Riad Sattouf : "Jacky est une Cendrillon inversée"

Publié le 28 janvier 2014 à 12h27
Riad Sattouf : "Jacky est une Cendrillon inversée"

INTERVIEW - Auréolé d'un César en 2010 pour son premier film "Les Beaux Gosses", le prodige de la BD Riad Sattouf propose avec "Jacky au royaume des filles" une oeuvre culottée et jouissive sur le totalitarisme. En toute décontraction, l'intéressé a évoqué les grandes idées d'une comédie très... personnelle.

Après le succès des Beaux Gosses , qui lui a valu le César de la Meilleure Première Œuvre en 2010, le cinéaste et auteur de BD Riad Sattouf nous ouvre les portes du royaume de Bubunne. Un état où les hommes, dirigés à la baguette par les femmes, portent le voile et récurent la maisonnée. Parmi eux : Jacky, un jeune ingénu rêvant d’épouser la colonelle, fille de la dictatrice. Autour d’un verre de soda, Sattouf revient sur la genèse et les thématiques de ce projet barré. Morceaux choisis.

Cendrillon, point de départ
"Ce film est inspiré par Cendrillon. Quand on est un petit garçon, on se pose plein de questions sur ce conte. Pourquoi n’y a-t-il qu’un prince et plein de prétendantes à sa disposition ? Pourquoi est-ce lui qui choisit et pas les filles ? Pourquoi Cendrillon, maltraitée par sa famille, finit-elle par leur pardonner à la fin ? Pourquoi ne fuit-elle pas ? Jacky est une Cendrillon inversée. Il veut épouser la colonelle et aller au bal… J’ai respecté l’histoire originelle en changeant les rôles."

Dictature et communisme
"J’ai grandi en Syrie, près de Homs. Dans ma famille, les femmes étaient voilées et les hommes commandaient. Plus qu’une société religieuse, c’était une dictature communiste. Il y avait très peu de magasins, pas de restaurant et des portraits de Hafez el-Assad partout. Pour ces raisons, j’ai filmé en décors réels dans un ex pays du bloc communiste. On a tourné en Géorgie, terre natale de Staline. Je voulais fuir le beau avec notamment ces costumes identiques dans des camaïeux colorés qui renforcent l’aspect dictatorial."

Femmes vs. hommes
"En français, le masculin l’emporte toujours sur le féminin. Ça a l’air anodin mais pour quelle raison les choses se feraient dans ce sens ? Et si on inversait ? Dans mon film, un blasphème est devenu une blasphèmerie. Une forêt, une forêterie... L’avenir de l’homme est de devenir une femme. Faudrait que les mecs réalisent qu’ils ne sont pas obligés de se comporter en macho. Je ne vois pas de défi plus grand et absolu que l’égalité des sexes. En France, il y a du chemin à parcourir sur la question."

Non aux totalitarismes
"Je suis d’origine musulmane mais non croyant. On peut penser que mon film parle de l’Islam. Mais le patriarcat n’est pas spécifique au monde musulman. Je me moque ici du bigotisme, de la superstition, des totalitarismes… Mes personnages sont en circuit fermé, sans ouverture vers le monde. Le futur de l’homme n’est pas religieux, c’est sûr. Dans chaque système de croyance, il convient de voir qui sont les riches qui profitent de l’ignorance des masses. Et la plus grande banque au monde, c’est le Vatican."


La rédaction de TF1info

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