VIDÉO - Des dizaines de manifestants tués à l'abri des regards : pourquoi l'Iran est-il au bord du chaos ?

Publié le 22 novembre 2019 à 17h20, mis à jour le 22 novembre 2019 à 17h34

Source : JT 20h WE

CRISE - Des manifestations se déroulent depuis une semaine en Iran, entraînant la mort de 106 personnes selon Amnesty International. Une flambée de violences qui a débuté avec une hausse du prix de l'essence.

Une répression par le sang, loin des regards. Tirs à balles réelles, Internet coupé, gaz lacrymogène et canons à eau… Téhéran a employé ces derniers jours la manière forte pour tenter de réduire à néant la vague de contestation qui se répand à travers tout le pays. Le bilan serait lourd : plus d'une centaine de tués, des dizaines de blessés, selon Amnesty International. 

Une semaine d'émeutes

S'il est difficile d'avoir des informations précises - les autorités ayant coupé Internet dimanche -, des photos et des vidéos transmises le week-end dernier puis à nouveau ce vendredi mettent en lumière la violence des affrontements. Sur plusieurs documents, on aperçoit des manifestants masqués dans des rues jonchées de débris en train d'incendier des bâtiments publics, des stations-service, des commissariats ou des mosquées. Face à eux : des forces de l'ordre qui, au fil des jours, ont accentué leur répression. Amnesty International a ainsi relayé des images montrant des forces de l'ordre tirer à balles réelles. Javanroud, Marivan, Kermanshah… Plusieurs villes ont peu à peu été gagnées par ces émeutes.

Toute la ville est en flammes
Un témoin basé à Téhéran

"Toute la ville est en flammes, il n’y a plus une seule banque qui n’ait été incendiée. Les gens sont en colère parce que le niveau de violence de la police est inimaginable. J’ai assisté à la révolution verte de Téhéran en 2009, mais ça n’a rien à voir. J’ai vu au moins dix corps dans la rue. Je connaissais certaines des victimes", a raconté aux Observateurs de France 24 un témoin basé dans la capitale. 

D'autres témoins ont aussi assuré que les hôpitaux étaient débordés. Aucun bilan officiel n'a été communiqué. Mais les agences officielles Isna et Fars font état de la mort de quatre agents tués "à l'arme blanche" par des "émeutiers" dans la province de Téhéran.

La hausse du prix de l'essence, point de départ de la crise

Il n'aura fallu que quelques heures après l'annonce d'une réforme du mode de subvention de l'essence, le 15 novembre dernier, pour voir éclater les premières manifestations à travers tout le pays. Le sujet est sensible, le carburant étant très subventionné en Iran. 

Le litre est passé ainsi de 10.000 à 15.000 rials (11 centimes d'euros) pour les 60 premiers litres achetés chaque mois. Au-delà de cette quantité, le prix a triplé, à 30.000 rials. Les autorités assurent que les recettes dégagées doivent bénéficier aux 60 millions d'Iraniens les moins favorisés, sur une population totale de 83 millions.

Critiques acerbes de la communauté internationale

Toujours très prompt à critiquer le régime iranien, le président américain s'est fendu d'un énième tweet : "Ils veulent zéro transparence, en pensant que le monde ne se rendra pas compte de la mort et la tragédie que cause le régime iranien !"  

L'Union européenne a quant à elle exhorté les autorités iraniennes à faire preuve de "la plus grande retenue" dans la gestion des manifestations. Des manifestations ourdies depuis l'étranger, s'est défendue l'Iran. "Une véritable guerre mondiale contre le système et la révolution a vu le jour et heureusement l'enfant est mort-né", a déclaré ce vendredi la milice iranienne des Bassidji.

Un contexte de récession en toile de fond

Le retrait unilatéral des Etats-Unis, en 2018, de l'accord international sur le nucléaire iranien conclu en 2015, et le rétablissement dans la foulée de lourdes sanctions contre Téhéran ont plongé l'économie iranienne dans une violente récession. Le Fonds monétaire international estime que le PIB de l'Iran devrait chuter de 9,5% cette année après un recul de 4,8% en 2018. L'inflation, entraînée par la chute du rial face aux grandes devises d'échange, atteint officiellement 40%. 

Un contexte économique compliqué qui, déjà en décembre 2017, avait provoqué une vague de contestation. Des manifestations accompagnées de violences avaient eu lieu dans des dizaines de villes du pays pour protester contre le coût de la vie et le pouvoir, faisant 21 morts. Les autorités, toutes tendances confondues, avaient à l'époque parlé de "revendications légitimes" contre la cherté de la vie et le chômage, tout en condamnant les "violences".


Thomas GUIEN

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