On a testé… Veggietown, le nouveau quartier Vegan de Paris

par Sibylle LAURENT
Publié le 21 mai 2016 à 10h00
On a testé… Veggietown, le nouveau quartier Vegan de Paris

REPORTAGE - La cuisine Vegan, qui bannit de l'alimentation la viande mais aussi tous les produits d'origine animale, est tendance. Reste qu'à Paris, contrairement à d'autres grandes capitales, peu d'enseignes offrent ce type de restauration. Mais une page est sans doute en train de ses tourner : Veggietown, le nouveau quartier Vegan, est en train de se créer. Au milieu du 10e arrondissement, entre les rues du Paradis, faubourg Poissonnière ou rue de Hauteville, depuis quelques années, ouvrent de nombreuses enseignes qui se positionnent sur le créneau. Metronews est allé déguster.

Veggitown. Ça sonne comme une ville du Far West. Mais, c'est à Paris que ça se passe. Depuis quelques années, se concentrent, sur deux ou trois rues du 10e arrondissement, une flopée d'enseignes proposant de la nourriture végétarienne ou Vegan. Une tendance bien repérée par l'Association végétarienne de France (AVF), qui en a même fait une carte (voir ci-dessous). En bon carnivores que nous sommes, l'idée nous a pris d'aller voir ce monde curieux, ce "végé-quartier". Est-ce une secte ? Va-t-on n'y croiser des mines austères, des teints couleur de betterave ou de brocolis ? Devra-t-on, pour y rester, faire allégeance au végétarisme ? C'est parti !

EN SAVOIR + >> Pourquoi le "Vegan" s'impose de plus en plus en France

Premier stop, rue d'Hauteveille, faubourg des Poissonnières, rue du Paradis. Impressionnant, il est vrai. Ici, fourmillent une multitude de petites enseignes de bouche : trois magasins Biocoop ou Bio C'Bon en quelques mètres, des petites pancartes mentionnant "Bio, gluten free, sans lait", des noms de restaus évocateurs, le Végétarien, le Végébowl, le Véganovore, Las Vegans, ou encore Supernature. On est sur la bonne piste. Et on entre, un peu au hasard, chez Cho Cantine , jolie petite cantine vietnamienne installée rue du Paradis. Ici, ils sont "vegan friendly". Et l'accueil de Cyril Roussel, qui a lancé l'endroit avec Hugues Ollivier il y a 9 mois, est lui aussi très "friendly".

"C'est le quartier où il y a le plus de gens qui votent écolo"

"En fait, dès le début, on voulait proposer une option vegan. C'est une tendance plutôt naturelle de la cuisine viet, qui est assez pauvre en viande, et c'est aussi beaucoup d'actualité", explique le quadra. "De plus en plus, les gens ont envie de manger bien, sain, tout en se faisant plaisir". Après, lui est ouvert : "La viande ne nous dérange pas. On ne propose pas le Vegan par dogme, car pour certains c'est vraiment de l'ordre de la croyance, mais parce ce qu'on se reconnaît dans cette envie de manger différemment, de la qualité."

Même si son enseigne est encore récente, il a vu d'autres commerces arriver ces tous derniers mois, sur le même créneau. "C'est un peu le quartier des nouvelles solutions de restauration. C'est aussi le quartier où il y a le plus de gens qui votent écolo en France. C'est peut être lié." Et cette spécialisation de plus en plus poussée du quartier attire non seulement un public d'initiés, mais crée des adeptes insoupçonnés. "On a été surpris", reconnaît Cyril. "Quand on a lancé le Tofu, ça n'avait pas un succès fou. Même moi, personnellement, ça ne me faisait pas rêver ! Pourtant on peut le déglacer, le faire mariner, le fumer… C'est délicieux. Et on est quasiment en rupture de stock." OK. Donc, la cuisine Vegan peut avoir du goût. Intéressant.


Coralie et Daqui, au Tricycle.
Coralie et Daqui, au Tricycle. - SL/Metronews


Quelques numéros plus tard, arrêt au Tricycle . Sorte de bar ouvert, où grillent des hamburgers et hot-dog. Ici, la street-food est "entièrement végétarienne, et à "97% Vegan". Derrière les fourneaux, Daqui et Coralie, qui ont ouvert l'endroit en 2015. Eux sont pratiquants. Vegan à 100%. "Être Vegan, c'est aller jusqu'au bout de son engagement, en modifiant de façon de consommer si on veut que les choses changent vraiment", confie Coralie. Et à Paris, les deux trouvaient que "ça manquait de propositions".

