Huis clos, annulations, reports, quarantaine… la planète sportive touchée de plein fouet par le coronavirus

par Mélinda DAVAN-SOULAS
Publié le 11 mars 2020 à 17h59

Source : JT 13h Semaine

À L’ARRÊT - À l’instar de l’économie, du high-tech et d’autres secteurs, le monde du sport subit, lui aussi les dommages collatéraux de l’épidémie de coronavirus. Compétitions arrêtées, matches à huis clos ou annulations de dernière minute s’égrainent chaque jour. Et à quelques mois des Jeux olympiques ou de l’Euro de football, sportifs comme fans retiennent leur souffle.

Le spectacle doit continuer malgré tout… ou pas. C’est un peu les deux tendances qui divisent le sport mondial ces derniers jours. Les dommages collatéraux du coronavirus continuent de se faire ressentir sur la planète. Football, basket-ball, cyclisme, tennis, handball… une année olympique qui plus est, cela ne pouvait pas être pire casse-tête pour les organisateurs.

Calendrier des compétitions resserré qui ne laisse pas de place aux reports, préparation physique à ajuster pour les sportifs, absence des spectateurs, événements à huis clos : la planète sportive tente de tourner rond, faisant contre mauvaise fortune bon cœur. Mais dans la douleur. 

Football : deux poids, de multiples mesures

De par son impact économique et sociétal, le football s’est rapidement retrouvé au cœur de la tourmente. De l’Angleterre à l’Italie, du championnat régional à la Ligue des champions, les avis divergent, les organisations aussi. En raison du confinement, l’Italie a mis en suspens sa Serie A jusqu’à début avril, comme toutes ses manifestations sportives dans le pays. Seules les rencontres ayant un enjeu international peuvent être pour le moment maintenues à huis clos, mais jusqu’à quand et avec quelle sécurité sanitaire pour les équipes étrangères ? Le club espagnol de Getafe a déjà fait savoir qu’il ne voulait pas se déplacer à Milan pour son match de Ligue Europa face à l’Inter. L’AS Rome, de son côté, n’a pas eu les autorisations pour se rendre à Séville. Beaucoup de voix s’élèvent désormais pour demander l’arrêt des compétitions européennes – qui devraient se jouer majoritairement sans spectateurs - plutôt qu’une élimination sur tapis vert de certains clubs.

En Espagne, la Liga a opté pour le huis clos  de ses deux premières divisions comme en France, mais seulement pour deux semaines dans un premier temps. Longtemps à couteaux tirés sur le sujet et jusque-là épargnée, la Premier League a vu son premier match reporté entre Arsenal et Manchester City "par mesure de précaution". Plusieurs joueurs londoniens et quatre membres de l’encadrement ont été placés en quarantaine après avoir été en contact en Ligue Europa avec le président de l’Olympiakos, Evángelos Marinákis, testé positif au virus, également président du club anglais de Nottingham Forest où aucun cas positif n'a été noté. Le risque que les joueurs d'Arsenal soient tombés malades est "extrêmement faible", a indiqué le club. 

Formule 1 : déjà des cas positifs avant le début de la saison

La F1 est à son tour touchée par le virus et c’est déjà l’état de crise à Melbourne (Australie), à quelques jours du premier Grand Prix de la saison. L'Albert Park Hôtel, situé à quelques pas de la piste, est fermé temporairement en raison d’un premier cas confirmé. Des membres des écuries McLaren et Haas ont été placés à l’isolement après avoir présenté des symptômes proches de ceux du Covid-19. Les résultats de leurs examens devraient être connus dans la journée. Le GP reste maintenu ce dimanche, en présence des spectateurs. Mais il se pourrait que la donne change. Les organisateurs du GP de Bahreïn, prévu lui le 22 mars, ont déjà annoncé son maintien, mais pour "les seuls participants". Les fans pourront le suivre "à la télévision".

En moto, les organisateurs du GP d'Argentine ont décidé de reporter l'épreuve d'avril à novembre.

Rugby : l'Europe dit stop, la France pas encore

La question se pose désormais de mettre à l’arrêt les championnats de Top 14 et Pro D2 jusqu’au 15 avril. La Ligue nationale n’a pas encore tranché, mais les présidents de clubs ont déjà décidé de suspendre leurs billetteries –même pour les compétitions européennes prévues début avril - en attendant de savoir ce qu’il advenait du championnat. Le tournoi des VI Nations a longtemps résisté à toute tentation d’annulation, de report ou de huis clos, hormis l’Italie face à l’Irlande. Si Italie-Angleterre sera logiquement reporté ce samedi pour le compte de la dernière journée, tout comme France-Irlande, pays de Galles-Ecosse reste maintenu.

