À l’image de Gérardmer, l’avenir des festivals de cinéma passe-t-il par le numérique ?

Publié le 27 janvier 2021 à 10h18
"Possessor" de Brandon Cronenberg
"Possessor" de Brandon Cronenberg - Source : The Jokers

ZOOM – La 28e édition du Festival du film fantastique débute ce mercredi. Covid oblige, elle sera entièrement virtuelle, et présentera de nombreux longs-métrages dont la sortie est suspendue à la réouverture des salles. Une option choisie par d'autres festivals en ce début d’année, mais qui ne fait pas l’unanimité.

Des films en avant-première, un jury de professionnels et des cinéphiles avides de frissons... Sur le papier, Gérardmer 2021 réunit tous les ingrédients des éditions précédentes. Mais avec une différence de taille. En raison de la pandémie de coronavirus, ses organisateurs ont fait le choix, en accord avec la cité vosgienne, d’une version 100% numérique. "Faire Gérardmer en ligne, ça permettait à ce festival de rester vivant. Et être vivant, c’est quand mieux qu’être mort !", glisse avec humour Bruno Barde, son directeur. 

Présidé par le cinéaste français Bruno Bonnello, le jury, composé de l’acteur Gaspard Ulliel, de l'écrivain Maxime Chattam ou encore de l’humoriste Nora Hamzawi, décernera son Grand prix parmi les douze films en compétition. Sans la crise sanitaire, certains seraient déjà sortis en salles, à l’image des pépites françaises La Nuée de Just Philippot et Teddy de Ludovic et Zoran Boukherma, ou encore du très attendu Possessor de Brandon Cronenberg. 

Dans une salle, vous riez ou vous pleurez à côté de quelqu’un que vous ne connaissez pas. Mais je suis pour les plateformes dans le sens où elles permettent de voir des films qu’on ne verrait pas ou plus autrement
Bruno Barde, directeur du Festival de Gérardmer

Au total, près d’une trentaine de long-métrages seront disponibles à partir de midi ce mercredi et jusqu’à dimanche via une plateforme sécurisée, uniquement accessible depuis la France. Signe de l’attrait des amateurs pour cette expérience inédite, les 400 pass à 50 euros permettant d’accéder à l’ensemble de la programmation ont été vendus en moins d’une heure. Pour les retardataires, chaque film sera accessible au tarif de cinq euros, à l’horaire de leur choix. Quatre classiques du genre seront également diffusés gratuitement, tout comme une série de rencontres avec des jurés et cinéastes en compétition, diffusés via les réseaux sociaux. 

"Un festival, ce sont des gens qui se croisent, qui se rencontrent, qui se parlent, qui s’engueulent", reconnaît Bruno Barde. "Mais à situation exceptionnelle, festival exceptionnel. Ce qui est certain, c’est que je refuse d’opposer la salle de cinéma au numérique. Dans une salle, vous riez ou vous pleurez à côté de quelqu’un que vous ne connaissez pas. Mais je suis pour les plateformes dans le sens où elles permettent de voir des films qu’on ne verrait pas ou plus autrement."

La Berlinale s'y met aussi

Gérardmer n’est pas la seule manifestation cinématographique à avoir cédé à la tentation du tout-numérique en ce début d’année. Le Festival Premiers Plans d’Angers, consacré aux premiers films, se déroule en ligne depuis le 25 et jusqu’au 31 janvier. Le Festival international du court-métrage de Clermont-Ferrand en fera de même, du 31 janvier au 8 mars. De son côté le Festival du film de comédie de l’Alpe d’Huez, qui devait se tenir du 19 au 24 janvier, est pour le moment reporté à la fin mars.  

Outre-Rhin, c’est un choix mixte qui a été effectué par les équipes de la Berlinale, qui se déroule traditionnellement en février. Une édition en ligne se déroulera du 1e au 5 mars, mais elle sera réservée aux professionnels, avec un marché du film et une compétition dont les organisateurs espèrent pouvoir présenter les lauréats lors de projections publiques en juin prochain.

Cannes en ligne, c'est non !

Et puis il y a le Festival de Cannes. L’an dernier, un marché du film en ligne s’était tenu en juin, loin des caméras et des flashes des photographes. Face à l’impossibilité d’organiser une édition en physique, après l'avoir espéré pendant plusieurs mois, son délégué général Thierry Frémaux avait noué une série de partenariats – avec la Mostra et Deauville notamment – afin d’y présenter les films de la sélection 2020.

Si la tenue de l’édition 2021 est d’ores et déjà exclue en mai, l’hypothèse du mois de juillet serait à l’étude, d’après plusieurs sources professionnelles. "Rien n’est acté, mais ce n’est pas une rumeur", a confié Thierry Frémaux en début de semaine à nos confrères de Nice Matin. Le patron de Cannes semble en tout cas fermé à l’option numérique, lui qui avait essuyé de vives critiques de la part des exploitants en intégrant deux films Netflix à la compétition en 2017. 

"C'est un modèle qui ne fonctionnerait pas pour Cannes", lâchait-il en avril dernier dans Variety. "Découvrir des films de Wes Anderson et de Paul Verhoeven sur un écran d'ordinateur ? Découvrir Top Gun 2 ou Soul ailleurs que dans une salle de cinéma ? Ces films ont été repoussés pour être montrés sur un grand écran. Pourquoi vouloir les montrer avant sur une machine numérique ?".


Jérôme VERMELIN

Tout
TF1 Info