"Berlin ou Amsterdam sont très en avance dans le végétarisme"

Alors ils se sont installés dans le quartier. Et ça marche bien, ils n'arrêtent pas. "On attire des curieux du Vegan qui entendent parler de nous par internet, mais aussi des carnivores… Il y a vraiment de tout. C'est plutôt familial", explique Daqui. Il note tout de même pas mal de touristes ou d'étrangers à midi. "Des villes comme Berlin ou Amsterdam sont déjà très en avance dans le végétarisme", explique Coralie. "Et quand ils arrivent à Paris, il n'ont pas trop le choix." Même chez les Vegan, on peut manger des hot-dog. Bon, les saucisses sont au soja. Mais franchement, on s'y tromperait.


Le Café Pinson a ouvert il y a deux ans, rue du Faubourg Poissonnière.
Le Café Pinson a ouvert il y a deux ans, rue du Faubourg Poissonnière. - Café Pinson.


Poursuite de la balade, rue du Faubourg Poissonnière. Entrée au Café Pinson , cantine bio végétale, option sans gluten. Déco épurée branchée, entre le vieux café et l'ambiance coin de cuisine. Très sympa. C'est Agathe Audouze, qui a fondé l'endroit il y  deux ans. Mais un autre Café Pinson existait déjà dans le 3e. Reste que ce quartier, elle l'adore : "Il a une énergie super positive, ça bouge, c'est un quartier 'food', orienté autour du beau, du bon, des concepts innovants, en rupture avec la cuisine classique de Paris." Alors son bistrot à la carte végétarienne à 100%, et en grande partie végétalienne a vite trouvé son public. Agathe, elle aussi, est végétarienne et "en grande partie Vegan".

"Militantisme soft"

Et son credo, c'est de séduire pour attirer. Un "militantisme soft", en quelque sorte. "L'idée est de montrer que c'est possible de manger sainement et différemment. Et surtout, casser les codes et les préjugés autour de ce type de cuisine, avec une déco soignée, des jolis plats, des belles textures et du goût. Je suis fondamentalement gourmande, et je veux montrer que oui, manger bio, végétarien et sans trop de blé, c'est possible, et c'est sympa !" D'ailleurs, la grosse majorité des clients vient, selon elle, "parce que la cuisine est faite maison, la qualité artisanale, et que le cadre est sympa." Une démarche de bon sens, pour elle : "Le bio, le végatarien ou vegan, ce ne sont pas des effets de mode, mais une logique : avoir des produits bons et sains, ne pas manger trop de protéines animales ou de mauvaises graisses..." Donc le Vegan, ce n'est pas (si) contraignant, et ça marche aussi pour les gourmands. 


C'est en fait ' l'Association végétarienne de France ( AVF) qui a baptisé ce micro-quartier "Veggietown". Un peu par jeu, un peu pour stimuler les choses. "On s'est installé dans le quartier il y a un an, rue d'Hauteville, et on a découvert toutes ces pépites en matière de restauration", explique Elodie Vieille-Blanchard, la présidente. "Tout est super récent, n'a pas plus de quatre ans. En fait, ce genre d'adresse a tendance à se multiplier à Paris, mais pas dans une telle concentration." L'association regarde de loin ce "foisonnement" et l'encourage : "Il y a une sorte d'émulation. Comme Cho Cantine,qui a décidé spontanément de présenter une option Vegan, qui va proposer des jus à l'extracteur. Chacun s'inspire de ce qu'il se passe chez les voisins." 

"Plus on en parle, plus ça fait venir du monde"

Et l'association a peut-être son petit effet là-dedans : "On essaie de stimuler", reconnaît Elodie. "Comme on déjeune dans le quartier, on pose des questions, on demande d'où ça vient, si ça peut être Vegan... Les clients mettent peut-être eux même une sorte de pression sur les restaurateurs, pour un cercle vertueux."

Selon elle, grâce à ces cartes, la clientèle du quartier, initialement clientèle de bureau, s'est brassée : "Ca a fait venir un certain nombre de nouveaux clients dans ce quartier. Et plus on en parle, plus ça fait venir du monde !" Et, vrai de vrai, chacun peut venir essayer : "Au Véganovore, cet hiver, on a vu des femmes avec des grosses fourrures, qui aiment manger Vegan", rigole Elodie. "En fait, elles cherchent d'abord à se nourrir d'une façon saine." Et l'insolite de la chose, dans cette éclosion d'enseignes nouvellement Vegan, c'est qu'historiquement, le quartier était le repère des boutiques de cuir et de fourrure. "Bon, il reste encore deux grosses boutiques de cuir rue d'Hauteville", note Elodie. "Mais nous ne sommes pas en guerre ! L'idée est de dire qu'il existe un mode de vie durable, avec une bonne éthique, et bon pour la santé." 

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