ESPIONNAGE - La cour d'assises spéciale de Paris a condamné vendredi deux anciens des services secrets français pour avoir transmis des informations à la Chine.
C'est un procès rarissime. Et pour cause, il met en lumière les failles des services secrets français. Vendredi à Paris, deux ex-agents secrets français ont été jugés aux assises pour avoir trahi au profit de la Chine. Ces deux anciens espions ont été condamnés à Paris à 8 et 12 ans de prison.
Les deux hommes sont d'anciens agents de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), le service d'espionnage français. Ils se sont côtoyés au contre-espionnage. Ils étaient jugés pour "livraison d'information à une puissance étrangère", "atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation", "intelligence avec une puissance étrangère".
Pierre-Marie H., 69 ans, ancien fonctionnaire civil de défense qui a commencé sa carrière au début des années 1980 à la section en charge du contre-espionnage à la DGSE, comme le rapportait Challenges, a été condamné à 12 ans de détention criminelle. Le parquet général avait requis contre lui la peine maximale encourue, 15 ans.
Henri M., 73 ans, un militaire de carrière qui a passé une partie de sa vie en Chine, a pour sa part été condamné à 8 ans d’emprisonnement, alors que le parquet général avait requis 10 ans d’emprisonnement contre lui.
Enfin, l'épouse de Pierre-Marie H., qui comparaissait pour "recel de bien provenant d'intelligence avec une puissance étrangère de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation", a elle écopé de 4 ans d’emprisonnement dont 2 ans avec sursis.
La cour d'assises, composée uniquement de magistrats professionnels, a prononcé à l’égard de tous les trois la peine complémentaire de privation de droits civiques pendant 10 ans.
Un huis clos nécessaire
Le sujet est sensible puisqu'il s'agit-là d'une affaire de "pénétration par une puissance étrangère des renseignements français", a déclaré l'avocate générale lundi, avant de demander le huis clos. Une demande légitime pour le président pour qui il a paru "nécessaire non seulement de protéger les personnes amenées à témoigner et d’empêcher la divulgation d’informations touchant à la défense nationale".
Les anciens agents ont été mis en examen et placés en détention provisoire en décembre 2017, alors qu'ils étaient déjà à la retraite.
Il tombe amoureux de l'interprète chinoise
Vingt ans plus tôt, Henri M. avait été nommé représentant officiel de la DGSE à Pékin, où il a occupé le poste de deuxième secrétaire à l'ambassade. Mais il a été rappelé en France dès début 1998, après avoir entamé une liaison avec l'interprète chinoise de l'ambassadeur. Il a pris sa retraite quelques années plus tard puis est retourné en Chine en 2003, où il a épousé l'ex-interprète avec laquelle il s'est installé sur l’île de Hainan, dans le sud de la Chine.
Pierre-Marie H. quant à lui s'est fait arrêter à l'aéroport de Zurich avec de l'argent liquide après avoir rencontré un contact chinois sur une île de l'océan Indien. Lui n'a jamais été en poste à l'étranger.
Comme l'a souligné lundi l'avocate générale, il s'agit d'un procès "rare par les qualifications, rare par la qualité des accusés, rare par la période de prévention".