L'affaire Kerviel-Société Générale s'invitera-t-elle dans la campagne présidentielle ?

Publié le 30 septembre 2016 à 20h17, mis à jour le 2 octobre 2016 à 22h04
L'affaire Kerviel-Société Générale s'invitera-t-elle dans la campagne présidentielle ?
Source : Martin BUREAU / AFP

DÉBAT FISCAL - L'avocat de l'ex-trader Jérôme Kerviel a indiqué vendredi qu'il ne se pourvoirait pas en cassation après la condamnation de son client à verser 1 million d'euros à la Société Générale. En attendant une hypothétique révision du procès pénal, l'affaire se politise. Le gouvernement souhaiterait notamment revoir le dossier fiscal de la banque avant la présidentielle.

Jusqu'à présent, le monde politique avait prudemment laissé l'affaire qui oppose Jérôme Kerviel à la Société Générale entre les mains des juges. Après la condamnation en appel de l'ex-trader, le 23 septembre, à verser 1 million d'euros à la banque au titre des préjudices subis (bien en dessous des 4.9 milliards jugés en première instance), les choses bougent. Vendredi, son avocat a annoncé à La Tribune qu'il ne se pourvoirait pas en Cassation.

Après ce jugement qui reconnaît une responsabilité de la banque dans les pertes, le ministre de l'Economie et des Finances, Michel Sapin, a indiqué que l'administration était "saisie" d'une éventuelle révision de la ristourne fiscale de près de 2,2 milliards d'euros accordée à la Société Générale en 2009 et 2010 pour compenser ses pertes. Plus intriguant, son secrétaire d'Etat au Budget, Christian Eckert, a laissé entendre que le règlement du litige fiscal pourrait intervenir "avant la présidentielle", prévue en mai 2017. Le calendrier du dossier Kerviel devient-il un sujet électoral ?

"Un symbole de résistance"... Mais pas de récup'

Premier à dégaîner dans le cadre officiel de la campagne présidentielle : Nicolas Dupont-Aignan. Le candidat de Debout la France invite l'ancien trader de la Société Générale, ce samedi en tribune, lors d'un meeting à Paris sur le thème "Nettoyons la politique". Pour le gaulliste, Jérôme Kerviel incarne "cette résistance au système" après avoir été "un élément de ce système". Pas question pour autant de l'impliquer davantage : "Il ne vient pas pour soutenir Debout la France", certifie à LCI l'entourage de Nicolas Dupont-Aignan. "Nous le soutenons depuis longtemps, nous avions réclamé une commission d'enquête sur cette affaire. Cela transcende clairement les clivages poliques." La venue de Jérôme Kerviel garantira malgré tout une belle visibilité au discours du candidat souverainiste.

De fait, Jérôme Kerviel a reçu des soutiens politiques mais il n'a jamais parlé lui-même de politique. Dès 2014, Jean-Luc Mélenchon lui faisait l'accolade à la Fête de l'huma et apportait un soutien personnel au jeune trader, alors au fond du trou. Peu après, il rencontrait... le pape. L'écologiste Julien Bayou se rapprochait aussi de lui, l'invitant aux universités d'été d'EELV en 2015, et faisant de cette rencontre le point de départ d'un combat très politique pour la restitution du crédit d'impôt accordé par l'Etat  à la Société générale. 

"Il n'est proche de personne", assure Julien Bayou, devenu son ami, à LCI. "Ce n'est pas son truc. Son combat est politique mais pas partisan. Il est simplement un ex-trader qui milite pour que l'on tire des leçons de ce scandale." L'écologiste fustige en revanche le "traitement politicien" du gouvernement. "La banque doit rendre l'argent. Le gouvernement fait de l'enfumage, il n'a pas besoin d'attendre la présidentielle, c'est une affaire de quelques jours." Autre proche de Kerviel, Alexis Corbière, lieutenant de Jean-Luc Mélenchon, voit en lui un "lanceur d'alerte" qui est "un rouage" et le "bouc émissaire" dont le cas emblématique doit servir à remettre en cause le système. Bref, chacun voit en Jérôme Kerviel une petite pierre à l'édifice de son propre combat. 

Jusque-là, la classe politique en parlait du bout des lèvres

En dehors des quelques candidats "anti-système" de droite ou de gauche, l'affaire Kerviel et sa chronique judiciaire avaient donc en revanche incité la classe politique à la retenue, voire au silence total. François Hollande en tête, auquel l'ancien trader avait demandé en 2014 une garantie d'immunité pour les témoins potentiels de l'affaire. 

Mais le jugement en appel de l'ex-trader - qui espère toujours la révision de son procès pénal où il a été condamné à trois ans de prison ferme - a délié les langues au gouvernement. Et tout particulièrement à Bercy, où l'hypothèse de récupérer 2.2 milliards d'euros de crédit d'impôt ne peut pas laisser indifférent. "Une brèche est ouverte", confirmait une source ministérielle à La Tribune  juste après la décision de la cour d'appel. Si tel est le cas, l'affaire Kerviel pourrait s'inviter un bout de temps dans la campagne présidentielle. "Tant mieux si cette affaire est récupérée !" estime Alexis Corbière. "Mais en vérité, je ne crois pas qu'ils réclameront quoi que ce soit à la Société Générale." A moins que la pression montante de la campagne de 2017 ne face accélérer les choses. 

VIDÉO - Kerviel après la décision de la cour d'appel de Versailles : "La justice avance"

Kerviel : "la justice avance"Source : Sujet JT LCI
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VIDÉO - JT WE : Partie de campagne, épisode 6

JT WE - Partie de campagne, épisode 6Source : JT 20h WE
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Vincent MICHELON

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