Réchauffement climatique, biodiversité : que proposent les principales listes aux élections européennes ?

Publié le 17 mai 2019 à 22h42, mis à jour le 15 janvier 2021 à 15h07

Source : 24H PUJADAS, L'info en questions

PROJETS - L'environnement s'affiche comme une priorité pour une partie des candidats aux élections européennes. LCI fait le tour des principales mesures défendues face à l'urgence climatique.

Un scrutin placé sous le sceau de l'urgence climatique. Les élections européennes du 26 mai interviennent dans un contexte particulièrement marqué par les nouveaux constats internationaux liés au dérèglement climatique et à la chute de la biodiversité sur la planète. Logiquement, le thème environnemental est de plus en plus prégnant dans les programmes des candidats. Placé en tête des priorités par plusieurs listes françaises en présence, il reste toutefois plus discret chez d'autres. 

Que proposent donc les candidats en matière d'écologie à l'échelle de l'Union européenne ? Voici quelques éléments de réponse, pour ce qui est des six listes arrivant en tête des intentions de vote. 

Traités et critères fondamentaux

Réviser les principes fondamentaux régissant l'Union européenne pour les adapter à l'urgence environnementale : c'est le choix exprimé par plusieurs listes dans le cadre du scrutin. A commencer par celle de Yannick Jadot (EELV), qui propose d'adopter "un nouveau traité environnemental européen" créant une obligation générale de "protéger le climat" et de "fixer des critères de convergence écologiques" entre les Etats-membres, comme cela a été fait sur le plan budgétaire depuis le traité de Maastricht. A l'échelle internationale, les écologistes souhaitent également que l'Union européenne défende un "traité de non-prolifération des énergies fossiles", comme cela a été fait dans le domaine du nucléaire militaire. 

La liste LaREM de Nathalie Loiseau propose de son côté d'instaurer un "Pacte de soutenabilité" qui viendrait compléter le Pacte de stabilité, afin de ne laisser aux générations futures "ni dette écologique, ni dette financière". 

La France Insoumise, conduite par Manon Aubry, veut introduire "des critères européens" comprenant des "indicateurs de progrès humain", "instaurer la règle verte au niveau européen" (c'est-à-dire l'interdiction de prélever davantage à l'écosystème que ce qu'il est capable de supporter). Enfin, la liste PS-Place Publique de Raphaël Gluscksmann propose un pilotage économique de l'UE "selon de nouveaux critères tenant compte de la transition écologique et du bien-être humain", qui s'accompagnerait de la "suppression des subventions néfastes à l'environnement". 

Budget

Pour financer une transition écologique à l'échelle européenne, plusieurs propositions se recoupent dans les six premières listes en compétitions. S'agissant des moyens financiers, LaREM propose d'investir 1000 milliards d'euros d'ici 2024 à travers la création d'une banque du climat et "l'orientation de l'épargne des Européens vers la croissance verte". Elle veut consacrer "40% des dépenses européennes à la transition écologique" (contre environ le quart actuellement), rendre "100% du budget compatible avec l'Accord de Paris" sur le climat. 

La liste PS-PP évalue à 500 milliards d'euros sur cinq ans les besoins dédiés au climat et à la biodiversité, financés par un impôt européen sur les sociétés. Elle souhaite également "sortir les dépenses liées à la transition écologique des critères des 3%" de déficit budgétaire, créer une Banque européenne pour le climat et la biodiversité finançant la transition écologique grâce à des prêts à taux privilégiés, soit au total 400 milliards d'euros de prêts et de subventions par an, dont 50 à 60 milliards pour la France. EELV défend un budget dédié au climat équivalent à la moitié des dépenses européennes, et 100 milliards d'euros par an pour la transition écologique financés via la Banque centrale européenne (BCE) et la Banque européenne d'investissement.

La liste LR de François-Xavier Bellamy propose quant à elle un "plan européen pour le climat et la biodiversité" qui favoriserait notamment les prêts à taux zéro de la Banque européenne d'investissement au profit des Etats-membres, des collectivités, des entreprises et des particuliers. 

