SÉMANTIQUE – Désigné "Mot de l'année 2016" par les linguistes de la célèbre maison d’édition américano-britannique HarperCollins, le terme Brexit est à nouveau sur toutes les lèvres avec l'activation par Theresa May ce mercredi de l'article 50 du traité européen, enclenchant le divorce entre Londres et l'Union européenne. D’où vient ce néologisme ? Quand est-il apparu ? LCI vous raconte l'histoire qui se cache derrière le terme qui fait trembler l'UE.
Si l’année 2016 était celle du Brexit, 2017 l'est aussi. Ainsi, après avoir marqué l’actualité politique, économique et internationale depuis le 23 juin dernier et le référendum qui a dit "oui" au Brexit, le (long) processus de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne est véritablement enclenché ce mercredi 29 mars. C'est donc l'occasion de revenir sur la sémantique de ce terme, symbole d'une UE en plein doute.
En novembre dernier, les linguistes de la célèbre et prestigieuse maison d’édition américano-britannique HarperCollins avaient à juste titre décidé de placer le néologisme formé autour des mots Britain et Exit (Grande-Bretagne et Sortie) tout en haut de leur classement des "mots de l’année". Manifestement apparu en 2012, son usage a augmenté de plus de 3.400 % en 2016 d’après les calculs de l’éditeur. Soit tout simplement une hausse "jamais vue" depuis l’existence de ses mesures. Et pour cause...
Brexit doit tout à Grexit
Le terme Brexit doit, selon toute vraisemblance, sa naissance à la Grèce. Utilisé dès le début de l’année 2012 pour évoquer l’hypothèse d’une sortie d’Athènes de la zone euro, voire de l’UE, le mot Grexit – formé sur des bases linguistiques identiques – est sans nul doute à l’origine de son cousin anglais. Au Royaume-Uni, où l’euroscepticisme prospère, les anti-Bruxelles se mettent alors rapidement à parler de Brexit.
La paternité précise du mot n’est toutefois pas évidente à déterminer. Si beaucoup l’attribue, comme le rappelle le Figaro, à un article de l’hebdomadaire économique d’outre-Manche The Economist publié 2012, elle pourrait en fait être reconnue à Peter Wilding, fondateur de British Influence (une organisation oscillant entre le lobbying et le conseil, ndlr) et auteur d’un texte intitulé "Trébuchant vers le Brexit" (Stumbling towards the Brexit) le 15 mai 2012. C'est d'ailleurs le compte Twitter de British Influence qui sera le premier à mettre en ligne le terme Brexit le même jour :
Stumbling towards the Brexit - Britain, a referendum and an ever-closer reckoning http://t.co/9QXlwPNk — British Influence (@britinfluence) 15 mai 2012
Mais la reconnaissance mondiale du mot n’intervient qu’un an plus tard, en 2013. Pour se faire réélire, David Cameron, le Premier ministre britannique de l'époque (démissionnaire après la victoire du "oui"), propose en effet aux Britanniques de choisir s'ils souhaitent ou non continuer à faire partie de l’Union européenne. L’utilisation médiatique du mot est alors frénétiquement lancée. Avec un paroxysme atteint le 23 juin 2016, jour du référendum, où plus de six millions de tweets ont été échangés.
Sans doute la contribution politique la plus importante à la langue anglaise de ces 40 dernières années
Helen Newstead, responsable des contenus linguistiques pour les dictionnaires Collins
"C’est sans doute la contribution politique la plus importante à la langue anglaise de ces 40 dernières années, depuis que le scandale du Watergate a donné le suffixe '-gate' aux commentateurs pour parler de tout incident ou scandale", explique au Guardian la responsable des contenus linguistiques pour les dictionnaires Collins, Helen Newstead. Et autant vous dire qu'on n'a pas fini d'en entendre parler.