VU D'AILLEURS - A l'heure où la France s'apprête à plancher sur la moralisation de sa vie publique, zoom sur nos voisins où cette transparence est déjà une règle pour les élus.
C'est l'une des promesses emblématiques d'Emmanuel Macron. Chapoté par le nouveau ministre de la Justice François Bayrou, la loi sur la moralisation de la vie publique devrait être présentée très rapidement. Le garde des Sceaux l'assure : elle sera sur la table avant les législatives des 11 et 18 juin. Un texte qui pourrait s'inspirer de nos confrères européens.
En particulier les pays nordiques, qui sont, selon l’organisation Transparency International, les meilleurs élèves en la matière. Et d'après le classement établi par l’organisme, la France se situe seulement en 23e position pour 2016, loin derrière le Danemark (1re position), la Finlande (3e), la Suède (4e).
Au Danemark, un médiateur pour veiller au grain
Un médiateur public nommé par le Parlement enquête en toute indépendance sur les plaintes reçues concernant l’administration publique. En outre, un bureau surveille la gestion de l’argent public et l’indépendance effective de la justice. Bien que la publication du patrimoine des élus ne soit pas imposée par la loi, la majorité des parlementaires se livrent volontairement à l’exercice, dans un souci de transparence. Les ministres sont également encouragés, quoique non obligés, à publier leurs dépenses mensuelles, leurs budgets de voyage et les montants des cadeaux qu’ils reçoivent.
La Suède, pionnière en la matière
Ici, le principe de transparence ne date pas d'hier mais… d'avant-hier, puisque le offentlighetsprincipen (c'est son nom) a été instauré en 1766. En clair : chaque Suédois peut avoir accès à n'importe quel document public mais aussi à des informations sur leurs concitoyens, considérées comme privées en France. Par exemple, le salaire d’un patron ou la déclaration fiscale d’un ministre, en s’adressant à l’Office des impôts. Cela n'a pas empêché quelques scandales, le plus célèbre étant l'affaire du Toblerone : en 1995, la numéro 2 du gouvernement a été poussée à la démission après avoir réglé quelques courses – dont la fameuse barre chocolatée – avec s carte de crédit de fonction.
En Norvège, la transparence en ligne
Chaque année, le fisc norvégien rend public sur son site des données-clés - revenu, fortune, montant des impôts - de tous les contribuables. Ici, on part du principe qu'il est plus motivant de payer sa juste part à la communauté quand on a l'assurance que tout le monde le fait. C'est l'occasion de voir fleurir dans les médias les classements des stars, sportifs et politiciens les plus riches ou les mieux payés. Mais aussi, pour tout un chacun, de vérifier ce que gagnent le patron ou les collègues de bureau. La pratique trouve ses racines au XIXe siècle, quand on pouvait aller à la mairie ou au centre des impôts consulter les registres fiscaux.
L'Allemagne face à l'exigence de l'opinion publique
En Allemagne aussi, la classe politique est confrontée à la volonté croissante de l'opinion publique en matière de transparence. En août 2016 par exemple, Petra Hinz, députée du Parti social-démocrate (SPD), a dû démissionner pour avoir publié un faux CV sur le site du Bundestag (Assemblée fédérale). Autre scandale retentissant, celui impliquant Rudolf Scharping, l'ex-ministre de la Défense de Schröder : en 2002, il a dû démissionner pour avoir rejoint sa maîtresse sur l'île de Majorque à bord d'un avion de l'armée…
En Angleterre, une évolution grâce à Tony Blair
Si le pays a connu son lot de scandales à travers les décennies, les choses changent depuis les années 2000 et la loi sur la liberté de l'information (Freedom of information act), promulguée par Tony Blair. La loi permet désormais à n'importe quel citoyen britannique de demander l'accès aux documents administratifs des organismes publics : 120.000 demandes sont ainsi faites chaque année, 60 % émanant de citoyens ordinaires, 20 % d'entreprises et 10 % de journalistes. Une règle qui a permis de faire éclater des scandales, comme en 2009 et l'affaire des notes de frais de certains députés.