Taxes nouvelles

Plusieurs listes proposent en outre de lever des taxes pour financer la transition. LaREM suggère de taxer le carbone des produits importés en Europe, selon le principe du pollueur-payeur, ainsi que le transport aérien. Idem pour EELV, qui souhaite "instaurer un taxe carbone aux frontières européennes pour un protectionnisme vert", orienter la taxe Gafa contre les gros pollueurs, mettre en place un taxe carbone sur l'aviation et les paquebots à l'intérieur de l'UE ainsi qu'une taxe renforcée sur les transactions financières. 

La liste LFI veut elle aussi instaurer une taxe carbone aux frontières, mettre en oeuvre à l'échelle européenne "une fiscalité carbone et kérosène". Le Rassemblement national, conduit par Jordan Bardella, préconise aussi de "surtaxer les importations mondialisées antiécologiques". La liste PS-PP propose enfin, elle aussi, de "taxer le kérozène intraeuropéen", d'instaurer une taxe carbone aux frontières ainsi qu'une taxe sur les transactions financières au taux plus élevé pour les investissements dans les énergies fossiles ou les pratiques participant à la déforestation. 

La liste LR envisage, elle, "une barrière écologique" au moyen de droits de douane "anti-pollution" sur les produits importés qui ne respecteraient pas "nos normes environnementales et sociales", afin "d'augmenter le budget européen dédié à la recherche et à l'innovation". 

Agriculture et alimentation

Sur le plan agricole, les six premières listes souhaitent réformer l'actuelle Politique agricole commune (PAC). La liste LaREM propose "d'orienter les aides agricoles vers un modèle propre et respectueux du bien-être animal" - zéro OGM, doublement des surfaces bio, zéro pesticide au-dessus des zones d'eau potable et priorité aux exploitations à taille humaine. Elle défend la sortie du glyphosate d'ici 2021, de diviser l'usage des pesticides par deux d'ici 2025 et de "rendre l'évaluation des produits chimiques plus transparente et indépendante des lobbies". 

Plus radical, le projet d'EELV vise à réorienter la PAC vers une "alimentation durable", "relocalisée", en conditionnant les aides et en limitant "considérablement" la consommation de "produits d'origine animale". Il souhaite aussi l'interdiction immédiate des pesticides et un système de bonus-malus selon les conditions d'élevage. Il est aussi question d'instaurer "une journée hebdomadaire végétarienne" dans tous les restaurants collectifs et scolaires d'Europe.

La France insoumise souhaite également réorienter la PAC vers "une agriculture écologique et paysanne", avec "un transfert massif des subventions de la PAC vert les petites exploitations et l'agriculture bio", "un plafonnement des aides pour les grosses exploitations" et l'interdiction des pesticides, néonicotinoïdes, OGM et glyphosate. LFI veut aussi introduire le "100% bio" dans la restauration scolaire, interdire les produits issus de la déforestation, les agrocarburants ainsi que les "fermes-usines". Dans la même ligne, la liste PS-PP veut défendre "l'agroécologie" en attribuant "70% du budget" de la PAC aux pratiques agricoles "qui visent à l'abandon des pesticides et des engrais de synthèse". Elle demande l'interdiction du glyphosate et des néonicotinoïdes, et propose une TVA à taux réduit sur les produits de l'agriculture bio.

La liste LR veut pour sa part "renforcer les aides à la reconversion vers l'agriculture bio", lutter contre les pratiques de pêche nuisibles à l'environnement et "favoriser les circuits courts et l'approvisionnement local". Côté RN, la liste prône "la relocalisation des activités humaines", le soutien aux circuits courts via une "détaxation", "le localisme, c'est-à-dire la production, la consommation et le retraitement dans un périmètre géographique le plus raisonnable possible". A terme, il veut "arrêter la PAC" au profit d'une "politique agricole française" qui "assurerait notre autosuffisance alimentaire". 

Energie

En matière d'objectifs, la liste LaREM de Nathalie Loiseau défend la fermeture de "toutes les centrales à énergie fossile" et la "sortie de tous les hydrocarbures" en 2050. La fin de la vente de véhicules diesel et essence devrait intervenir "d'ici 2040". 

