DECRYPTAGE - Plus d'un tiers des Français (34%) affirment adhérer "aux idées du Front national", un chiffre record, selon le baromètre d'image du FN publié par TNS Sofres mercredi. Mais derrière ce chiffre se bousculent beaucoup de contradictions.
C'est le record dont toute la presse parle ce mercredi matin. Un tiers des Français (34%) "adhèrent aux idées du Front national, d'après le baromètre réalisé par TNS Sofres pour Le Monde, France Info et Canal+. Un record absolu depuis le premier sondage du genre, en 1984. Un résultat de l'accession de Marine Le Pen à la présidence du parti d'extrême droite. Le niveau d'adhésion aux idées du FN ne cesse en effet d'augmenter depuis : il était à 22% lors de sa prise de fonction en 2011, bondissant à 31% l'année suivante et à 32% en 2013. La patronne frontiste séduit donc de plus en plus, c'est indéniable. Mais dans le détail, la position des Français face au FN est pleine de paradoxes.
Un programme économique qui ne séduit pas
Premier exemple : près de la moitié d'entre eux est d'accord avec "les constats exprimées" par Marine Le Pen (49%). Pour autant, parmi ces derniers, les trois quarts ne sont pas d'accord avec les solutions proposées. Le "problème" n'aurait donc pas changé depuis 1984, quand Laurent Fabius disait déjà que "le FN posait les bonnes questions, mais donnait de mauvaises réponses". Plus loin, on constate même que les propositions emblématiques de son parti ne séduisent pas. Sa fameuse idée de revenir au franc et de supprimer l'euro ne recueille que 29% d'opinions positives. Quant à sa proposition d'appliquer la préférence nationale pour l'emploi, le recul de l'opinion est flagrante : ils sont seulement 24% des sondés à adhérer à cette idée, alors qu'ils étaient le double vingt ans plus tôt. Un paradoxe surprenant : alors que les sondages promettent le succès du parti au municipales dans deux mois, son programme économique, dont il a fait son dada pendant la campagne, ne plaît pas.
Marine Le Pen n'est pas "sympathique"
Les contradictions ne s’arrêtent pas là. L'image de Marine Le Pen est elle aussi paradoxale. Une certitude : la fille de Jean-Marie Le Pen recueille de plus en plus d'opinions favorables : 58% des personnes interrogées jugent qu'elle est "capable de rassembler au-delà de son camp" (+5 points) ; 56 % qu'elle "comprend les problèmes quotidiens des Français" (+7 points). Pour autant, une minorité de Français la voit comme une personne honnête et qui inspire confiance (37%) ou qu'elle est sympathique (40%), et enfin qu'elle a de nouvelles idées pour résoudre les problèmes de la France (40%). La patronne frontiste séduit, mais la méfiance est toujours réelle.
Le FN n'est "pas un parti de pouvoir"
Des éléments qui nous amènent à conclure plusieurs choses : d'abord que l'opération "dédiabolisation" a porté ses fruits pour la patronne frontiste. Celle-ci est parvenue à normaliser son image, à séduire une partie des Français. Sauf que cette stratégie a une limite. Et c'est son parti. Ceux que Marine Le Pen est parvenue à séduire ne sont pas pour autant convaincus du bien fondé de son programme. Le FN reste perçu, par environ la moitié des Français, comme un parti avant tout "contestataire" (54%). La question, dont on sait qu'elle taraude actuellement le FN, de savoir s'il faut ou pas changer son nom pour permettre à sa leader de rassembler davantage, semble alors plus que jamais pertinente.