Naomi Amarger dans "Le ciel attendra" : "Je pensais que ça n'arrivait qu'aux ados paumés de banlieue"
RENCONTRE – Elles sont jeunes et débordantes de talent. Dans "Le ciel attendra", quatrième film de Marie-Castille Mention Schaar, en salles ce mercredi, Noémie Merlant et Naomi Amarger incarnent deux filles fragiles qui se font embrigader par des islamistes. Le duo revient pour LCI sur cette expérience intense et parfois douloureuse.
16 novembre 2015. La France, toujours tétanisée, pleure ses morts. Trois jours à peine après les attaques du Bataclan et des terrasses de l’est parisien, qui ont mis en émoi le monde entier, s’ouvre le tournage du nouveau film de Marie-Castille Mention-Schaar, Le ciel attendra. Atroce ironie du sort, le quatrième long métrage de la cinéaste relate par le menu le processus d’enrôlement de deux jeunes filles par des islamistes. "Nous étions sous le choc, dans une espèce d’horreur que je n’avais jamais connue", se souvient Naomi Amarger, qui y incarne Mélanie, une ado violoncelliste ciblée par un recruteur sur Facebook. "Nous étions conscients de l’importance de ce qu’on avait à faire."
Même son de cloche chez Noémie Merlant, qui prête ses traits à Sonia, une victime en voie de déradicalisation. "On a vécu ce tournage unis", explique-t-elle. "On s’est rendu compte qu’il fallait combattre ce fléau en parlant, en recréant du lien, en essayant de comprendre et en montrant qu’il y a de l’espoir. Le premier jour, Marie-Castille a tenu à faire une chaîne de l’amour. Tout le monde se donnait la main, des techniciens aux acteurs, pour diffuser une énergie positive." Impressionnantes de justesse, les deux actrices ont pris très au sérieux leurs rôles respectifs et les ont préparés avec beaucoup d’attention, multipliant les lectures et les rencontres.
Noémie Merlant a par exemple rencontré une jeune femme en phase de désembrigadement et participé à un groupe de paroles de personnes confrontées au triste phénomène. "J’ai vu des parents d’horizons différents rassemblés dans la même douleur : médecins, profs, athées, catholiques, juifs, musulmans…", confie-t-elle. Tous faisaient face au départ d’un enfant vers la Syrie. La détresse, énorme, la bouleverse au plus profond. "Je me suis pour ma part plongée dans les livres de Dounia Bouzar (fondatrice du Centre de Prévention contre les dérives sectaires liées à l’islam, ndlr)", enchaîne Naomi Amarger. "Je pensais que ça n’arrivait qu’aux ados paumés de banlieue, en échec scolaire, et qu’il fallait être fatalement musulman pour se faire embrigader. J’avais honteusement tort. "
En participant à ce drame glaçant, l’une comme l’autre tentent ainsi de comprendre comment s’opère la manipulation. Naomi parle de cette "quête d’absolu" propre à l’adolescence, période où les injustices touchent. "Ils utilisent cette brèche par la voie des réseaux sociaux", regrette-t-elle. Noémie estime que l’amour est également un point névralgique : "Quand on est ado, tout est exacerbé. On se jette dans les bras du premier qui sait nous réconforter".
Ce qui est certain, c’est qu’elles prônent d’un même cri la tolérance. "J’ai rencontré un imam et j’ai découvert une très belle religion, qui n’a rien à voir avec l’islamisme", insiste Noémie. "Je pense qu’il faut, pour éviter les amalgames, qu’on en parle plus à la télé. Qu’on pose les questions : qu’est-ce que l’islam ? qu’est-ce que dit cette confession ? La pointer simplement du doigt est dangereux et malsain. Ça ne fait pas avancer les choses." Un joli message de tolérance.
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"Le ciel attendra" : la bande-annonce du film
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