Mission en Terre Adélie #26 : Petite histoire du mal de mer

Michel Izard
Publié le 24 janvier 2017 à 16h31
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Source : Sujet JT LCI

CARNET DE ROUTE - Une équipe de scientifiques français est partie il y a deux semaines sur la base française Dumont d’Urville, dans l’Antarctique. Tout au long du mois de janvier, nos reporters Michel Izard et Bertrand Lachat vous feront vivre cette aventure extraordinaire au pôle Sud. Voici la suite de leur périple.

En janvier 1840, au même endroit, à la même date que nous, Jules Dumont d’Urville, avant de revenir, voulait essayer d’aller sur le continent mais les conditions météo changeantes l’obligent à partir vite. Le 23 janvier, il admire, comme nous, le décor.

Il raconte, dans son récit "Voyage au Pôle Sud" : "Le temps continuait à être magnifique. Ce champ de glace, vu du haut de la mature, brillait, sous les rayons obliques du soleil, d’un éclat semblable à celui des diamants." Et puis soudain c’est la tempête : "Vers 1 heure le vent souffla rafales avec une force extraordinaire. La neige tomba en tourbillons et vint nous masquer la Terre. Notre horizon alors ne s’étendit pas à plus de 3 encablures, et notre navigation devint des plus dangereuses…"

Et cela dure toute la journée et la nuit du 24 janvier : "L’Astrolabe se débattait au milieu de lames qui l’inondaient… Il n’était pas possible de se tenir dans le gréement couvert de glaçons tranchan ts. C’était à peine si les matelots pouvaient se maintenir sur le pont…"

Mission en Terre Adélie #26 : Les dessins du livre de Jules Dumont d'UrvilleSource : Sujet JT LCI
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En ce 23 janvier 2017, 177 ans plus tard, nous avons plus de chance. 

Après une dizaine d’heures de navigation dans les glaces, restes de banquise peuplée d’icebergs,  notre Astrolabe, ce matin, est sorti sans encombres du pack. Sur la passerelle à côté du capitaine, Céline Tucelli, commandant de la Marine Nationale observe la manoeuvre. En novembre prochain, elle commandera le nouvel Astrolabe dont la construction s’achève. Elle doit apprendre vite.

"Nous devons maîtriser un savoir faire. Une technique très spécifique", nous explique humblement la commandant Tucelli. C’est l’armée qui opérera le nouveau navire polaire français. Mais chez les militaires, il n’y a aucun spécialiste du pilotage dans les glaces. Stanislas Devorsine reviendra peut-être pour les épauler. "J’ai été second pendant 5 ans et je commande depuis 5 ans. Il a fallu acquérir de l’expérience pour être vraiment opérationnel", explique-t-il.

Une pêche sur le pont

Nous sommes sur le 64ème parallèle sud. La mer libérée lance maintenant ses vagues. La houle commence. Et pour les passagers commence le tournis. Certains sont déjà blêmes. Un italien, qui revient de la station Concordia, pose une fusee sur le pont, comme on dit élégamment dans le jargon du mal de mer. Je dépose la mienne juste après le repas de midi, émincé de boeuf purée (très bon au demeurant) dans la poubelle de l’arrière cuisine.

Mathieu Verschave, le médecin de bord, distribue des comprimés, les patchs et prodigue ses micros massages au cervicales. Il continue aussi son étude clinique SickWest. Bertrand Lachat l’avait faite à l’aller. Je m’y colle au retour. 4 fois par jour il faut répondre à un questionnaire sur son état, faire un test de réactivité sur ordinateur et mâcher un coton pour des analyses de salive. Une plaie. Mais Mathieu est très sympathique, très prévenant. Et quand vient la nausée, on se dit, avec fierté, en titubant dans le balancement des couloirs, que l’on oeuvre pour la Science ! 

Le bateau prend de côté un vent d’Est-Sud-Est froid qui lui donne des angles de 20°, ce qui est assez impressionnant déjà. "Parfois, il penche jusqu’à 45 degrés, presque à se coucher sur l’eau", nous dit le capitaine. La météo prévoit un durcissement des vents et de la mer plus haut sur le trajet. Les oiseaux sont revenus : petits prions noirs, damiers du cap, pétrels et le seigneur de ces parages, l’albatros qui tourne et file, vire, monte, descend,  disparaît d’un coup et revient tout aussi vite, au gré des courants d’airs et du mouvement des vagues, sans donner un coup d’aile, comme un planeur. 

La Terre d'Adélie, préparatif d'un voyage hors du tempsSource : JT 13h Semaine
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