Afghanistan : 15 après la fin de leur régime, "les talibans sont partout"

Publié le 3 octobre 2016 à 17h41
Afghanistan : 15 après la fin de leur régime, "les talibans sont partout"
Source : Aref Karimi / AFP

DECRYPTAGE - Les talibans ont lancé lundi un assaut coordonné contre Kunduz, grande ville du nord de l'Afghanistan brièvement passée sous leur contrôle l'an dernier. Une attaque qui illustre l'instabilité persistante dans le pays, 15 ans après l'intervention des Etats-Unis.

Maîtriser le calendrier de leurs attaques pour mieux exister. C’est le message adressé ce lundi par les talibans qui, au petit matin, ont pris d’assaut la ville de Kunduz. Une offensive qui leur permet de marquer le premier anniversaire de leur brève prise de contrôle de cette ville du nord de l’Afghanistan. Mais aussi de se rappeler au bon souvenir des Occidentaux, réunis mardi à Bruxelles pour soutenir financièrement un pays où les "étudiants en religion" n’ont rien perdu de leur pouvoir de nuisance.

Le régime du président Ashraf Ghani vacille en effet régulièrement sous leurs coups de butoir. Fin 2015, les insurgés ont ainsi pris le contrôle de larges parties du district-clé de Sangin, un haut-lieu de la production d'opium. Puis en février et mars 2016, les forces afghanes ont préféré plier bagages de plusieurs districts pour concentrer leurs forces sur Lashkar Gah, capitale provinciale assiégée du Helmand. Des percées militaires qui, 15 ans après le début du conflit avec le pouvoir de Kaboul, leur permet de grignoter de plus en plus de terrain. "D’après les Américains, le régime contrôle 70% du territoire. Les 30% restants sont ainsi gérés ou sous l’influence des talibans", explique à LCI Karim Pakzad, chercheur à l’IRIS.

Coup d'arrêt aux espoirs du gouvernement

Selon ce spécialiste de l’Afghanistan, les talibans sont littéralement "partout, même à Kaboul où, depuis au moins 2 ans, ils frappent là où ils veulent." Une implantation solidement ancrée : "Dans les districts qu’ils contrôlent depuis plusieurs années, ils ont leurs juges, leurs administrations, leurs gouvernants", abonde le chercheur, assurant qu’ils ont les moyens de leurs ambitions : "Ils ne manquent pas d’hommes et bénéficient d'une solide base ethnique composée de patchounes. On parle de quelques dizaines de milliers d’hommes." Leur revendication ? L’arrêt de l’intervention occidentale dans "l'émirat islamique d'Afghanistan".

Fort de leurs différents succès militaires, les talibans ont considéré que le vent soufflait en leur faveur et ont décidé, en mars 2016, de retirer leur participation aux pourparlers de paix avec Kaboul. Un coup d'arrêt à la fois aux espoirs du gouvernement de régler un conflit vieux de plus de 14 ans, quand leur régime de terreur prenait fin avec l'intervention américaine, et un avertissement à la communauté internationale. "Les Occidentaux se sentent obligés d’aider l’Afghanistan pour ne pas revivre l’échec des années 1980 quand le régime a été délaissé, conduisant à la prise du pouvoir par ces talibans en 1996", précise Karim Pakzad. 

10.000 hommes avec l'Otan

En conséquence, les Occidentaux soutiennent le régime financièrement et militairement, avec près de 10.000 hommes. Ces derniers appartiennent essentiellement à l'armée américaine, déployée sous mandat de l'Otan. "Officiellement, ils sont là pour aider l’armée afghane, notamment concernant leur formation. Mais ils participent de plus en plus aux combat", note Karim Pakzad. 

Une "occupation coloniale ", selon les talibans, qui devrait se prolonger : les travaux de Bruxelles qui s’ouvrent mardi en présence du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon et du secrétaire d'Etat américain John Kerry devraient garantir au moins trois milliards d'euros par an à Kaboul jusqu'en 2020. Dans un contexte de crises multiples au Moyen-Orient, "personne ne peut se permettre que l'Afghanistan soit de nouveau déstabilisé", a estimé un haut responsable européen avant la réunion.

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Thomas GUIEN

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