Radicalisation en prison : un aumônier musulman témoigne

Publié le 23 octobre 2014 à 16h37
Radicalisation en prison : un aumônier musulman témoigne

PORTRAIT – Aumônier musulman dans les prisons de la région Paca depuis près de 20 ans, Habib Kaaniche constate le risque de radicalisation dans le milieu carcéral, mais déplore le manque de moyens pour y faire face.

Son bâton de pèlerin, Habib Kaaniche l’a pris en main il y a vingt ans. "Les aumôniers musulmans en prison n’existaient pas. On m’a proposé le poste. J’ai accepté", confie en souriant cet homme de 67 ans. Docteur en sciences politiques, il ne connaît alors rien du milieu carcéral. D’autant qu’il n’existe aucune formation spécifique. "Je me suis formé auprès des aumôniers catholiques", précise-t-il.

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Seulement 10 aumôniers en région Paca

Seul, Habib Kaaniche part alors à la rencontre des prisonniers de confession ou de culture musulmane dont le nombre contesté, a été publié jeudi dans un rapport. Il gagne petit à petit la confiance des détenus. Toujours en se fixant des règles. "Je suis à leur écoute, mais bien souvent, je ne vais pas dans leur sens. S’ils me parlent en arabe, je réponds en français", assure-t-il.

Faute de temps et d’effectifs, les discussions se font en groupe. "Certains le vivent comme une injustice, explique-t-il car les aumôniers catholiques, plus nombreux, peuvent faire des entretiens individuels". A ce jour, seuls dix aumôniers musulmans parcourent les prisons de la région contre une soixantaine de catholiques.

"On ne nous écoute pas"

Un chiffre bien insuffisant face à la menace de radicalisation dans le milieu carcéral. "Mais il n’y en a pas plus dans les prisons que dans la société", tranche Habib Kaaniche, conscient du problème et de ses propres limites. "Ce n’est pas mon rôle que de lutter contre cela. Si je perçois un souci, je pousse mon interlocuteur à en discuter mais je ne peux pas faire plus. Je n’en ai pas les moyens", souffle l’aumônier.

Selon lui, les "perturbateurs", comme il dit, ne seraient toutefois pas légion dans les prisons de Paca. "Le problème, c’est que rien n’est fait pour trouver des solutions", déplore-t-il. Outre le manque de budget pour faciliter la tâche et le recrutement des aumôniers musulmans en prison, Habib Kaaniche recommande d’isoler les détenus à problèmes. "On le dit, mais on ne nous écoute pas", s’inquiète-t-il.
 


La rédaction de TF1info

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