Procès du Carlton : direction Washington

par Maud VALLEREAU
Publié le 11 février 2015 à 22h28, mis à jour le 13 octobre 2018 à 9h11
Procès du Carlton : direction Washington

JUSTICE - Mercredi après-midi, le tribunal a pris la direction de Washington où se sont déroulées plusieurs parties fines citées dans l'affaire du Carlton. Après le recadrage de DSK dans la matinée, le président a concentré ses questions sur les trois autres protagonistes du dossier : Fabrice Paszkowski, l’ami proche de l'ancien patron du FMI, David Roquet, l’ex-entrepreneur médical et surtout l'ancien grand flic Jean-Christophe Lagarde.

On dirait une chorale. Devant le pupitre, les quatre hommes en costumes sombres se tiennent droits, les mains jointes. L'un après l'autre, ils se penchent sur le micro et répètent leur gamme : Fabrice Paszkowski assume à moitié, David Roquet ne se rappelle plus trop, Jean-Christophe Lagarde ne savait pas, Dominique Strauss-Kahn fait la leçon. Mercredi après-midi, la "bande de copains" poursuivie pour proxénétisme aggravé dans l'affaire du Carlton a de nouveau répondu aux questions, plus ou moins pressantes, du tribunal. Qui après s'être intéressé aux parties belges et françaises a embarqué pour Washington.

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"Outre David Roquet, personne n'a jamais su qu'il s'agissait de prostituées. C'est resté notre secret", redit Fabrice Paszkowski, qui a été décrit mardi comme le "gentil organisateur" des soirées libertines. Une jeune femme, dont la déposition est lue par le président, préfère parler de "commerçant". "C'est quelqu'un qui vend des 'produits' à d'autres", assène la procureure. Une autre fille va jusqu'à le comparer à un "recruteur". Terme que l'intéressé réfute. "Aviez-vous un recruteur ?", demande le président à l'adresse de Dominique Strauss-Kahn. "Non, sinon moi-même" , réplique d'une voix calme l'ancien patron du FMI. 

Le président s'attarde alors sur les couacs de paiement avec "les prestataires" qui ont émaillé les parties américaines. Jade, l'ancienne prostituée a expliqué dans la matinée avoir mis six mois pour récupérer ses 2.000 euros. Fabrice Paszkowski a du mal à se justifier. "Vous aviez pourtant un confortable train de vie, note le président. A moins que vous ne les preniez pour des moins que rien ?" - "Absolument pas", soupire l'homme visiblement éreinté.

Interrogatoire musclé de l'ancien flic

Vient le tour de Jean-Christophe Lagarde. "Je ne savais pas que les participantes étaient rémunérées, j'avais été contacté par Paszkowski pour un voyage à Washington dans le but de voir DSK", déroule l'ancien flic aux petites lunettes et au flair défaillant. Il parle de cette occasion rêvée qui lui est donnée de discuter des "questions de sécurité avec un homme brillant", promis aux plus hautes fonctions. "Vos échanges ont dû être extrêmement brefs", raille le parquet qui enchaîne : "Le financement de ce voyage questionne" : trois virées aux Etats-Unis, de 4 à 5.000 euros "en retenant la fourchette basse", le tout aux frais du duo Paszkowski-Roquet. "Est-ce déontologique dans la police nationale de se faire offrir de tels cadeaux?", tonne le procureur. "C'était le copain pas le policier qui était invité", balbutie l'ancien chef de la sûreté départementale du Nord, plus à une incohérence près.

David Roquet, regard du petit garçon pris la main dans le sac, rapporte à la barre cette discussion avec Lagarde au sujet d'une prostituée : "Elle m'a fait un beau massage", lui dit-il. "Ça veut dire quoi un beau massage ?", reprend faussement naïve la procureure. "Une fellation", finit par admettre l'ancien entrepreneur du BTP, qui précise que "tout de même, ce n'est pas son vocabulaire". L'ex-commissaire, lui, dément. Tout juste admet-il, avoir parlé de "la petite affaire du Sofitel" - qui a fait chuter l'ex-présidentiable - avec ses compagnons de jeu. "On s'est dit, il fallait garder 'ça' (les parties fines) pour nous. C'est raté..."

"Dans ces soirées, on dit que vous étiez la deuxième personne à choyer après DSK", attaque à nouveau le président. "Je n'ai pas eu l'impression", répond toujours poliment l'ancien policier - "Vous n'avez pas l'impression mais vous avez eu la relation". 

A côté, l'audition de Dominique Strauss-Kahn semble une balade tranquille. "J'ai entendu parler de m'amener de la chair fraîche, c'est une ignominie. Et la photo (qui le montre avec Jade aux Etats-Unis), je n'aurais jamais pris le risque en tant que directeur du FMI de poser avec une prostituée dans mon bureau". Personne ne semble disposer à contredire la partition de l'ancienne figure socialiste qui avait dans la matinée recadré les débats. Pas même quand il explique au sujet d'une jeune femme qui assure avoir parlé "tarifs" avec lui. "C'était une libertine assumée. Je lui ai demandé si je pouvais la voir à l'occasion directement. S'il a été question d'argent, c'est que j'ai pu lui dire que si elle vient à Paris, je lui paierais les frais".  

>> Retrouvez notre dossier consacré au procès du Carlton


Maud VALLEREAU

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