ENTRETIEN - Quatre mois après sa grave blessure provoquée par l’introduction d’une matraque dans l’anus lors d’une intervention policière à Aulnay-sous-Bois en février dernier, Théo est encore loin d'être remis. Il a témoigné dans l'Obs.
Depuis quatre mois, il n'avait pas donné d'interview. Théo - blessé lors d'une violente intervention policière le 2 février dernier à Aulnay-sous-Bois, a accordé une interview à l'Obs. Les violences subies lui ont valu 60 jours d'Incapacité temporaire de travail après l'introduction d'une matraque dans les fesses. Impossible deretrouver une vie normale depuis. Le jeune homme ne parvient plus à dormir que "par tranche de 20 à 30 minutes". Il raconte :
Ma vie a changé. Chaque jour, une infirmière vient me faire des soins, vérifier l’évolution de ma cicatrice. J’ai eu une déchirure anale de dix centimètres et une perforation importante du colon, qui m’obligent à porter une poche, peut-être à vie, et qui me fait mal.
Théo, interview à l'Obs, le 17 juin 2017
Le jeune homme regrette de ne plus avoir un quotidien comme avant, la pratique d'activités sportives lui étant impossible, comme le foot qui était "la passion de (s)a vie". Et d'ajouter : "Je n’ai pas le mental. Je regarde la télé, j’écoute de la musique. Je ne peux formuler aucun projet".
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Dans cette affaire quatre policiers sont mis en examen, un pour viol et les trois autres pour violences volontaires en réunion. Les condamnations de ces violences policières furent quasi unanimes : du maire LR d'Aulnay Bruno Beschizza, ancien policier, au président Hollande qui s'est rendu au chevet du jeune homme quelques jours après les faits.
Théo a reçu le soutien de nombreuses personnalités. Des rappeurs comme Booba, Kaaris, Mokobe, Youssoupha, Rim’K, Seth Gueko ou encore Oxmo Puccino, mais aussi de footballeurs professionnels comme les joueurs de Chelsea Kurt Zouma et Michy Batshuayi, le latéral gauche de l'AS Monaco, Benjamin Mendy ou encore Geoffrey Kondogbia, le milieu de terrain français de l'Inter Milan.
Manifestation contre les violences policières à Paris
Cette interview de Théo paraît alors que quelques centaines de personnes ont manifesté samedi à Paris pour réclamer "justice et vérité" pour Lamine Dieng, décédé à la suite de son arrestation par la police le 17 juin 2007, et pour l'ensemble des victimes de violences policières. Lamine Dieng, un Franco-Sénégalais de 25 ans, est décédé le 17 juin 2007 au petit matin dans un car de police après avoir été immobilisé et pressé au sol alors qu'il résistait à son arrestation dans le quartier populaire de Ménilmontant. En 2014, la justice a conclu à un non-lieu. La famille a porté l'affaire devant la cour de Cassation, dont elle attend une décision ce mercredi 21 juin. Le comité "Vérité et justice pour Lamine Dieng" et le collectif "Vies volées" réclament également l'interdiction du "pliage", de la "clé d'étranglement" et du "plaquage ventral", techniques d'immobilisation utilisées par la police qu'ils jugent "létales".