Empêché de voyager par les mesures sanitaires, mon vol est-il remboursable ?

Publié le 25 février 2021 à 18h44
Le droit n'est pas forcément toujours en faveur du client.
Le droit n'est pas forcément toujours en faveur du client. - Source : Illustration Mitsuo Komoriya via Unsplash

SOUS CONDITIONS - De nombreux voyageurs ont vu leurs plans bouleversés par le Covid. Avec les restrictions imposées sur les déplacements, les remboursements sur les vols peuvent vite se compliquer.

Débutées le 6 février, les vacances d'hiver vont s'achever le 8 mars. Des congés perturbés par l'épidémie de Covid : outre le couvre-feu en vigueur sur l'ensemble du territoire, de nouvelles mesures ont été progressivement adoptées. Reconfinements locaux, mais aussi restrictions de déplacements pour celles et ceux qui voudraient se rendre dans certains départements et territoires d'Outre-mer. Sans motif impérieux valable, il est notamment impossible de se rendre en Guadeloupe ou en Martinique. 

Quand un vol est annulé par une compagnie aérienne, celle-ci est tenue de rembourser le client faute d'avoir pu assurer le service qu'elle s'engageait à assurer. Mais dans la période actuelle, si le vol est maintenu et que le voyageur ne peut pas prendre l'avion en raison des restrictions gouvernementales, que prévoit la législation ? LCI fait le point.

Le droit du côté des professionnels du tourisme

En cas d'impossibilité de voyager en raison d'une mesure liée à l'épidémie, comme les récents reconfinements locaux, que peut-on espérer du côté des clients ? Contacté par LCI, l'entourage du secrétaire d'État chargé du Tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne, indique que les conditions de report ou de remboursement "dépendent pour beaucoup des compagnies ou des voyagistes". En pratique, la plupart des "gros" acteurs du secteur ont mise en place "des facilités", à l'instar de celle instaurées par la SNCF. Air France, notamment, propose des billets "100% modifiables et remboursables" jusqu'au jour du départ. 

Le secrétaire d'État, nous précise-t-on, "n'a cessé d'échanger avec les représentants professionnels pour qu'il y ait des facilités de report, d'annulation ou encore de changement. Beaucoup le font, mais ce n'est pas forcément imposé par la loi." 

Ce que confirme Khalid El Wardi, représentant de la Médiation du Tourisme et du Voyage (MTV), un organisme reconnu par l'État et qui œuvre pour "favoriser le règlement amiable des litiges non réglés entre les consommateurs et les fournisseurs de services de voyage ou de loisirs". Il précise que "juridiquement parlant, la question qui se pose est de savoir si les mesures sanitaires qui entravent la circulation constituent un cas de force majeure". En l'occurrence non, puisque du côté du consommateur, "l'obligation contractuelle n'est pas de voyager, mais de payer son billet"

Les opérateurs (compagnies, agences de voyage...) sont donc théoriquement en droit de s'opposer à un remboursement des voyageurs si le vol a bien lieu et que ni les billets achetés par le client ni les conditions générales de vente ne prévoient pas de possibilité de compensation. Cela ne signifie pas pour autant que les consommateurs se retrouvent systématiquement lésés : outre Air France, d'autres acteurs du secteur proposent des modalités d'annulation ou de report, ainsi que des avoirs valables durant une durée donnée.

"Durant le premier confinement, les professionnels se sont rendus compte que ces politiques leur permettait de fidéliser la clientèle et de potentiellement repartir de plus belle quand la situation le permettrait", glisse-t-on du côté du ministère. Dans la période actuelle, "plus encore que d'ordinaire, il est essentiel de s'assurer des conditions d'annulation ou de report".

On se souvient qu'au printemps dernier, l'ordonnance du 25 mars avait modifié les obligations des professionnels. Elle permettait de proposer aux clients un remboursement via une proposition de prestation identique ou équivalente, mais aussi la possibilité de fournir un avoir valable sur une période de dix-huit mois. Les vols secs, achetés directement auprès des compagnies, n'étaient toutefois pas concernés. Cette ordonnance était en vigueur entre le 1er mars et le 15 septembre 2020, et ne s'applique donc plus aujourd'hui. Mais cela ne change pas beaucoup la donne en ce qui concerne les voyages en avion, puisque le Code des transports, que venait compléter ce texte, reste toujours d'actualité.

En pratique, il est possible de négocier

Concrètement, que peut-on faire si notre voyage est rendu impossible par un reconfinement ou par des mesures restrictives telles que le besoin de présenter un motif impérieux ? Khalid El Wardi conseille en premier lieu de contacter la compagnie aérienne, ainsi que notre l'agence de voyage (qu'elle soit 100% en ligne comme Kayak ou Opodo, ou plus traditionnelle) si on a fait appel à ses services. "Le mieux est de le faire à l'écrit, afin de conserver une trace", souligne-t-il, d'autant que cela permet d'éviter des cas de figure où plusieurs acteurs se renvoient la balle. 

"Dès qu'on parle de force majeure, on sait que l'une ou l'autre partie va se retrouver lésée", assure le secrétaire général de la MTV, ce qui n'empêche pas de chercher une solution à l'amiable. "C'est la différence entre la justice et les médiateurs, nous avons la possibilité de proposer des solutions basées sur l'équité." Décalage du voyage, avoir pour l'année qui suit... Diverses options sont envisageables, et le spécialiste affirme que les compagnies sont généralement ouvertes à la discussion : "D'expérience, les complications sont surtout d'ordre logistique et à mettre sur le compte d'une mauvaise volonté des opérateurs. Rien que de notre côté, nous avons vu les demandes de médiations bondir de 100%. Sans parler du volume des réclamations pour les compagnies. Il faut garder à l'esprit qu'elles n'ont pas intérêt à ne pas traiter les réclamations. Les voyageurs se font rares, mieux vaut les chouchouter !"

Lorsque la compagnie aérienne n'est pas tenue d'effectuer un remboursement du billet, le plus probable est sans doute de chercher à obtenir un avoir, ou de convenir d'une date ultérieure à laquelle décaler le voyage. La possibilité de faire appel à un organisme de médiation est aussi à envisager, mais uniquement dans un second temps, lorsque les courriers n'ont pas reçu de réponse ou que l'issue s'est révélée négative pour le consommateur. Du côté de la MTV, on indique que 90% des dossiers traités aboutissent en général à un compromis entre les différentes parties. 

En résumé, on peut donc noter que l'impossibilité de voyager à cause d'une absence de motif impérieux ou d'un reconfinement ne peut pas ouvrir automatiquement à un remboursement, dans le cas de figure précis où le vol reste maintenu. Si la législation en la matière n'est pas à l'avantage des clients, il convient néanmoins de garder à l'esprit que des compromis sont possibles avec les professionnels du tourisme, compagnies et agences de voyages, afin de ne pas être totalement lésé. Des avoirs sont notamment négociables, afin de reporter à plus tard des trajets que l'on devrait annuler faute de disposer de la liberté de se déplacer librement. Que ce soit en période normale ou a fortiori dans le contexte du Covid, les voyageurs sont en tout cas invités à consulter avec une extrême attention les conditions générales de ventes fixées par les compagnies aériennes, qui fixent notamment les modalités d'annulation ou de report des vols.  

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Thomas DESZPOT

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