Sarkozy veut une taxe carbone européenne sur les produits américains : pas si simple

Publié le 14 novembre 2016 à 8h04, mis à jour le 20 janvier 2017 à 10h06
Sarkozy veut une taxe carbone européenne sur les produits américains : pas si simple

NEW DEAL - Nicolas Sarkozy s'est prononcé, dimanche soir sur TF1, en faveur d'une "taxe carbone" à l'importation de produits américains si Donald Trump confirmait son refus de respecter l'accord de Paris sur le climat. Une mesure qui semble loin d'être évidente.

Répondre au protectionnisme de Donald Trump par un protectionnisme européen. Dimanche soir sur TF1, Nicolas Sarkozy a plaidé pour que Bruxelles instaure de nouvelles mesures afin de protéger les marchés intérieurs, dont un "Buy European Act" privilégiant l'achat de produits européens. 

Il a surtout défendu la création une "taxe carbone européenne" qui serait applicable si les Etats-Unis décidaient, comme l'a promis le nouveau président américain, de ne pas respecter leurs engagements sur le climat nés de la ratification de l'accord de Paris (issu de la Cop 21). Voici ce qu'il a dit : 

Je demande que l’Europe se dote d’une taxe carbone aux frontières, de 1 à 3 %, pour tous les produits qui viendraient des Etats-Unis, si les Etats-Unis s’exonèrent des règles environnementales que nous imposons à nos entreprises
Nicolas Sarkozy

Si la revendication peut paraître légitime - les Etats-Unis ont ratifié l'accord de Paris en septembre 2016 -, l'instauration d'une telle mesure par l'Union européenne pourrait toutefois se heurter à quelques difficultés de taille. Pour au moins trois raisons. 

1 - L'accord de Paris ne prévoit pas de sanction

S'il a valeur de traité international, ce qui implique qu'il soit exécuté par tous les signataires, l'accord de Paris, qui engage les Etats à réduire leurs émissions de dioxyde de carbone, ne prévoit pas de mécanisme coercitif ou de sanction pour un pays qui ne s'y tiendrait pas. Le seul mécanisme comprenant des sanctions, le protocole de Kyoto sur les émissions de gaz à effet de serre (1997), n'a pas été ratifié par les Etats-Unis, qui émettent 20% du dioxyde de carbone mondial. Il faudra donc justifier autrement une telle mesure. 

2 - La taxe carbone n'est pas une taxe à l'importation

La taxe carbone prévue dans l'accord de Paris est une possibilité offerte à chaque pays signataire d'instaurer une taxe environnementale sur les émissions de dioxyde de carbone. Dans l'Union européenne, plusieurs pays l'ont mise en oeuvre, dont la France, sous la forme d'une "contribution climat énergie", qui consiste à faire payer à l'émetteur en fonction de ce qu'il pollue (carburants, charbon, fuel, gaz). La proposition de Nicolas Sarkozy relèverait donc davantage d'une mesure douanière que d'une "taxe carbone" telle qu'elle a été définie par le traité international. 

3 - Si c'est une mesure fiscale, l'Europe doit se mettre d'accord

S'il remporte la primaire à droite puis l'élection présidentielle, Nicolas Sarkozy aura beaucoup de travail pour convaincre les partenaires européens d'instaurer une "taxe carbone européenne". Car en matière fiscale, les décisions de l'Union européenne requièrent l'unanimité des Etats-membres. Ce qui promet de longues discussions, si l'on se réfère au dossier de la taxe européenne sur les transactions financière, en souffrance depuis 2011 faute d'accord entre la France et l'Allemagne. Bref, la France, quelle que soit sa bonne volonté, ne pourra pas instaurer une telle mesure toute seule. 


Vincent MICHELON

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