Mon journal de Cannes, épisode 11 : "France" avec Léa Seydoux, ou la Palme d'or du ridicule

Publié le 16 juillet 2021 à 12h43, mis à jour le 16 juillet 2021 à 12h51
Mon journal de Cannes, épisode 11 : "France" avec Léa Seydoux, ou la Palme d'or du ridicule

BILLET D’HUMEUR – Du 6 au 17 juillet, je vous raconte, depuis la Croisette, la 74e édition du Festival de Cannes de l'intérieur, entre coups de cœur et coups de griffes. Aujourd'hui, un vrai bon coup de gueule pour "France" de Bruno Dumont, une caricature bête et méchante du métier de journaliste télé.

C’est bon, j’ai vu le pire film de ma quinzaine. Dans France de Bruno Dumont, Léa Seydoux interprète France de Meurs, une journaliste télé en proie à une grave crise existentielle alors qu’elle est au sommet de sa carrière. La preuve : c’est à elle qu’Emmanuel Macron donne la parole en premier lors d’une conférence de presse à l’Élysée, le seul moment réussi en plus de 2 heures de calvaire. Le fait qu’elle soit mariée à un écrivain qui fait tout le temps la gueule n’aide pas, même lorsqu’il est joué par un Benjamin Biolay qui erre comme une âme en peine dans leur immense appartement parisien avec des fauteuils en velours et des vitraux partout. Et un sale gosse qui joue à la Game Boy. 

Entre deux dîners mondains en robe Dior, France s’envole pour les pays en guerre, où elle interroge tous les opprimés de ce monde dans des reportages à sa gloire, qu’elle lance ensuite dans sa propre émission sur une chaîne info, portant elle-même la contradiction aux experts invités. Que ce type de journaliste n’existe pas, à ma connaissance, ne semble pas déranger Bruno Dumont, du moment qu’il peut dénoncer le cynisme de cette vilaine profession qui ne pense qu’à l’audimat. Le problème, c’est que tout sonne faux et outrancier jusque dans les moindres détails. Et qu’à ce niveau de caricature bête et méchante, c’est presque une insulte à la profession.

Personnellement, je trouve qu’il y a toujours un truc qui cloche dans les films qui traitent du journalisme, même les meilleurs du genre. La manière de poser les questions, la façon de regarder la caméra ou de tenir une conférence de rédaction… Je peux me tromper et je compte sur vous pour me l’écrire ! Reste que durant la projection de France, longue, très longue, interminable même, je me suis demandé si ce n’était pas le cas, en réalité, avec tous les métiers au cinéma ?

Les nonnes italiennes du XVIIe siècle étaient-elles aussi charmantes que Virginie Efira et Daphné Patakia dans Benedetta ? Les profs de français ont-ils reconnu leurs classes devant Entre les murs ? Les chauffeurs de bus se sont-ils identifiés à Adam Driver dans Paterson ? Y a-t-il jamais eu un psychopathe au volant d’un taxi à New York ? Bon d’accord, j’ai un doute pour les nonnes. Mais je me dis que dans bien des cas, cette capacité à "faire croire", quitte à prendre des libertés avec la réalité, distingue les bons films des mauvais.


Jérôme VERMELIN

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