Burkini : comment les maires justifient leurs arrêtés d'interdiction

Publié le 17 août 2016 à 17h43
Burkini : comment les maires justifient leurs arrêtés d'interdiction

DÉBAT - La polémique ne cesse d'enfler depuis que plusieurs communes françaises ont pris un arrêté bannissant le burkini de leurs plages. Quelles sont les motivations de ces maires, dont certains n'ont jamais vu ce maillot de bain religieux sur leur littoral ? Metronews a fait le tour de la question.

Faut-il interdire le burkini sur les plages françaises ? Le sujet fait chaque jour un peu plus débat alors que plusieurs communes côtières de France, parmi lesquelles Cannes, Le Touquet ou Leucate, ont tour à tour pris un arrêté interdisant ce maillot de bain religieux couvrant le corps et la tête des femmes. Une mesure contre laquelle le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) et la Ligue des droits de l'homme (LDH) ont annoncé des recours systématiques devant les juridictions locales.

Contacté par metronews, Henry Leroy, le maire de Mandelieu-la-Napoule, explique avoir pris un arrêté "appuyé sur 17 lois et règlements en 2013", qu’il renouvelle chaque été. Selon lui, "le burkini trouble la quiétude publique" et va à l’encontre des valeurs républicaines. "Les préceptes religieux ne doivent pas se substituer à la République", explique-t-il. C’est en ayant eu écho de la venue d’une dizaine de femmes en burkini sur la plage de sa commune que l’élu dit avoir franchi le pas. "Leurs maris ont dénoncé une loi anti-musulmans, mais c’est faux, lance-t-il. Nous sommes d’abord citoyens français avant d’être musulmans, chrétiens, juifs ou athées. Les règles qui prédominent sont les lois républicaines".

"Le burkini est une déclinaison de la burka et du bikini"

Pour Oliver Majewicz, maire d’Oye-Plage près de Calais, cet arrêté est une "précaution". Car si l’élu n’a jamais été confronté au problème, le simple fait de voir une femme porter la burka sur la plage de sa commune lui a fait prendre conscience qu’il fallait se prémunir contre le burkini." J’ai été interloqué", confie-t-il à metronews, et "ça m’a paru nécessaire". "Le burkini est une déclinaison de la burka et du bikini, c’est le signe extérieur d’un principe religieux". Oliver Majewicz considère le burkini comme allant "à l’encontre du respect de la laïcité et de la féminité".

La dernière commune en date à s’être munie d’un arrêté contre ce maillot de bain très controversé est Leucate, dans l’Aude. Son maire LR Michel Py a expliqué à Midi Libre avoir "constaté sur (ses) plages une augmentation du phénomène qui peut amener à créer certaines tensions". Pour Lionnel Luca, maire de Villeneuve-Loubet, il s’agissait "d’éviter que le phénomène ne devienne récurent". Manuel Valls, qui a soutenu la démarche de ces communes dans un entretien accordé mercredi à la Provence , est "plein de bon sens" dans ses déclarations, estime-t-il auprès de metronews.

Le maire PS de la ville de Sisco en Corse - théâtre de violentes altercations dont il a été dit, avant que d'autres témoignages et l'enquête ne le mettent en doute, qu'elles avaient pour origine un différent lié à des photos prises par des touristes de baigneuses en burkini - estime pour sa part qu’il s’agit d’un "mouvement de mode" très répandu sur l’île de Beauté. Ange-Pierre Vivoni dit "vouloir protéger la population et notamment la population musulmane, car je pense qu'ils sont les premières victimes de ces provocations extrémistes".

Que dit la loi ? 

Si le sujet fait débat, plusieurs associations s'élevant contre des "atteintes aux libertés individuelles", Lionnel Luca affirme que le tribunal administratif de Nice, qui a rejeté samedi une demande de suspension de l'arrêté pris à Cannes, a reconnu la légitimité des arrêtés en se basant sur l'article 1 de la Constitution ("La France est une République indivisible, laïque...").

Comme le souligne Jean-Louis Harouel, professeur agrégé de droit à Paris II et auteur de "Le vrai génie du christianisme" et "Revenir à la nation" (Editions Jean-Cyrille Godefroy) dans un entretien accordé au Figaro , cet article interdit "à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s'affranchir des règles communes régissant les relations entre collectivités publiques et particuliers". Or selon lui sur les plages, "le fait de gérer au bénéfice des usagers une portion du domaine public affectée à l'usage du public constitue une activité exercée dans l'intérêt général, et relève donc de la notion de service public". Il reviendra au Conseil d'Etat de trancher la question.

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La rédaction de TF1info

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