Acheter une voiture d’occasion pour les vacances : délai de rétractation, vices cachés, assurance... les pièges à éviter

Maître Jean-Baptiste le Dall (édité par L.V.)
Publié le 14 juin 2019 à 11h53

Source : JT 20h Semaine

LA CHRONIQUE AUTO - Les congés d’été arrivent à grands pas et certains vacanciers vont en profiter pour s’acheter une voiture d'occasion avant affronter les longs trajets. Quelques conseils de maître Jean-Baptiste le Dall, avocat en droit automobile, pour éviter les pièges.

Même si la date du grand départ approche, on ne pourra que rappeler aux acheteurs d'une voiture d'occasion que la précipitation est souvent mauvaise conseillère. D'autant que le délai de rétractation ne s’applique pas dans la grande majorité des acquisitions automobiles. 

Et pour cause : le délai de rétractation de sept jours, largement connu du grand public -et qui est en réalité un délai désormais allongé à quatorze jours- concerne uniquement l’achat à distance. Celui qui achète en ligne ou tout simplement à distance bénéficie en effet de ce droit de rétractation prévu à l’article L.121-20-12 du Code de la consommation. Cet article précise que cet acheteur "dispose d'un délai de quatorze jours calendaires révolus pour exercer son droit de rétractation, sans avoir à justifier de motif ni à supporter de pénalités".

Un achat dans une concession interdira donc à l’acheteur déçu de faire jouer ce droit de rétractation. La Cour de cassation l'avait, par exemple, rappelé dans un arrêt du 25 novembre 2010 (1ère chambre civile, n° de pourvoi : 09-69500). Faire affaire auprès d'un particulier n’ouvrira pas davantage ce droit à rétractation. Il est donc déconseillé de sauter sur la première occasion qui passe en se disant que l’on pourra toujours se rétracter

Des recours contre le cercueil roulant

Bien évidement, l’acheteur malheureux n’est pas totalement démuni face à un vendeur indélicat. Il est toujours possible de faire jouer la garantie légale des vices cachés. Mais attention, la justice ne tranchera en faveur de l’acquéreur qu’en présence de vices importants remettant en cause l’usage du véhicule (inutile donc d’engager un recours pour un bouton d’autoradio abîmé ou un rétroviseur électrique qui ne veut plus se rabattre de lui-même lors de la fermeture des portes). 

La vente ne sera pas davantage remise en cause pour de simples pièces d’usure qu’il convient de changer. Attention, additionnées les unes aux autres, ces pièces peuvent cependant finir par coûter cher. Le changement de plaquettes de freins, de pneumatiques, la vidange, le changement des filtres notamment, viendront alors plomber le porte-monnaie du vacancier, qui ne pourra donc pas espérer se les faire rembourser par son vendeur. Avant de signer, l’acheteur devra donc se renseigner sur l’entretien réalisé sur le véhicule. Une courroie de distribution à faire sous peu, par exemple, pourra éventuellement lui permettre de négocier le prix de cession à la baisse. 

Les vices ou défauts apparents ne pourront pas non plus permettre d’avoir gain de cause devant la justice si l’on souhaite engager un recours sur le fondement de la garantie légale des vices cachés. L’acquéreur potentiel devra donc être attentif lors de l’essai du véhicule. Impossible en effet pour lui de se plaindre après-coup  d’un pare-chocs fissuré ou d’une peinture abîmée visible de tous. De même, l’acquéreur devra scrupuleusement étudier le procès-verbal de contrôle technique car il ne lui sera plus possible de faire ensuite état d’un défaut qui aurait été mentionné sur ce document. On ne pourra que conseiller à l’acquéreur de se renseigner s’il ne maîtrise pas le vocabulaire parfois technique utilisé sur ces documents. 

Histovec désormais incontournable

Les acheteurs disposent depuis peu d’un nouvel outil, baptisé Histovec, pour éviter la mauvaise affaire. L’administration a en effet mis en ligne un site permettant d’avoir accès à l’historique administratif du véhicule : caractéristiques, couleurs, nombre de propriétaires, procédures spécifiques (gage opposition ou encore procédure de véhicule endommagé ayant donné lieu à réparation et suivi par un expert en automobile), tout est accessible. Dans sa dernière version, Histovec permet même de connaître le kilométrage relevé lors du dernier contrôle technique. 

L'acheteur ne peut pas avoir accès directement à ces informations. Il devra donc passer par le vendeur, qui, lui, accède au site avec son nom, sa date de naissance, le numéro d’immatriculation et le numéro de formule du certificat d’immatriculation. Le vendeur pourra alors ensuite transmettre un lien à l’acquéreur éventuel. Attention, les tribunaux pourraient rapidement calquer la jurisprudence sur celle qui s'applique pour le contrôle technique : l’acheteur pourrait difficilement se plaindre si l’objet de son mécontentement est spécifié sur Histovec et qu’il a eu accès à cette information. 

On l’aura compris, même pour un achat coup de cœur, il sera conseillé de demander cet historique, et ce d’autant plus que ce service est totalement gratuit ! A noter que d’autres sites payants comme Autorigin permettent d’avoir accès à quelques informations sans passer par le vendeur.  

Attention à la déclaration de cession

Même si l’on pense plus aux vacances qu’aux démarches administratives, l’acheteur devra prendre garde à rester dans les délais de 15 jours accordés pour procéder à la déclaration d’achat. Le vendeur, lui, aura normalement transmis un code de cession obtenu à l’issue des procédures effectuées sur le site de l’agence nationale des titres sécurisés (ANTS). Muni de ce code, l’acheteur devra à son tour se rendre sur le site afin que lui soit délivré un certificat d’immatriculation à son nom. Les éventuels problèmes administratifs inciteront l’acquéreur à conserver précieusement les coordonnées de son vendeur. 

Un véhicule assuré

De peur de passer à côté de la bonne affaire, certains conducteurs partent directement avec le véhicule sans passer par la case assurance. Attention, le fait que le vendeur n’ait pas contacté sa compagnie pour mettre fin au contrat ne vaut pas couverture d’assurance pour ce nouveau véhicule ! Mais celui qui est déjà assuré pourra se rassurer, sa compagnie pourra la plupart du temps régler très rapidement le problème. La question de l’assurance sera bien évidemment plus délicate pour les jeunes conducteurs effectuant leur première acquisition.

Garder une trace de tout

La déclaration de cession à l’administration est obligatoire mais ne suffit pas ! Rien n’est précisé sur ce document : ni l'état du véhicule vendu, ni son prix, ni les éventuelles négociations. L’acheteur qui souhaiterait se prémunir aura tout intérêt à rédiger un contrat de vente précisant l’état de la voiture ou tout au moins ce qui est indiqué par le vendeur. En cas de déconvenues au beau milieu de l’été, ce document pourrait se révéler très utile. 

Me J.-B. le Dall, docteur en droit et vice-président de l'Automobile club des avocats, intervient sur son site et sur LCI. 


Maître Jean-Baptiste le Dall (édité par L.V.)

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