"Femmes de réconfort" : pourquoi l'accord entre Tokyo et Séoul est historique

Publié le 29 décembre 2015 à 13h00
"Femmes de réconfort" : pourquoi l'accord entre Tokyo et Séoul est historique

ASIE - Le sujet empoisonnait les relations entre les deux pays depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Les esclaves sexuelles sud-coréennes, restées dans les mémoires derrière l’euphémisme "femmes de réconfort", ont fait l’objet d’un accord historique ce lundi. Le Japon a en effet offert "des excuses sincères" à la Corée du Sud et un milliard de yens (7,5 millions d'euros) aux quelques dizaines de femmes encore en vie.

► Pourquoi parle-t-on de "femmes de réconfort" ?
Dans la foulée du massacre de Nankin en 1937, durant lequel des milliers de femmes sont violées, le Japon cherche une solution pour limiter les tensions causées par les viols, extrêmement nombreux, commis par les militaires de l'armée impériale dans les territoires conquis. L'objectif était également de maintenir le moral des troupes et de les protéger des maladies vénériennes en imposant l'usage du préservatif. Sur ordre des autorités, l'Armée procéda à l'implantation en zone occupée de maisons closes dites "centres de délassement" ou "maisons de confort". La plupart des historiens estiment que jusqu'à 200.000 femmes, pour la plupart des Coréennes mais aussi des Chinoises, des Indonésiennes et des ressortissantes d'autres pays asiatiques, ont été enrôlées de force dans les bordels de l'armée impériale.

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► Pourquoi le dossier empoisonnait-il leurs relations bilatérales ?
Pour le Japon, qui a occupé la Corée de 1910 à 1945, cette question a été réglée en 1965 à la faveur de l'accord qui a rétabli les liens diplomatiques entre Tokyo et Séoul. Le Japon avait également reconnu en 1993 sa culpabilité dans l'exploitation de ces femmes, un fonds étant alors établi pour leur verser des réparations financières. Problème : pour Séoul, ce fonds n'avait aucune valeur car il avait été financé par des dons privés, et non par le gouvernement japonais. Mais surtout, la Corée du Sud continuait de réclamer un véritable repentir de la part des autorités nippones. En vain. 

► Un accord aurait-il été possible sans Washington ?
Cette question a contrarié durant des décennies Washington, qui préférait voir ses alliés se concentrer ensemble sur la réponse à apporter aux ambitions grandissantes de la Chine dans la région, plutôt que de les voir s'écharper sur la question des "femmes de réconfort". Selon de nombreux observateurs, la Maison Blanche a fait pression sur la présidente sud-coréenne Park Geun-Hye pour qu'elle adoucisse sa position vis-à-vis de Tokyo. Et c'est à la faveur de pressions présumées des Etats-Unis qu'elle a accepté début novembre de rencontrer en face à face le Premier ministre japonais Shinzo Abe, à l'occasion du premier sommet bilatéral entre les deux dirigeants. "C'est un accord entre deux gouvernements, pas entre deux sociétés. Toute la question est de savoir si la société sud-coréenne l'acceptera", a mis en garde Kan Kimura, chercheur à l'université japonaise de Kobé.

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Thomas GUIEN

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