"The Night Of", bilan : entre promesses, déception et émotion

Romain Cheyron
Publié le 30 août 2016 à 19h14, mis à jour le 30 août 2016 à 23h24
"The Night Of", bilan : entre promesses, déception et émotion
Source : HBO

CRITIQUE – La première – et unique ? – saison de The Night Of s’est achevé ce lundi 29 août sur OCS avec un épisode final extra large qui a conclu une histoire qui n’a jamais vraiment tenu les belles promesses de son premier épisode. Mais malgré quelques défauts notables, le voyage émotionnel aura souvent été poignant.

Durant huit semaines HBO et OCS nous ont plongés dans la descente aux enfers de Nasir Khan (incarné par Riz Ahmed), un étudiant sans histoire accusé du meurtre d’une jeune femme après une nuit passée ensemble. Une soirée à prendre de la drogue, boire de l’alcool et jouer à des jeux dangereux, les voilà au lit pour une partie de sexe sauvage. En pleine nuit, et ne se souvenant de rien, Naz, son surnom, se réveille et découvre le corps sans vie d’Andrea (Sofia Black-D'Elia), tuée par 22 coups de couteau. Le premier épisode, diffusé le 10 juillet dernier, dont nous avions fait la critique, mettait parfaitement en place l’univers et l’ambiance sombre et glaçante de ce remake de la série britannique Criminal Justice

La promesse d'une grande série où tension et contemplation rythment un récit sans faille. Malheureusement, ce premier épisode est très certainement le meilleur de la saison. Steve Zaillian et Richard Price - créateurs et scénaristes - se sont un peu perdus en cours de route en voulant explorer plusieurs pistes qui n'ont jamais su atteindre la puissance émotionnelle et l'interprétation des acteurs et actrices de la série. Riz Ahmed est hypnotisant, subtil, captivant, John Turturro - dans le rôle de l'avocat Jack Stone - est impressionnant et souvent touchant, dans sa quête de vérité.  Et The Night Of se transcende grâce à ces deux comédiens, contrebalançant un tant soit peu les défauts d'écritures et incohérences. 

Un coup de mou en milieu de saison

Un départ plein de promesses, donc, qui ne sont tenues qu'à moitié. En dehors de l'interprétation impeccable et d'une ambiance toujours plus absorbante et oppressante, The Night Of n'est pas parvenue à garder un récit crédible de bout en bout. Par une histoire qui, à la fois, avance trop rapidement, et est trop précipitée. Un procès qui arrive un peu par hasard, sans qu'une enquête ne soit vraiment lancée. Par conséquent, le détective Dennis Box (Bill Camp) disparaît au milieu de la saison, avant de revenir véritablement dans les deux derniers épisodes, encore une fois, un peu par hasard. Bien sûr, The Night Of se veut être dénonciatrice d'un système judiciaire américain rempli de failles, et d'une autorité paresseuse. Mais elle n'a jamais vraiment réussi à trouver la justesse pour véritablement explorer le sujet.

L'évolution du personnage de Nasir est aussi l'un des grands problèmes de la série. Etudiant réservé, il devient trop rapidement l'un des caïds de la prison après seulement quelques semaines. Histoire de nous faire douter de son innocence ? Si c'est le cas, c'est fait bien trop grossièrement et sans vraie cohérence.  Il devient le protégé  Freddy (impeccable Michael Kenneth Williams), qui semble diriger cette prison depuis sa cellule, parce que ce dernier "sent" son innocence. Ce qui fut le cas de nous, téléspectateurs, avant cette transformation trop abrupte. Il en va de même pour Chandra (Amara Karan) qui embrasse Nasir incompréhensiblement lors d'un face à face, avant de lui donner de la drogue. 

Un épisode final chargé d'émotions

Heureusement, à côté de ça, la mise en scène est léchée et l'ambiance est envoûtante. Steve Zaillian et Richard Price ont particulièrement soigné la forme.  "The Call of the Wild", l'épisode final, d'une durée de 1h30, est aussi le nom du roman de Jack London sorti en 1903, qu'offre Freddy à Naz lors de sa sortie de prison. Deux histoires qui se rejoignent, celles de deux êtres respectables, transformés par leur environnement puis sauvés, mais toujours en proie à leurs démons qui peuvent refaire surface à tout moment. Oui Nasir est libéré après l'indécision du jury et les doutes de l'impitoyable procureure Helen Weiss (Jeannie Berlin), qui se met à douter de sa culpabilité, mais sa vie est à jamais bouleversée et ne sera plus jamais la même.

L'histoire ne s'arrête pas sur l'arrestation du vrai coupable, qui pourrait très bien être Nasir, tant nous sommes plongés dans le flou, lui même ne sachant pas s'il a tué Andrea. Sa famille, bien que sa mère assure le contraire, ne le pense sûrement pas innocent à 100% et ses amis lui tournent le dos. Seul Jack est là, bouleversant après son argumentation de clôture, touché par un eczema plus violent que jamais, persuadé que son client n'a rien fait, et l'accompagnant dans cette nouvelle liberté. Par un jeu de miroirs, ce dernier épisode se conclut comme cette histoire à commencer : Nasir contemple l'East river, Jack retournant à sa vie d'avocat moyen aux affaires médiocres, et Dennis Box, pourtant proche de la retraite, continuant son travail à la police de New York.  Au final The Night Of nous a transportés par son émotion et sa tension constante, malgré quelques défauts d'écriture.


Romain Cheyron

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