FINALEMENT, C'EST PAS SI MAL - Le ministre de l'Economie a été contraint de raboter une nouvelle fois ses prévisions de croissance pour 2016. Actant une croissance de "1,1 à 1,2%" mardi matin, il estime que cette faible dynamique peut suffire à relancer l'emploi. En se rapprochant ainsi du candidat Hamon de 2017, il s'éloigne du candidat Hollande de 2012.
Michel Sapin en chantre de la décroissance ? On n'y est pas encore. Mais le ministre de l'Economie a donné, mardi matin, de sérieux gages au candidat du PS, Benoît Hamon, qui a passé la campagne de la primaire à expliquer qu'il ne "croyait plus dans le mythe de la croissance", à rebours de nombreux responsables socialistes et de la culture dominante jusqu'ici au PS.
Sur France Inter, Michel Sapin, contraint de raboter une fois de plus ses prévisions de croissance à 1,1% pour 2016 (il prévoyait initialement 1,5, puis 1,4 %), semble, au terme de ce quinquennat, s'être fait une raison de cette croissance "molle". Il s'en féliciterait presque. Voici ce qu'il a expliqué au journaliste Patrick Cohen :
La quête d'une croissance toujours plus forte n'est pas forcément la bonne méthode, y compris pour créer des emplois [...] Il faut réfléchir à cela... La quête des 2,5 à 3% de croissance n'a plus de sens
Michel Sapin
A rebours de 2012
Le journaliste lui fait observer qu'en disant cela, il se rapproche de la position de Benoît Hamon. "Exactement, répond le patron de Bercy. Ça ne doit pas être par hasard si je vous le dis."
Ce rapprochement avec le vainqueur de la primaire socialiste est une petite révolution. Michel Sapin considère aujourd'hui, comme d'ex-député frondeur, qu'un objectif de plus de 2,5% de croissance n'est "ni forcément créateur d'emplois ni bon pour la planète". Ce très proche du président de la République ne peut ignorer que le candidat de 2012 avait fait de la croissance une condition essentielle de son programme. François Hollande tablait à l'époque sur une reprise progressive qui devait mener précisément à 2,5% de croissance en 2015, 2016 et 2017. Le candidat socialiste, qui estimait alors ses hypothèses "prudentes et réalistes", redoutait même que cette croissance se fige... à 2%, ce qui nécessiterait un "ajustement budgétaire".
Il était alors loin d'imaginer que son gouvernement se réjouirait d'une croissance à 1,1%... En attendant, ce sérieux changement de paradigme a un double avantage : il permet au gouvernement de vanter son bilan malgré des chiffres encore trop timides, et à Benoît Hamon d'assumer un peu de ce bilan sans contredire ses propositions de campagne.