EELV fixe "l'objectif de décarbonation totale" de l'UE à 2030, défend un "désinvestissement des énergies fossiles" et une sortie "complète" du charbon et du nucléaire "entre 2030 et 2040". L'objectif sera d'aboutir à "100% d'énergies renouvelables" en 2050. Pour LFI, il s'agit de "fixer la neutralité carbone" à 2050, supprimer toutes les subventions aux énergies fossiles, ainsi que de proposer "un plan européen de sortie concertée du charbon et du nucléaire" pour aboutir à "100% d'énergies renouvelables" en 2050. 

La liste LR veut "réduire notre dépendance énergétique en visant le zéro carbone à l'horizon 2050", et en favorisant "le mix énergétique adapté aux réalités du territoire". Elle propose un "plan européen des nouvelles mobilités" qui permettrait à l'UE de "devenir le leader mondial du véhicule électrique sur l'ensemble de la chaîne de valeur", ainsi que du véhicule à hydrogène. La liste PS-PP, quant à elle, compte "investir massivement dans la recherche indépendante" en matière d'énergies renouvelables, sortir du charbon, et sortir du moteur diesel en 2030 et essence en 2040.

Biodiversité

A l'heure des constats liés à l'effondrement de la biodiversité, la protection des ressources naturelles apparaît dans une partie des programmes en vue du scrutin européen. L'ensemble des listes - hors RN, qui ne le mentionne pas - plaident pour l'interdiction totale du plastique non recyclable, qui pollue notamment les océans. Plusieurs soutiennent aussi une extension de l'actuel réseau Natura 2000, à l'instar de LaREM. 

La liste EELV de Yannick Jadot propose de "donner des droits au vivant", en instaurant ainsi la possibilité d'ester en justice au nom d'un écosystème, et de faire reconnaître le crime "d'écocide". Les écologistes veulent aussi "ré-ensauvager l'Europe" à travers l'élargissement des espaces protégés à 10% des zones terrestres, et 20% des aires marines de l'UE. Ils défendent aussi la création de nouveaux parcs naturels européens, et de nouvelles mesures de réintroduction d'espèces. On retient aussi la volonté de créer "un Conservatoire européen du littoral" et d'instaurer "un moratoire sur toute prospection ou exploitation des énergies fossiles dans les eaux de l'UE".  

Manon Aubry (LFI) porte la volonté de créer "un tribunal international de justice climatique et contre les écocides", permettant de juger "les Etats et les multinationales". Elle veut aussi mettre en oeuvre une "charte européenne des droits des animaux", et un "plan de sauvegarde pour la biodiversité en Europe". LFI soutient enfin une "planification écologique européenne" comprenant un programme de dépollution des mers.

Côté PS-PP, enfin, la liste de Raphaël Glucksmann plaide pour l'extension des écosystèmes marins de 30% d'ici à 2030 et la "reconnaissance internationale de l'écocide". 

Politique industrielle et commerciale

Sur le plan des échanges commerciaux, la liste LaREM préconise "la fin d'ici 2030" de l'importation de produits contribuant à la déforestation, et le refus de signer de nouveaux accords de libre-échange avec "des pays ne respectant pas l'Accord de Paris sur le climat". Les candidats LR veulent, quant à eux, "renforcer massivement le contrôle des produits importés pour vérifier qu'ils respectent nos normes de sécurité sanitaires et environnementales", tout en "allégeant" les contrôles sur les producteurs européens "qui respectent déjà les standards les plus élevés du monde". 

Le Rassemblement national plaide, de son côté, pour la "fin du dogme de la libre-concurrence" et pour "la responsabilité nationale de l'entreprise", en encourageant "le refus des délocalisations" et en appuyant le recours "aux fournisseurs et aux produits locaux". 

Sur le plan commercial, la liste EELV défend une politique "d'industrialisation et d'emplois verts" et suggère d'adopter une loi européenne "anti-trust" spécifique aux gros pollueurs. Chez LFI, il s'agit de refuser "tout nouvel accord de libre-échange" et, sur le plan intérieur, "d'arrêter la privatisation des services publics nécessaires à la transition écologique". 

Enfin, la liste PS-PP refuse "tout accord de libre-échange" tant que n'auront pas été définis des critères "environnementaux, sociaux et fiscaux" sur le plan international. 


Vincent MICHELON

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