ÉVÉNEMENT - Deauville, qui ouvre son 44e Festival du cinéma américain ce vendredi, va accueillir de nombreuses stars (Morgan Freeman, Sarah Jessica Parker, Shailene Woodley...) et projeter des pépites du cinéma indépendant. La politique de Donald Trump et le scandale Harvey Weinstein devraient hanter cette nouvelle édition, aux teintes qui s'annoncent résolument sombres.
Comment vont les Etats-Unis ? C'est à cette simple question, plus complexe qu'il n'y paraît, que tente de répondre chaque année le Festival du cinéma américain de Deauville. Pendant dix jours, les cinéphiles peuvent y découvrir une gamme variée de films, allant de la superproduction riche en effets spéciaux à la production indépendante tournée avec trois euros et six centimes.
Cette 44e édition, du 31 août au 9 septembre, est la première post-scandale Weinstein, qui a secoué le tout Hollywood jusque dans la fabrication de ses longs métrages (le producteur déchu a soutenu bon nombre de films indépendants) et l'incarnation de ceux-ci - le remplacement en quelques semaines de Kevin Spacey par Christopher Plummer dans Tout l'argent du monde de Ridley Scott en est la manifestation la plus probante. On aura beau célébrer le cinéma, on n'y échappera pas.
Il faudra aussi, et surtout, surveiller ce que les plus jeunes cinéastes auront à dire sur le sujet. Leurs films nous diront à coup sûr quelque chose d'anxieux sur l'Amérique de Donald Trump. Un sursaut d'insolence qui serait la meilleure des nouvelles pour le cinéma US. Histoire de rappeler à ceux qui le résument hâtivement au nivellement par le bas la fonction première du cinéma indépendant américain.
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Elle Fanning, Mélanie Laurent, Sarah Jessica Parker attendues
Pour les férus d'Histoire, une première page se tourne ce vendredi avec la projection du film Le secret des Kennedy de John Curran, un drame qui mit fin aux chances de Ted Kennedy d'accéder à la Maison blanche et dans lequel on retrouvera l'acteur Jason Clarke, vu dans Everest. Ace Entertainment nous informe au passage que le film "ne sortira très certainement pas en salles" et sera visible uniquement en payTV ou VOD. Un cas loin d'être isolé dans la distribution des "films indie" : souvenons-nous de l'excellent 99 Homes avec Michael Shannon, Andrew Garfield et Laura Dern, Grand prix du festival en 2015 et sorti directement en e-cinéma sans passer par la salle de cinéma. De quoi poser une autre question qui agite les festivals du monde entier : celle de la consommation des films, à une heure où Netflix et le Festival de Cannes n'ont trouvé aucun terrain d'entente.
Samedi, on attend Elle Fanning, 20 ans et déjà 31 films, vue chez Sofia Coppola (Les proies) et Nicolas Winding Refn (The Neon Demon), qui vient présenter Galveston, premier film américain de notre "frenchie" Mélanie Laurent (elle-même présente), scénarisé par Nic Pizzolatto (True détective), dont la sortie en salles est prévue pour le 10 octobre en France.
Les jours suivants seront non moins animés, entre l'hommage à l'acteur Morgan Freeman ("Ses 134 films ont généré autant de recettes que les films d'Al Pacino et Robert De Niro réunis", fait valoir Bruno Barde, directeur du festival) et celui rendu à l'actrice Sarah Jessica Parker, l'héroïne de Sex and the city qui aura, elle aussi, son mot à dire sur les relations hommes/femmes à Hollywood : "C'est la première fois que l'Amérique a parlé à l'écran expressément et artistiquement d'une sexualité féminine", souligne Bruno Barde pour définir la série culte.
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Célébration de la face sombre des Etats-Unis
Autres stars attendues pour cette 44e édition : la Britannique Kate Beckinsale (une des accusatrices de Weinstein), les Américains John C. Reilly, Joaquin Phoenix ou encore Shailene Woodley, qui s'est aussi bien illustrée ces dernières années dans les superproductions (Divergente) que dans les petits films bizarres (White Bird de Gregg Araki). Mais plus que jamais, derrière les paillettes se cache une image beaucoup plus tourmentée, plus sombre de l'Amérique : "Les films en compétition sont assez tournés vers la réalité sociale, assure Bruno Barde. Il n'y a pas de film pamphlétaire contre Trump, mais il y a des inquiétudes, des jeunes, des communautés, qui montrent à quel point les Américains ne sont pas rassurés sur l'avenir".
On peut donc compter sur les films en compétition déjà accompagnés d'un beau buzz (Leave no trace de Debra Granik, Blindspotting de Carlos Lopez Estrada, The Tale de Jennifer Fox ou Thunder Road de Jim Cummings) pour s'emparer d'un réel brûlant. Le jury présidé par Sandrine Kiberlain devra trancher entre ces quatorze longs-métrages, dont huit premiers films. Vivement que ça commence.