En Dordogne, un "Brexit bureau" pour venir au secours des résidents britanniques

par Cédric INGRAND
Publié le 13 décembre 2020 à 7h17, mis à jour le 13 décembre 2020 à 8h49

Source : TF1 Info

FORMALITÉ - Inquiets de leur avenir en France à quelques semaines du Brexit, les Britanniques qui ont élu domicile en Dordogne ont désormais accès à un réseau d'entraide et à un bureau dédié en préfecture, pour avoir en poche leur permis de séjour avant le 31 décembre.

Pour qui a dû faire l'expérience du service des étrangers d'une préfecture en France, la scène a de quoi surprendre. Et pourtant, c'est bien vrai : à la sortie de la préfecture de Périgueux, les Britanniques tout sourire n'ont pas de mots pour louer la diligence de la fonction publique locale. "Remarkably smooth" (remarquablement fluide), "Very straighforward, and so speedy" (très simple, et si rapide) "Very easy in the end, a super job" ("très facile au final, super boulot"). Eux sont résidents en Dordogne, majoritairement propriétaires, et souvent depuis longtemps, et ce qu'ils sont venus chercher, c'est la carte de séjour qui leur permettra de demeurer en France, une fois le Brexit passé.

Le secret d'une procédure apparemment sans douleur ? L'ouverture en préfecture d'un "Brexit Bureau" qui leur est dédié, pour le flux attendu de demandes de titres de séjour "non UE". Cinq contractuels recrutés, déjà 4.000 dossiers en stock, contre 2.200 en année normale, dans un bureau ouvert en octobre et voué à tourner jusqu'en juin, explique le préfet Frédéric Périssat. Ici, le trafic est dense, mais fluide. Quelque 80 rendez-vous par jour, la plupart réglés en 10 à 15 minutes : vérification d'identité, remise de photo, signature, prise d'empreintes, juste le temps de quelques blagues sur leur comté d'origine, la vie en France, et... "Is that it ?" "C'est tout, merci !" Une initiative qui aura fait beaucoup pour la réputation de l'administration française aux yeux des sujets de Sa Majesté.

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"Dans l'ensemble, ils arrivent quand même stressés, car ils ne savent pas comment ça va se passer, ce qu'on va leur demander", raconte Emilie Rat, une préposée à leur accueil. "Certains ont sorti des espèces, demandant combien ils devaient...", mais la procédure est bien gratuite. "C'est surtout l'attente de la démarche qui leur a pesé. Car il se raconte un peu de tout sur les forums britanniques." 

Sentant l'urgence, et pour venir en aide à ses expatriés, le Foreign Office a cette année lancé un appel d'offres pour trouver une organisation locale à même d'informer, de rassurer, et d'orienter les demandes. Un marché décroché par le Franco-British Network de Périgueux, une association d'entraide pour les Britanniques installés dans ce que beaucoup appellent le "Dordogneshire". Pour Roger Haig, son fondateur établi ici depuis 1992, la démarche était indispensable, vu le nombre de personnes concernées. "On nous dit que nous sommes environ 8.000, mais je pense qu'on est en fait plus de 10.000", explique-t-il à LCI, tout sourire… "Moi cela fait 28 ans que je suis ici, et personne ne m'a jamais recensé."

Quand le Brexit accélère les déménagements vers la France

Au téléphone (05 19 88 01 09), des agents répondent à 200 à 300 appels par mois. "Le plus souvent", explique Roger Haig, "on les rassure, on leur explique les procédures. Dans certains cas, pour des personnes isolées ou qui ne maîtrisent pas l'outil informatique, on prend en charge l'intégralité de la démarche pour eux." Les Britanniques établis en France depuis moins de 5 ans ont le droit à une carte de séjour valable 5 ans, ceux installés depuis plus longtemps peuvent espérer le même sésame, mais valide pour 10 ans. Bonne nouvelle : la perspective du Brexit n'a pas poussé ces expatriés à regagner la Grande-Bretagne. "C'est même plutôt l'effet inverse", corrige Roger Haig, "au vu des difficultés prévisibles du Brexit, on rencontre des compatriotes qui ont plutôt accéléré leurs projets de déménagement en Dordogne, pour s'installer avant le 31 décembre. Pour ceux qui arriveront après, ce sera beaucoup plus compliqué."

Une population qui du coup évolue : "Il y a dix ou quinze ans, c'était principalement des retraités qui venaient en Dordogne, aujourd'hui on a beaucoup de familles qui s'installent et qui viennent travailler ici", constate Roger Haig. Aujourd'hui, le Franco-British Network connait un succès tel que 50% des appels viennent hors de la Dordogne. Du coup, Londres les a sollicités pour faire le même job, mais à destination d'autres régions, comme Provence-Côte d'Azur, et Auvergne-Rhône-Alpes.


Cédric INGRAND

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