A quoi sert encore l'ONU ?

par Simon HENRY
Publié le 14 octobre 2016 à 10h17
A quoi sert encore l'ONU ?

3e GUERRE MONDIALE - Incapable de résoudre la crise syrienne, Ban Ki-Moon cède sa place de secrétaire général de l'ONU à Antonio Guterres avec un goût d'inachevé. Mais son successeur aura t-il vraiment les pouvoirs de faire mieux?

Les images de la Syrie ne cessent d’émouvoir la communauté internationale. Et pourtant, malgré la mise en place de processus de négociations depuis le début du conflit, il y a cinq ans maintenant, aucune solution claire et précise ne parvient à se dessiner. 

Réunis samedi 8 octobre pour sortir de l’impasse syrienne, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité (France, Grande-Bretagne, Etats-Unis, Russie et Chine), n’ont pu s’entendre à l’unisson sur les conditions d’une résolution. En effet, allié du président syrien, Bachar-Al Assad, la Russie a mis son droit de véto, annihilant une énième fois, tout infime espoir de mettre fin à la tragédie. Moscou estime en effet qu'il n'est pas du ressort du Conseil de sécurité de se prononcer en faveur du renversement d'u pouvoir en place. Une position sur laquelle la Russie campe obstinément depuis le début de la guerre. 

Or, l’ONU, initialement conçu en 1945 pour établir la sécurité mondiale, « ce machin » comme l'appelait le général de Gaulle, s'avère incapable d’empêcher les Etats de violer ouvertement le droit international. Résultat : le régime syrien peut continuer à martyriser son peuple en toute impunité. D’où cette question : l’ONU est-elle encore véritablement capable de remplir son  rôle de gendarme des relations internationales ?

Un colosse aux pieds d'argile

Depuis quelque temps, l’ONU traverse une crise de légitimité qui s'exprime par la remise en cause de sa capacité à représenter les Etats, et surtout à réagir. D’ailleurs, la question de la réforme du Conseil de sécurité a été régulièrement évoquée ces dernières années. Compte tenu de son incapacité à trouver une solution concrète et persuasive pour mettre un terme à un conflit, plusieurs interrogations ont été soulevées : faut-il élargir le Conseil ? Faut-il envisager l'abandon ou le réaménagement du droit de véto pour enfin avancer ? 

Un seul point a vraiment été sur la table des négociations : l'accueil de nouveaux membres permanents. Si cet aménagement aboutit, l'Allemagne, le Japon, le Brésil ou l'Inde font figure de grands favoris. Mais tout comme la situation en Syrie, le projet s’enlise. Peut-être que la nomination d’Antonio Guterres au poste de secrétaire général de l’ONU contribuera à enfin déterrer ces questions, qui, en l’état actuel, ont vocation à rester des vœux pieux. 

Frapper là ou ça fait mal

À l’image de son immobilisme en Syrie, l’ONU semble bel et bien aujourd’hui dépassé par la mutation des relations interétatiques, et peine sérieusement à affirmer son autorité aux Etats dits "voyous". Il est ainsi notable d’observer que l’ONU privilégie davantage les sanctions économiques aux interventions militaires pour faire plier un Etat récalcitrant. 

Les exemples les plus probants : la Russie, frappée de sanctions pour son annexion pour la Crimée, ou encore la Corée du Nord ou l’Iran, deux pays eux aussi sanctionnés ces dernières années pour avoir poursuivi leurs programmes nucléaires militaires clandestins. Résultats : les avoirs russes ont chuté, l’Iran a été contraint de négocier son programme nucléaire en échange de la levée des sanctions ; tandis que la Corée du Nord, elle, persiste et signe, mais au détriment d’une population plongée dans une situation d'extrême pauvreté. 

Privilégier la recherche de la paix

Certes "le machin" n'abolit pas les inégalités de puissance. Pas plus qu'il n'empêche  les massacres ou les guerres. Mais malgré de nombreux ratés, l'ONU contribue malgré tout à réduire les tensions et à faire perdurer le rêve d'une paix mondiale. Le rôle de l'ONU qui offre aux belligérants une enceinte de dialogue et de négociation facilitant l'expression et l'évacuation des tensions n'est pas négligeable. 

En effet, depuis la seconde guerre mondiale, il n'y a eu aucun conflit majeur ouvert. Preuve que le spectre de cette guerre si sanglante est encore présent.  Les Etats semblent avoir tiré les leçons du passé et  l'heure est à la globalisation.  La recherche d'une croissance économique et culturelle apparaît désormais comme le principal  signe de puissance, qui  relègue un peu plus le recours aux armes dans les poubelles de l'histoire. 

L'ONU ne parviendra sans doute jamais à faire disparaître les luttes de toutes sortes, notamment concernant les ressources naturelles ( pétrole, eau, gaz..), mais elle a contribué à civiliser les relations interétatiques en instaurant un cadre, des voies et des procédures de discussion. On peut au moins lui attribuer ce mérite, non ?


Simon HENRY

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