Grenelle de la santé des joueurs de rugby : "Les staffs et les équipes doivent être mieux sensibilisés aux dangers"

Publié le 5 septembre 2017 à 16h50
Grenelle de la santé des joueurs de rugby : "Les staffs et les équipes doivent être mieux sensibilisés aux dangers"
Source : NICOLAS TUCAT / AFP

INTERVIEW - Après une saison 2016-2017 marquée par une forte augmentation des blessures et des commotions cérébrales, la Ligue National de Rugby a lancé ce mardi un "Grenelle" de la santé des joueurs. Un moyen de questionner sur la pratique du rugby moderne et sur la gestion des blessures. LCI a interrogé le professeur Jean Chazal, membre de ce groupe de réflexion.

Ce mardi, pour la première fois dans l’histoire du rugby français, la Ligue Nationale de Rugby (LNR) s’est réunie pour lancer un Grenelle de la santé des joueurs. Ainsi, toutes les trois semaines, une douzaine de personnalités du milieu se réuniront pour mieux prévenir les blessures des joueurs de Top 14 et de Pro D2. Cette commission est composée de joueurs, d’entraîneurs, de patrons de club, de médecins ainsi que de l’ancien sélectionneur du XV de France Marc Liévremont.

Les commotions cérébrales particulièrement visées

En juin dernier, la LNR avait annoncé vouloir créer ce Grenelle après que les acteurs du milieu avaient alerté sur l’urgence de discuter des commotions cérébrales, des blessures et de leurs répétitions depuis une dizaine d’années. La saison dernière a en effet atteint des sommets en terme de commotions cérébrales. Selon les chiffres de la Ligue, une centaine de joueurs du Top 14 ont ainsi été sortis du terrain pour un protocole commotion, soit une augmentation de 35% par rapport à 2015-2016. Par exemple, le demi de mêlée de l’ASM Morgan Parra en a subi deux. Une situation qui force les équipes médicales à ménager les joueurs car à la troisième, un rugbyman doit être arrêté pendant trois mois avant d’être évalué par deux experts. 

L’an passé, cette augmentation s’était aussi beaucoup vue lors des phases finales.  Rien que lors de la finale opposant l’ASM à Toulon, cinq joueurs avaient notamment subi des chocs très violents, les forçant à sortir du terrain pour un protocole commotion. Quelques jours plus tard, l'un de ces touchés confiait "ne pas se souvenir d’une grosse partie de sa soirée". Ce soir de finale a donc mis en lumière une nouvelle réalité du rugby professionnel, la violence des chocs entre les joueurs.

Une nécessité pour "mieux prévenir"

Présent à la première réunion de ce Grenelle de la santé des joueurs, le professeur en neurologie Jean Chazal, responsable de la cellule médicale de l’ASM, nous a confié ses premières impressions.  "Je crois qu’il y a eu une véritable prise de conscience après la saison dernière.  Il est vrai qu’il y a une grande inquiétude autour de la santé des joueurs de rugby", explique-t-il. Lors de cette première discussion, la douzaine d’interlocuteurs présents autour de la table s’est surtout intéressée aux problèmes des commotions cérébrales. "Le problème de notre sport, c’est qu’il n’est plus un sport d’évitement comme dans le passé mais un sport de contact", regrette le professeur. 

Une évolution qui rend les chocs entre joueurs beaucoup plus violents et spectaculaires, mais qui les met en danger. "Nous devons revenir aux vraies valeurs de l’ovalie", assène Jean Chazal. "Les staffs et les équipes doivent être mieux sensibilisés aux dangers", affirme-t-il. Mais il veut que cela aille plus loin. "La sensibilisation doit commencer dans les écoles pour que les enfants comprennent que le rugby n’est pas seulement un sport de contact", propose-t-il.

Si les commotions cérébrales sont particulièrement visées, les blessures graves comme celles au genou notamment sont aussi la cible de ce Grenelle. "L’an passé, 35 blessures au genou nécessitant au moins trois mois d’arrêts ont été recensées", rappelle Jean Chazal. Les prochaines sessions de travail seront consacrées à ce type de blessures et aux manières de mieux les prévenir.

De nouvelles mesures déjà mises en place cet été

Cet été, une nouvelle mesure a été prise par la Ligue pour prévenir les commotions cérébrales depuis le bord du terrain. Ainsi dès cette saison, un analyste vidéo sera présent sur la pelouse pour analyser les actions à risques et ainsi décider si un joueur doit sortir du terrain pour passer un protocole commotion. "C’est une bonne chose, un joueur touché par une commotion cérébrale ne devrait pas revenir sur le terrain", assène le professeur Chazal.

De plus, depuis le 26 août, le World Rugby (ndlr : la fédération internationale) a aussi mis en place une mesure qui rallonge le temps de repos après un protocole commotion. Un joueur ayant été sorti pour un protocole commotion ne pourra désormais plus revenir sur la pelouse avant une durée minimale de dix minutes.

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La douzaine de membres de ce Grenelle se réunira une fois par mois jusqu’à la fin de l’année et présentera lors d’une grande réunion de la fédération à la fin de l’année à Lyon.


Antoine LLORCA

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