Pef : "La littérature jeunesse doit être le reflet de la vie"

par Judith KORBER
Publié le 6 décembre 2015 à 14h43

RÉACTIONS - A l'occasion du Salon du livre jeunesse, qui se tient jusqu'au 7 décembre à Montreuil, nous avons demandé à plusieurs écrivains et illustrateurs comment aborder les attentats du 13 novembre avec les jeunes lecteurs. Aujourd'hui : Pierre Elie Ferrier, alias Pef, auteur notamment de ''La belle lisse poire du Prince de Motordu'' (Galimmard).

Au lendemain des attentats
''J'accepterais bien sûr d'écrire un livre jeunesse sur les attentats. Le 14 novembre, j'étais en Italie. J'ai reçu les informations sur la tête. J'étais invité pour un festival de littérature à Cuneo, une ville en dessous de Turin. Finalement, le maire m'a demandé d'intervenir sur ce thème avec des discours, des dessins et la compagnie d'un pianiste iranien. Le théâtre était plein. Une fois l'hommage rendu aux victimes, je suis allé voir des enfants qui m'ont interrogé sur Le Monstre poilu (avec Henriette Bichonnier, éditions Folio Cadet). J'ai donc fait le grand écart au niveau des émotions entre la douleur et la force de la vie dans le regard des enfants."

► La littérature jeunesse contre les idées reçues
"La littérature jeunesse est un terreau sur lequel les enfants fructifient. Un jour, en région parisienne, une femme m'a abordé. Elle était une fille d'immigrés de Tunisie, en décrochage scolaire, avec des parents analphabètes. Grâce à la lecture du Prince de Motordu (Gallimard), elle a pris goût à la lecture et elle est devenue institutrice. La littérature jeunesse peut nourrir bien au-delà de la lecture, en combattant les idées reçues. La littérature jeunesse doit être le reflet de la vie et ne pas laisser les enfants dans un pays de nounours. La littérature jeunesse se porte très bien grâce aux prescripteurs que sont les parents, les enseignants, les bibliothécaires et les libraires parce que l'enfant a besoin de livres. C'est une alimentation nécessaire quand l'enfant est petit mais quand il grandit, cela devient moins évident."

Un auteur engagé
"Je ne sais pas encore par quel angle on pourrait aborder les attentats mais même ce thème peut être traité par le biais de l'humour. Je pense que ce sont des questions accessibles à partir du CM2. Dans ma bibliographie, j'ai déjà écrit sur la laïcité à l'école dans Mon école à nous (avec Alain Serre, éditions Rue du Monde). J'ai également réalisé cinq ou six ouvrages sur la Seconde guerre mondiale et j'ai également consacré un livre aux mines antipersonnel qui s'appelle Une si jolie poupée (Gallimard). Les auteurs jeunesse ne sont pas assez sollicités. La littérature jeunesse elle pourtant vivante, en meilleure santé que la littérature adulte. C'est un vaste terrain de discussions et de combats. On la réduit parce que la place de l'enfant dans la société est réduite. En général, on ne parle des enfants que pour la rentrée des classes, Noël et les vacances. Il n'y a pas de réelle participation des enfants dans les médias."

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