Alerte sur les dentifrices : deux tiers contiennent du dioxyde de titane, 50% pour les tubes destinés aux enfants

par Charlotte ANGLADE
Publié le 28 mars 2019 à 12h46

Source : Sujet TF1 Info

TOXIQUE - Alors que le dioxyde de titane dans les produits alimentaires doit être interdit sous peu, Agir pour l'environnement s'alarme de sa présence dans de très nombreux dentifrices. D'après une enquête publiée ce jeudi par l'association, deux tiers en contiendraient. Et ce qu'ils soient bio ou vendus en parapharmacie.

Et si vous brosser les dents nuisait à votre santé ? C'est en substance ce que suggère une enquête d'Agir pour l'environnement divulguée ce jeudi 28 mars. L'association a étudié ces derniers mois la composition de 408 dentifrices, dont 59 pour enfants, et a noté la présence de dioxyde de titane (CI 77891), un additif controversé car potentiellement cancérogène, dans deux tiers d'entre eux, dont vingt-cinq bio. La moitié des dentifrices pour enfants est également concernée.

"Ces résultats comprennent les dentifrices vendus en grandes surfaces, pharmacies, parapharmacies et magasins bio. Mais si l'on se concentre sur les marques les plus connues - Colgate, Signal, Aquafresh, Oral B... - que l'on trouve le plus souvent en supermarché, on est plutôt sur du 90 %", s'alarme auprès de LCI Magali Ringoot, la coordinatrice des campagnes d’Agir pour l’environnement. 

Une exposition chronique qui inquiète

Le problème, signale-t-elle, n'est pas forcément la dose contenue dans le dentifrice mais plutôt l'exposition chronique. La situation, insiste l'association dans un communiqué, est d'autant plus préoccupante chez les enfants, qui ont tendance à ingérer le dentifrice. "Cette exposition pose question, d'autant qu'elle se fait au niveau d'une muqueuse fragile, avec beaucoup de micro lésions qui peuvent faciliter davantage la pénétration du dioxyde de titane dans l'organisme".

Car l'additif - que l'on retrouve sur les étiquettes des produits alimentaires sous le nom d'E171 - serait capable de franchir les barrières physiologiques du corps pour passer d'un organe à l'autre, et ce jusque dans le sang. En 2017, une étude de l'Inra (Institut national de la recherche agronomique) menée sur des rats, avait indiqué que le dioxyde de titane était effectivement susceptible de se retrouver dans la circulation sanguine avant de s'accumuler dans certains organes, comme le foie. Soumis à des doses de dioxyde de titane pendant cent jours, près de la moitié des rongeurs avaient développé des lésions pré-cancéreuses au niveau du côlon. Si l'Anses avait conclu à l'époque que ces résultats ne permettent "pas de conclure sur les effets du TiO2 sur l’Homme", elle doit normalement publier au troisième trimestre 2019 une évaluation des risques liés aux nanoparticules dans l'alimentation, qui inclura le dioxyde de titane. Un rapport qui devrait permettre de se faire une idée plus précise de la potentielle dangerosité de sa présence dans les dentifrices.

Des nanoparticules non signalées

Les risques que dénonce l'association seraient encore amplifiés lorsque le dioxyde de titane est à l'état de nanoparticules (moins de 100 nm). "Elles peuvent plus facilement franchir les barrières physiologiques et leur potentiel de toxicité est d’autant plus grand", signale la militante. Or, aucun des 271 dentifrices ne précise sur son emballage si le dioxyde de titane présent est à l’état nanoparticulaire, une disposition obligatoire de par le règlement européen. Bonne nouvelle ou anguille sous roche ? Pour le vérifier, Agir pour l'environnement a fait analyser en laboratoire le dentifrice pour enfants Signal Kids goût fraise de la marque Signal. Résultat : 47% du dioxyde de titane est présent sous forme de nanoparticules.

En janvier 2018, une autre analyse, réalisée cette fois par l'UFC-Que Choisir, avait révélé la présence de nanoparticules de dioxyde de titane dans le Dentifrice Aquafresh triple protection + blancheur. "Ce qui est étonnant, c’est qu’un an après l’alerte de l’UFC, il n’a toujours pas la mention nano. Que fait la DGCCRF [Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes, ndlr.] ?" questionne Magali Ringoot. Et de s'emporter : "À quoi ça sert de prendre de tels risques pour une substance qui ne sert qu’à colorer la pâte de dentifrice et n'a aucune vertu nettoyante ni blanchissante ?".

Le sujet évoqué dès ce jeudi au sein du gouvernement

L'association doit être reçue ce jeudi après-midi par le cabinet du Ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire. Si cette rencontre concerne avant tout l'arrêté de suspension du dioxyde de titane dans l'alimentation, qui doit être publié mi-avril, Magali Ringoot nous a signifié sa ferme intention d'aborder le sujet de la présence de dioxyde de titane dans les dentifrices, mais aussi dans les excipients des médicaments. "Les dangers sont les mêmes. Il faut que l’arrêté de suspension  soit élargi à tous les produits que l’on peut ingérer de manière volontaire ou accidentelle", insiste-t-elle. "Nous demandons aussi à ce que la répression des fraudes fasse son travail et qu’elle nous dise pourquoi il n’y a aucune mention nano sur les étiquettes de dentifrices alors que quand on les analyse, on en trouve tout de suite."

Pour aider les consommateurs à trouver un dentifrice sans dioxyde de titane, l'association a mis en place une page spécialement dédiée. Les produits y sont classés en fonction de leur composition et par catégorie : dentifrice bio, pour enfants, poudre dentaire blanchissante...


Charlotte ANGLADE

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