Les blouses d’hôpital qui laissent voir les fesses bientôt rangées au placard

par Sibylle LAURENT
Publié le 20 décembre 2016 à 17h58
Les blouses d’hôpital qui laissent voir les fesses bientôt rangées au placard

SUJET PAS SI LÉGER - En 2012, une pétition lancée par un médecin généraliste demandait la fin de la blouse d’hôpital ouverte dans le dos, dénonçant une atteinte à la dignité du patient. Petit à petit depuis, les hôpitaux renouvellent leurs modèles. A Paris, tous les hôpitaux seront équipés d'ici la fin de l'année d’un modèle dernier cri.

Tous les fans d’OSS 117 gardent en mémoire la scène d’anthologie que l’on doit à ce bout de tissu. Rappelez-vous : dans "Rio ne répond plus", Jean Dujardin se réveille sur un lit d’hôpital, voit le méchant nazi en face de lui et entame une course-poursuite au ralenti dans les couloirs. La scène aurait pu être banale. Elle est en fait tordante car les deux personnages portent… des blouses ouvertes dans le dos, comme cela se pratique dans les hôpitaux. Allez, pour le plaisir, on vous la montre :

Rien ne justifie qu’elle soit ainsi exposée aux regards
Leya-mk, kiné blogueuse

Une course-poursuite les fesses à l’air, donc, ce qui rend d’un coup les deux héros ridicules… et tellement drôle. Mais ce qui est poilant dans un film ne l’est pas forcément dans la vraie vie. Et peut être même carrément humiliant. Et bien rassurez-vous : ces fameuses blouses qui laissent le derrière à l’air, en circulation dans les hopitaux français depuis les années 1950, est en passe de devenir un modèle collector. D’ici à la fin de l’année, les hôpitaux parisiens seront tous équipés de modèles bien plus couvrants, rapporte mardi Le Parisien. D’autres CHU s’y sont déjà mis, comme à Nîmes, Lyon, Marseille, ou encore Lille. 

L’histoire de ce changement commence en 2012. Au départ, Leya-mk, une kiné, publie un petit texte sur son blog, intitulé "Dignité, mes fesses". Elle y raconte l’histoire de Jeanne, une retraitée de 85 ans, opérée pour un prothèse de la hanche, qui se retrouve affublée de cette blouse qui ferme derrière, à l’aide de "deux malheureux boutons pressions bien difficiles à fermer". "Il suffit d’un peu trop de hanches sous une taille marquée pour que le patient passe l’intégralité du séjour les fesses à l’air", écrit ley-mk. "La taille couverte, le reste largement esquissé entre les pans écartés de ladite blouse. C’est comme ça et puis c’est tout. C’est la santé qui prime ma bonne dame."

Cette blouse ouverte a en effet de nombreux aspects très pratiques pour le personnel médical, par exemple pour les patients alités qu’il faut changer régulièrement. Mais Leya-mk s’énerve de voir Jeanne subir cette blouse impudique, en s’excusant presque. "Ça ne me fait rien à moi, soignante, de la voir ainsi dénudée", écrit la kinésythérapeuthe. "J’ai l’habitude, je n’éprouve rien de spécial, je ne juge pas, je m’en fous, pour moi. Mais que ça ne lui fasse rien à elle, je n’y crois pas. Qu’elle ait l’air d’accepter me révolte. Elle a beau être hospitalisée, rien, rien ne justifie qu’elle soit ainsi exposée aux regards. Et qu'elle s'y plie."

Nous refusons de considérer comme normal le fait de devoir renoncer à sa pudeur, parce qu'on est hospitalisé.
Farfadoc, médecin

La petite histoire a été relayé par d’autres blogueurs, appuyée par d’autres exemples. Dans la foulée, une médecin généraliste, Farfadoc, a lancé une pétition "Pour des chemises d’hôpital respectant la pudeur et la dignité des patients", signée près de 13.500 fois. "Dans la plupart des établissements hospitaliers, les patients sont affublés de la même chemise. Taille unique, ouverte dans le dos, quelques boutons pression à l'arrière, et le plus souvent, découvrant leurs fesses au moindre mouvement", est-il écrit dans le texte de la pétition, qui rappelle que "le respect de la dignité des patients est un principe inscrit dans la charte de la personne hospitalisée, dans le code de santé publique, dans le code de déontologie des médecins. Il a aussi droit au respect de sa dignité et de sa pudeur. Ces chemises d'hôpital ne respectent ni l'un, ni l'autre." En effet, "en se levant et en marchant un peu, un patient ainsi affublé se retrouve à moitié nu devant son voisin de chambre, ou devant les soignants, soignés, familles et amis, se trouvant en même temps que lui dans le couloir. Nous refusons de considérer comme normal le fait de devoir renoncer à sa pudeur, simplement parce qu'on est hospitalisé."

Le court texte, les témoignages, la pétition, avaient fait le buzz. Au point que le problème était même revenu aux oreilles de la ministre de la Santé Marisol Touraine, qui avait pris le sujet très au sérieux. "Si cette question est perçue comme secondaire par certains, elle ne l'est pas à mes yeux", avait annoncé la ministre, qui avait écrit à Farfadoc en lui indiquant qu’elle avait "saisi les services du ministère".  

L’histoire des blouses qui dévoilent le derrière a continué d’avancer : en octobre 2012, l’UniHA, qui centralise les achats des 56 CHU et grands centres hospitaliers de France, avait commandé  20.000 nouvelles chemises destinées aux malades. Un modèle "de chemise à fermeture croisé dos par trois jeux de pression, à encolure ronde et manches kimono", écrivait alors l’UniHA, qui ne "se substitue pas aux chemises chirurgicales, dont l’utilisation est pleinement justifiée en soins opératoires", mais s’y ajoute. La plupart des hôpitaux ont ainsi commencé à renouveler leurs stocks de chemises, au fur et à mesure. A Paris, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris nous indique avoir commencé le renouvellement de ses 125.000 tenues en 2014. La totalité des stocks devrait être changée d'ici la fin de l'année.

JT WE – Les services de chirurgie ambulatoire se modernisent pour le bien-être des patientsSource : JT 13h WE
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Sibylle LAURENT

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