Aurez-vous le courage de lire "Troupe 52", le roman d’horreur qui a réussi à effrayer Stephen King ?

par Jennifer LESIEUR
Publié le 29 novembre 2016 à 16h06
Aurez-vous le courage de lire "Troupe 52", le roman d’horreur qui a réussi à effrayer Stephen King ?

GORE C’EST GORE - Dans "Troupe 52" (Denoël), l’écrivain canadien Nick Cutter isole une bande de scouts sur une île, en proie à une effroyable maladie contagieuse qui infeste le corps de vers. C’est souvent gore, mais surtout remarquablement construit, grâce notamment à la double identité de son auteur.

Nick Cutter aime trancher dans le vif. Avec un nom pareil, me direz-vous... Sauf qu'il s'agit d'un pseudonyme, celui de Craig Davidson, l’auteur d’Un goût de rouille et d’os, dont Jacques Audiard a tiré son film De rouille et d’os. Or Davidson, ce Canadien de 40 ans, bon père de famille, cache dans sa tête assez d’histoires épouvantables pour se créer un double littéraire avec lequel effrayer un autre lectorat. Avec succès : trois romans sont parus dans le monde anglo-saxon, dont Troupe 52 est le premier traduit en français.

Cinq ados isolés et un ver solitaire génétiquement modifié

Troupe 52 a été adoubé par Bret Easton Ellis et Stephen King ; ce dernier s’est dit "terrifié" par sa lecture. Il y a de quoi. Imaginez cinq scouts de 14 ans, partis avec leur chef Tim pour un week-end sur l’île déserte (et imaginaire) de Falstaff, un rocher assez inhospitalier. Un invité surprise débarque en bateau à moteur : un homme terriblement émacié, rongé par une faim que rien n’assouvit. L’homme est malade ; Tim, qui est médecin, le voit bien. Mais de quoi ? On bascule une première fois dans l’horreur quand on s’aperçoit qu’il est infesté de vers géants. Puis une deuxième quand Tim est infecté. Et une troisième quand l’île est placée en quarantaine. Et tout bascule, pour ces ados qui ont de quoi sombrer dans la folie à chaque page.

Si Troupe 52 est si brillant, ce n’est pas pour les passages très gore qui détaillent les effets de ces vers solitaires génétiquement modifiés par un savant fou. C’est pour la finesse psychologique de Nick Cutter, qui prend soin de caractériser chacun des cinq garçons, dans les aspects les plus touchants et les moins ragoûtants de l’adolescence. Pour la construction très habile (empruntée à Carrie de Stephen King, avoue-t-il en conclusion) qui entremêle les récits pour mieux les compléter. Enfin, pour les variations de rythme dans l’horreur, qui ne peut rester constante sous peine de verser dans le ridicule ou la série B.

Grâce au savoir-faire de Nick Cutter, on est loin de ces écueils. Derrière lui se laisse deviner la patte de Craig Davidson : son empathie d’une part, ses références constantes au goût et à l’odeur des choses d’autre part. Avec lui, le roman d’horreur retrouve ses lettres de noblesse, celles qu’on avait un peu perdues depuis… Stephen King.


Jennifer LESIEUR

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