Voiture de police incendiée à Paris : dans ses plaidoiries, la défense dénonce une "enquête biaisée"

Publié le 27 septembre 2017 à 16h23
Voiture de police incendiée à Paris : dans ses plaidoiries, la défense dénonce une "enquête biaisée"
Source : LCI

JUSTICE – Les plaidoiries de la défense se sont achevées ce mercredi matin dans le cadre du procès de neufs prévenus jugés depuis le 19 septembre pour des dégradations et violences commises le 18 mai 2016 quai de Valmy à Paris. Le parquet a requis vendredi des peines allant de douze mois de prison avec sursis à huit ans de prison ferme. Le tribunal rendra sa décision le 11 octobre.

"Enquête biaisée", "preuve viciée", "policier menteur", les deux derniers avocats de la défense à plaider dans le dossier n'ont pas manqué de mots ce mercredi matin pour qualifier le travail réalisé dans le cadre des investigations menées après l'incendie d'une voiture de police le mercredi 18 mai 2016, quai de Valmy à Paris.  

Alors que le procureur avait requis vendredi dernier de lourdes peines, allant de 12 mois de prison avec sursis à huit ans de prison ferme à l'encontre des neuf personnes jugées dans cette affaire, dont une en son absence, Me Vey et Me Alimi se sont attachés à défaire les arguments du représentant du ministère public.

Le témoin anonyme dans le viseur

Me Vey, avocat de Nicolas F., 40 ans, accusé d'avoir notamment frappé le policier Kévin P. à coups de barre de fer, a rappelé que son client avait été "exemplaire pendant cette procédure", qu'il avait "reconnu les faits", les "avait regrettés", et affirmé avoir "eu peur", peur notamment de "cette arme dont aurait pu faire usage Kevin P." Lorsqu'il a été, avec sa collègue Allison B., attaqué par des manifestants alors qu'il se trouvait dans une voiture de police. "Nicolas F a dit "ce que j'ai fait est inqualifiable, injustifiable". Il est lucide sur la gravité des faits, a-t-il ajouté. 

Comme ses confrères de la Défense qui avaient déjà plaidé en fin de semaine, Me Vey s'en est  lui ausis pris au témoin "clé de cette affaire", le témoin n°142, et policier. "Etre accusé sur la base d'un témoignage anonyme est insupportable. Cette preuve n'est pas conforme à nos principes. C'est à désespérer et à craindre de la justice", a-t-il dit. 

Me Arié Alimi, avocat d'Antonin Bernanos, a pris le relais, critiquant vivement lui aussi ce n°142. Ce témoin policier qui a "permis" d'interpeller quatre personnes le jour même de la manifestation, ce témoin qui dit avoir vu quatre personnes qu'il a désignées nommément avant de refuser de témoigner devant le juge d'instruction et de répondre aux questions de la défense. "Qu'a fait le policier témoin anonyme ? Il a systématiquement refusé de témoigner. C'est une infraction pénale (…)"Si vous utilisez ce témoignage, vous corroborez une infraction pénale" a lancé Me Alimi au tribunal. 

"Cette affaire du 18 mai commence par un signalement de la DRPP (direction des renseignements de la préfecture de police ndlr), a-t-il rappelé. Dans ce dossier, la logique de la police administrative a été transposée dans la police judiciaire. Mon client Antonin Bernanos a essuyé douze poursuites par le passé, toutes à l'origine d'un renseignement de la DRPP. Dans tous les cas, les renseignements, les signalements étaient erronés". 

"Rôle de police politique"

Pour Me Alimi, rien ne prouve que le jeune étudiant, militant "antifasciste" revendiqué, était bien l'un des agresseurs masqués de la voiture de police, il a lancé: "Comment en arrive-t-on à contaminer nos enceintes judiciaires avec de la politique ? A vouloir accuser un opposant politique?"

"Contre Antonin Bernanos, il n'y a aucune preuve. Dans son réquisitoire vendredi, le procureur nous a dit qu'éventuellement un cumul d'indices, pouvait, ou pas, aboutir à la condamnation de mon client. Ce faisant, le procureur de la république reconnait donc qu'il y a un doute sur sa culpabilité. S'il y a un doute, il doit bénéficier à mon client et ce dernier doit être relaxé". 

"Méthode de preuves extrêmement douteuse"

Convaincu de l'innocence de son client et espérant que le tribunal ne prononcera pas de peine à son encontre. "Antonin Bernanos a été montré du doigt par l'Etat, par les services de renseignement de la préfecture comme étant le coupable. Après, on a essayé de faire corroborer cette dénonciation avec une méthode de preuves extrêmement douteuses" a-t-il insisté ce mercredi matin. 

Le procureur avait requis vendredi dernier cinq ans de prison dont deux avec sursis contre Nicolas F. Contre  Antonin Bernanos, arrière-petit-fils de l'écrivain Georges Bernanos et militant antifasciste très actif, qui risque la plus lourde peine : en théorie jusqu'à vingt ans de prison pour "violences aggravées" en état de récidive légale, le parquet avait requis cinq années de prison dont une avec sursis, et une incarcération immédiat

Le tribunal correctionnel rendra sa décision dans deux semaines précisément, le 11 octobre à 10 heures. Un important dispositif de sécurité est d'ores et déjà prévu ce jour-là dans et aux abords de la chambre 16-1 du tribunal correctionnel de Paris. 


Aurélie SARROT

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