Anamaria Vartolomei, révélation du film "L’Événement" : "J’ignorais la violence et la cruauté d’un avortement clandestin"

Publié le 24 novembre 2021 à 18h38

Source : TF1 Info

RENCONTRE – Sa présence magnétique est au cœur de "L’Événement", le film d’Audrey Diwan, en salle ce mercredi. Anamaria Vartolomei, 22 ans, a raconté à LCI les coulisses de cette performance qui devrait sans doute lui offrir sa première nomination aux César.

Pour incarner l’héroïne de L’Événement, omniprésente à l’écran, Audrey Diwan cherchait une jeune comédienne habituée à la caméra. Son choix s’est porté sur Anamaria Vartolomei, 22 ans et presque la moitié sur les plateaux. En 2011, elle tenait en effet le premier rôle de My Little Princess, le film d’Eva Ionesco dans lequel elle donnait la réplique à l’icône Isabelle Huppert, ni plus ni moins.

"En primaire, une de mes copines s’était inscrite à une activité théâtre-poésie-mise en scène", raconte la jeune femme, depuis l’hôtel parisien où elle assure la promo de l’un des chocs cinématographiques de l’année. "J’ai voulu faire pareil et j’ai tellement kiffé que j’ai demandé à mes parents de m’inscrire à un cours en dehors, avec du mime, du chant et de la danse, mais c’était plus pour occuper les mercredis." La suite est un concours de circonstances comme on les adore. 

"Mon père travaille dans le bâtiment et parmi ses clients, il avait une comédienne qui lui a parlé de moi. Elle l’a dirigé vers un site de casting où nous sommes tombés sur l’annonce du film d’Eva Ionesco. Physiquement je correspondais à ce qu’elle recherchait et en plus elle avait des origines roumaines comme moi. Après le tournage, j’ai su que j’avais envie de continuer."

Depuis, on a pu voir Anamaria Vartolomei dans Jacky et le royaume des filles de Riad Sattouf, L’Idéal de Frédéric Beigbeder, L’Échange des princesses de Marc Dugain et plus récemment La Bonne Épouse de Martin Provost. Sa performance dans L’Événement, où elle incarne une jeune étudiante qui décide d’avoir recours à un avortement clandestin, dans la France cadenassée des années 1960, la fait entrer dans une nouvelle dimension.

"Lors de mon premier essai, Audrey et la directrice de casting Elodie Demay, m’ont donné trois scènes clés du film", se rappelle-t-elle. "Une scène dans laquelle mon personnage se regarde dans le miroir et voit son corps changer, une scène de drague et une scène où le médecin lui annonce qu’elle est enceinte. Ça résumait les trois états émotionnels par lesquels passe mon personnage. J’ai trouvé ça très exigeant et j’étais très curieuse de travailler avec Audrey."

Avorter en y risquant sa vie ou y renoncer et sacrifier son avenir, c’est le choix du corps ou de l’esprit. Et c’est un choix que je n’aurais pas aimé avoir à faire.
Anamaria Vartolomei

Ce n’est qu’après avoir lu le scénario que la jeune comédienne a lu le roman autobiographique d’Annie Ernaux, paru en 2000. "J’ai été choquée par mon ignorance vis-à-vis de ce que représente le processus d’un avortement clandestin", admet-elle. "J’étais loin d’imaginer la violence et la cruauté de la réalité et j’ai été happée, je pense, par une certaine colère. Une colère face à ce choix, à ce dilemme par lequel doit passer mon personnage. Avorter en y risquant sa vie ou y renoncer et sacrifier son avenir, c’est le choix du corps ou de l’esprit. Et c’est un choix que je n’aurais pas aimé avoir à faire."

Hyper réaliste, sans jamais verser dans l’excès, L’Événement renferme plusieurs scènes aussi éprouvantes pour le spectateur que pour son interprète. "Sur le plateau, j’étais en mode commando", souligne Anamaria. "Avec Audrey, on s’était dit qu’Anne était un soldat qui part la guerre. Elle a des alliés qu’elle perd en chemin, elle se retrouve seule, elle tombe, elle se relève. Mais elle ne perd jamais de vue son objectif. Elle ne baisse jamais le regard, la tête levée, droit devant. Et puis j’étais en confiance avec Audrey. Pour moi la question pour un acteur n’est pas de savoir ce que tu es capable de faire, mais avec qui tu le fais."

Lion d’Or à la Mostra de Venise, L’Événement sera sans doute l’un des films les plus en vue lors de la prochaine cérémonie des César, au même titre que Titane de Julia Ducournau qui lui a été préféré de peu pour représenter la France aux Oscars. Depuis notre entretien, Anamaria a été retenue dans la première liste des candidates au César du meilleur espoir féminin. À moins que les votants la propulsent dans la catégorie meilleure actrice ?

"Chaque prix arrive au moment où il est supposé arriver", assure-t-elle, des étoiles dans les yeux lorsqu’on lui demande si elle redoute un sacre précoce que d'autres avant elles n'ont pas toujours su digérer. "Pour moi ce n’est jamais ni trop tôt, ni trop tard. Mais ce que j’espère, c’est que ce rôle m’ouvre une porte et me donne la chance de continuer à explorer. J’ai encore tellement de choses à apprendre et à découvrir."


Jérôme VERMELIN

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