Alec Baldwin tire et tue un membre de l'équipe de tournage : comment est encadré l'usage des armes au cinéma ?

par Maëlane LOAËC
Publié le 22 octobre 2021 à 10h44, mis à jour le 22 octobre 2021 à 14h52

Source : TF1 Info

INTERVIEW - Sur un tournage, l'acteur américain Alec Baldwin a tué accidentellement par balle la directrice de la photographie du film. La réglementation sur les plateaux n'autorise pourtant que les cartouches à blanc, explique Frédéric Cauvy, armurier de cinéma.

L'arme aurait dû être chargée à blanc. Sur le plateau de tournage du western Rust, au Nouveau-Mexique, l’acteur Alec Baldwin a touché par balle deux membres de la production du film, dans lequel il campe l'un des protagonistes. Parmi eux la directrice de la photographie Halyna Hutchins, 42 ans, qui a succombé à ses blessures tandis que le réalisateur du western Joel Souza, 48 ans, a été admis en soins intensifs. Hors de danger, il a quitté l'hôpital ce vendredi.

Aucune poursuite n'a été engagée contre l'acteur, entendu par les forces de l'ordre, la production ayant estimé que le drame était un "accident". L'enquête se poursuit pour tenter de faire lumière sur ce tir mortel, survenu en dépit des normes de sécurité très strictes qui s'appliquent aux plateaux de tournage, comme le détaille Frédéric Cauvy, armurier de cinéma.  

Comment un tel tir a-t-il pu avoir lieu sur un plateau de cinéma ? 

Pour le moment, on ne sait pas grand-chose de cette histoire. Il y a pu y avoir une défaillance de l’arme, car aux États-Unis comme en France, il est interdit d’utiliser de vraie cartouche sur un tournage. On a recours uniquement à des munitions à blanc, qui ne disposent pas de projectile, de balle. C’est uniquement l’inflammation de la poudre qui produit un effet de détonation et des flammes au bout du canon pour simuler un vrai coup de feu. Les armes utilisées sont des vraies, mais elles sont modifiées pour tirer des cartouches de cinéma uniquement. Il est donc impossible de tirer de vraies cartouches avec, on ne peut plus les remettre en état de tir. On ne sait donc pas pour l’heure ce qu’il s’est passé sur le tournage d’Alec Baldwin, il faut attendre les résultats de l’enquête.

toute vraie munition est bannie des plateaux de cinéma
Frédéric Cauvy, armurier de cinéma

Ces règles sont-elles valables dans le monde entier ?

Oui, toute vraie munition est bannie des plateaux de cinéma. Aux États-Unis, même si la détention d’armes est autorisée pour les personnes majeures dans certains États, les tournages sont très surveillés. Les professionnels du cinéma réalisent beaucoup plus de films de guerre qu’en France, ils sont donc plus exposés à divers accidents et très vigilants sur les normes de sécurité en plateau, que ce soit sur le plan des armes à feu, mais aussi des cascades ou des effets spéciaux, comme des explosions par exemple. 

VIDÉO LCI PLAY - Alec Baldwin, auteur d'un tir mortel en plein tournageSource : Sujet TF1 Info

Il y a-t-il d’autres consignes encadrant l’utilisation d’armes en plateau ?  

Il y a des normes de sécurité strictes établies, car même si on n’utilise pas de vraie cartouche, il y a des dangers auditifs et visuels pour les équipes. À chaque séquence de tirs, les armuriers stipulent bien aux comédiens de faire attention à leurs yeux, qui peuvent piquer, et à leurs oreilles, si le coup de feu est tiré proche d’eux. En plateau, on intervient donc pour protéger les équipes, faire respecter la sécurité et les distances de tirs, puisque cela reste une arme à feu. 

Nous sommes les seuls à avoir l’habilitation pour utiliser les armes en plateau et les comédiens les manipulent sous notre supervision. Nous les entraînons d'ailleurs toujours en amont du tournage à tenir une arme. On vérifie aussi que l’arme fonctionne dans de parfaites conditions, et on a un panel de munitions adaptées à l’effet souhaité. Pour simuler un suicide par exemple, en pointant une arme sur la tête, on utilisera seulement une cartouche totalement inoffensive sans flammes ni détonation.  

Un drame similaire à celui du tournage de Rust a-t-il déjà eu lieu ? 

En 1993, l’acteur Brandon Lee était décédé sur un plateau aux États-Unis (après avoir été blessé par balle, sur le tournage du film The Crown, ndlr). Une ogive était restée bloquée à l’intérieur du canon et a été projetée lors du tir de la cartouche à blanc. Cela n’aurait pas pu arriver en France, car tous nos canons disposent d’un rétreint qui empêche les projectiles de partir.


Maëlane LOAËC

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