Olivier Marchal, réalisateur de "Borderline", sur France 2 : "Je ne suis jamais apaisé"

Publié le 7 octobre 2015 à 12h27
Olivier Marchal, réalisateur de "Borderline", sur France 2 : "Je ne suis jamais apaisé"

22, V'LA LES FLICS - C'est une fiction ultra-sombre. France 2 diffuse "Borderline", le téléfilm d'Olivier Marchal librement inspirée de l'affaire Neyret, l'ancien numéro 2 de la PJ de Lyon, mis en examen pour corruption et trafic d'influence. On y retrouve Bruno Wolkowitch dans la peau d'un flic placé en garde à vue et soupçonné d'association de malfaiteurs.

Borderline s'inspire du livre 96 heures écrit par Christophe Gavat, un commissaire de police mis en cause dans l'affaire Michel Neyret. Pourquoi revenir sur cette histoire ?
Je l'ai fait pour Christophe Gavat et pour Michel Neyret, dont je suis proche. J'avais envie de livrer un témoignage sans pour autant faire de polémique virulente. Je raconte juste une histoire qui est réellement arrivée, mais en prenant des libertés avec la réalité pour ne pas leur créer d'ennui, puisque le procès de Michel est encore en cours. Mais il est évident que Jansen, le personnage que joue Patrick Catalifo est inspiré de lui.

Qu'est-ce qui vous touche particulièrement dans cette histoire ?
Je trouve cela incroyable de se dire qu'on travaille avec des gens qu'on ne connaît pas vraiment. C'est comme une femme qui découvre que son mari mène une double vie depuis 10 ans. Ça m'a toujours déragé et fasciné : comment un flic qui choisit un métier honnête, pour servir et protéger, peut-il dériver à ce point et pourquoi ? Mais attention, Borderline n'est pas un film sur des flics voyous, qui existent aussi. On parle ici des méthodes de travail.

A LIRE AUSSI >> Olivier Marchal : "Je suis un romantique désenchanté"

Pour combattre le mal, faut-il forcément se salir les mains ?
C'est ce que le film dit. Mon discours est peut-être radical parce que c'est un milieu que je connais bien et je sais aussi qu'on est en train de privilégier la technologie aux dépens de la relation humaine. Les Américains ont pris deux avions dans la gueule avec ça. Je reste persuadé que rien ne remplacera le renseignement et que la lutte contre la criminalité se fera toujours par la relation humaine, en manipulant l'autre. C'est ça la méthode la plus efficace et c'est ça que j'ai eu envie de raconter.

Borderline est aussi un film sur les coulisses peu reluisantes de la police...
Moi je ne veux pas être le mouton noir de la profession. Je ne suis pas là pour dénoncer, mais pour montrer la réalité telle qu'elle est. Si certains flics agissent comme ça, c'est parce qu'ils sont obligés de le faire. Quand on bosse à la police judiciaire, on est en contact avec de gros voyous. On est donc obligés d'employer les gros moyens. Mais je ne dis pas que c'est tout le temps comme ça. On voudrait bien travailler autrement, mais il faut nous donner les moyens.

Qu'est-ce qu'un bon flic pour vous ?
Comme le dit le personnage de Jansen dans une scène, c'est quelqu'un qui est flic 24 h/24. Quand il se lève, quand il mange, quand il baise, il reste flic. C'est aussi une personne humaine, qui a aussi de bons résultats. Quant à la façon dont il les obtient, ça, c'est une autre affaire !

A LIRE AUSSI >> Olivier Marchal : "Les flics adorent les comédies"

Etes-vous toujours aussi pessimiste sur la nature humaine ?
De plus en plus. Je ne suis jamais apaisé. Je pensais qu'en vieillissant ça s'arrangerait mais ce n'est pas le cas. J'ai toujours eu très peur de la vieillesse et de la mort, mais depuis le décès de mon meilleur ami, qui est parti d'un cancer foudroyant à 56 ans, ça m'a percuté. J'ai du mal à m'en remettre. Quand je vois tout ce qui se passe autour de moi ça me fait penser à la phrase du marquis Max Jacob, l'anarchiste qui avait fait le tour du globe à l'âge de 12 ans : "J'ai vu le monde et il n'est pas beau". Je partage cette philosophie, même si au quotidien je suis quelqu'un de gai, qui aime les plaisirs de la vie. Mais quand je me mets à ma table d'écriture j'ai du mal à penser à autre chose.

Justement, vous avez écrit une série pour Canal+ intitulée Section Zéro, apparemment archiviolente...
Oui, là je me suis lâché ! Je l'ai écrite après la mort de mon pote et j'y ai mis toute la haine que j'avais en moi. La série décrit un monde crépusculaire en 2025. C'est extrêmement violent, faut s'accrocher ! En rentrant à Paris, j'ai fait un burn-out. Après 7 mois en Bulgarie, un pays de gros macho avec la mafia omniprésente, et où on en a chié avec le froid, j'étais rincé.

Pourriez-vous un jour pouvoir réaliser une comédie ?
J'ai commencé deux comédies, dont une sur le milieu du cinéma, mais ça n'a pas abouti. J'adorerai mais pour le moment, c'est totalement raté !

Borderline, ce soir à 20 h 55 sur France 2.


Rania HOBALLAH

Tout
TF1 Info