcément de l'intention de nuire, après tout le règlement du divorce ou de la séparation pourrait aboutir à l'attribution de ce véhicule à l'un ou l'autre. Mais attention, celui qui part en laissant le domicile et l'usage du véhicule à son ex-conjoint ne recevra plus les avis de contravention. 

En l'absence de changement sur le certificat d'immatriculation, ces avis seront toujours adressés au domicile conjugal, aucun moyen donc pour le titulaire du certificat d'immatriculation de savoir qu'une infraction a été enregistrée à son encontre. Il ou elle le découvrira sans doute trop tard à la réception d'une décision de retrait de point ou plus grave à la réception du courrier d'invalidation de son permis de conduire. Là également la séparation et la recherche pour l'un des conjoints d'un nouveau domicile pourra rendre difficile la réception des décisions de retrait de points. La question de la "garde" du véhicule devra donc être abordée très tôt sous peine de compliquer encore davantage les relations entre les ex-conjoints.

Maître le Dall, docteur en droit et vice-président de l'Automobile Club des Avocats, intervient sur son  blog  et sur LCI. 


Maître Jean-Baptiste le Dall (édité par L.V.)

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