Cyclisme : des mesures draconiennes

Evénement populaire, en extérieur et difficile à cadrer, le cyclisme souffre particulièrement du coronavirus. Les grandes courses italiennes qui marquent traditionnellement le printemps ont toutes été annulées dont Milan-San Remo, monument national et cycliste qui n’avait plié, en plus de 110 ans, qu’à trois reprises, lors des deux Guerres mondiales. Si la France a fait une croix sur le Tour de Normandie, Paris-Nice s’est élancé avec des mesures de précaution drastiques pour les coureurs : pas de signature d’autographes par risque de toucher un stylo contaminé, pas de selfies avec les spectateurs, pas de congratulations entre coéquipiers, pas d’échange de bidons d’eau ni de jets sur le bord de la route, etc. Tout ce qui fait le cyclisme tout simplement interdit. Résultat, de nombreuses équipes de premier plan (Movistar, Astana, Ineos…) se sont retirés de toutes les courses en mars. 

Mais cela n’a pas empêché des cas d’être signalés, notamment lors du Tour des Émirats. Les membres de plusieurs équipes qui avaient enregistré des cas de contamination, sont confinés depuis le début du mois dans leurs hôtels et jusqu’au 14 mars. Prévu le 12 avril, Paris-Roubaix voit son maintien en suspens car son départ sera donné à Compiègne, dans l’Oise, l’un des foyers infectieux français. Bien qu’organisé en juillet, le Tour de France est au cœur des interrogations tandis que le Giro, le tour d’Italie dont le départ est fixé au 9 mai, paraît bien mal embarqué. Mais la situation de compétition en extérieur, déjà planifiée depuis des mois, joue aussi en leur faveur pour de possibles organisations de dernière minute. 

Le tennis s'enflamme, le basket plus mesuré

Le tennis fut sans doute le dernier à céder à la pression sanitaire. Dimanche soir, à quelques heures des premiers matches, les organisateurs du tournoi d’Indian Wells ont décidé d’annuler l’épreuve en raison notamment de la déclaration de l’état d’urgence dans le comté californien de Riverside après la découverte d’un cas positif de contamination. Celui de Miami est menacé d’annulation tandis que d’autres épreuves masculines et féminines prévues en avril ont déjà annoncé qu’elles se joueraient à huis clos (Xi’an, Anning chez les femmes, Barcelone chez les hommes). Roland-Garros, Monte-Carlo et le reste de la saison sur terre battue sont sous la menace. Ce mercredi, c'est la Fédération internationale de tennis (ITF) qui a fait savoir que la phase finale de la Fed Cup, prévue du 14 au 19 avril à Budapest, était reportée à une date restant à définir. 

Côté basket professionnel américain, les joueurs ont longtemps résisté aux contraintes possibles de matches sans spectateurs, notamment à travers la voix de la superstar LeBron James qui avait dit préférer reporter le match que le jouer devant des tribunes vides. Mais le joueur des Los Angeles Lakers semble faire marche arrière et a indiqué qu’il se plierait à la règle du huis-clos s’il le fallait. La NBA s’inquiète d’ailleurs de l’évolution de la situation dans le pays où une vingtaine de décès sont recensés. Une réunion d’urgence avec les propriétaires des clubs est programmée ce mercredi. Le sport US (NBA, MLS, NHL, MLB) a pris des premières mesures communes en interdisant l’accès aux vestiaires à toute personne "non indispensable", ce qui inclut les proches, les journalistes et caméras, et en tenant la presse éloignée des athlètes en interview. En France, en raison de l’interdiction de rassemblement à plus de 1.000 personnes, l’Asvel a déjà fait savoir que les prochains matches se disputeront dans un antre vide.

Et quid des Jeux olympiques ?

Comme l’Euro de football au devenir incertain avec son idée saugrenue de se disputer cette année dans différents pays dont l’Italie, les Jeux olympiques retiennent leur souffle. A Tokyo où l’événement doit se tenir du 24 au 9 août, on ne veut toujours pas parler de report ou d’annulation. Techniquement, le Japon a l’année 2020 pour gérer son rendez-vous. Le report peut être envisagé. Cela ne se ferait pas sans conséquences financières élevées. Mais toujours moins qu’une annulation ou un huis clos nécessitant le remboursement des billets et des droits de diffusion, notamment à la chaîne américaine NBC qui a investi plus d’un milliard de dollars pour les obtenir. Sans compter les investissements immobiliers réalisés (le village des athlètes notamment) qui doivent être revendus à des particuliers et entreprises à l'issue des Jeux.

Mardi, un proche de l’organisation des JO de Tokyo avait évoqué un report "d’un an ou deux" en raison de l’épidémie de coronavirus. Une information démentie, mercredi, par le président du comité d’organisation japonais. "Il n’est pas prévu de changer nos projets", a déclaré Yoshiro Mori qui a indiqué avoir reçu des excuses du membre du board qui s’était exprimé. "Il n’est pas impliqué dans les décisions quotidiennes du comité d’organisation (que je co-dirige)", a-t-il expliqué. Dick Pound, le patron du CIO, avait déclaré en février que le CNO japonais avait jusqu’à fin mai pour prendre sa décision. Mais un report de deux ans mettrait les JO d'été de Tokyo en opposition frontale avec les JO d’hiver de Pékin.


Mélinda DAVAN-SOULAS

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