La victoire surprise de François Fillon est-elle une bonne ou une mauvaise nouvelle pour la gauche ?

Publié le 21 novembre 2016 à 13h46
La victoire surprise de François Fillon est-elle une bonne ou une mauvaise nouvelle pour la gauche ?

CLIVANT - Des responsables de gauche voient dans le score de François Fillon à la primaire une clarification utile, voire une chance pour la gauche. Son projet conservateur et libéral permettrait à leurs yeux de valoriser un contre-programme de gauche.

De Jean-Luc Mélenchon à François Hollande, ils étaient nombreux à imaginer que Nicolas Sarkozy serait, à l'arrivée, le candidat de la droite à la présidentielle. L'ancien chef de l'Etat hors jeu, et Alain Juppé en situation délicate, la gauche doit réviser son plan de bataille en profondeur. Et se préparer à une probable victoire de François Fillon, arrivé en tête dimanche soir avec 44% des voix, à la primaire de droite.

Et si cette éventuelle candidature de François Fillon était une chance ? C'est en tout cas ce que certains responsables socialistes ont laissé entendre lundi matin, y voyant l'opportunité de cliver le débat durant la campagne. A commencer par Benoit Hamon, candidat à la primaire PS de janvier. Pour le député des Yvelines, l'intérêt pour la gauche serait précisément d'opposer à la "ligne dure" incarnée par François Fillon un projet de gauche "sans équivoque".

"Un programme réactionnaire" pour l'aile gauche du PS

Une "gauche assumée" face à "la révolution conservatrice". L'analyse du candidat est partagée par un camarade de l'aile gauche du PS. Pour le député de la Nièvre Christian Paul, la gauche doit organiser "une primaire très large" pour faire face à une droite "en ordre de bataille avec un ultra-libéral". 

Encore un peu plus à gauche, Gérard Filoche, également candidat à la primaire de janvier, va plus loin : "François Fillon propose un programme réactionnaire", écrit-il sur son blog. "Thatchérien au plan économique et social, et une approche très "Manif pour tous" au plan sociétal." Et de conclure : "Fillon est de fait en total décalage avec la majorité de la société française actuelle", ce qui plaide selon lui pour "un projet bien à gauche et de rassemblement de la gauche et des écologistes". Une analyse qui pourrait également intéresser Arnaud Montebourg, bien que le candidat du "Projet France" ne se soit pas encore exprimé sur le succès surprise de François Fillon. 

Fillon intéresse les réformistes du PS et Emmanuel Macron

Le principe d'un clivage utile n'est pas l'apanage de l'aile gauche du PS. Lundi matin sur France Info, le patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, a décrit la victoire d'"une droite ultra, une droite passerelle avec le FN sur l’identité, la conception de la famille". Une approche qui pourrait intéresser François Hollande, en cas de nouvelle candidature du chef de l'Etat, ou bien Manuel Valls.

La perspective Fillon pourrait même intéresser jusqu'à Emmanuel Macron, candidat hors primaire à la présidentielle. Car si ce dernier n'avait manifestement pas anticipé le succès du challenger de la droite, le projet conservateur de ce dernier pourrait doper la candidature "progressiste" qu'il souhaite incarner. Confirmation de cette stratégie lundi : interrogé par Le Monde, Emmanuel Macron a estimé qu'avec Alain Juppé et François Fillon, les électeurs avaient "le choix entre deux types de droite, le statu quo ou le retour en arrière. C'est cela le choix du XXIe siècle pour la droite". 

"Un repoussoir pour la gauche"

"Si François Fillon gagne au second tour, ce qui est hautement probable, cela peut remobiliser la gauche", confirme à LCI l'enseignant et politologue Thomas Guénolé. "Son programme catho-thatchériste est un véritable repoussoir." Selon ce dernier, trois courants de la gauche pourraient être, chacun à sa façon, intéressés par la possibilité d'une opposition frontale : celui de Jean-Luc Mélenchon, qui veut "revenir aux fondamentaux de la gauche" sans le PS, celui de Benoit Hamon et d'Arnaud Montebourg, qui tente de "ramener le PS à gauche", et celui des réformistes comme Manuel Valls (ou François Hollande), qui "ne change rien" à l'orientation politique du gouvernement actuel mais "appelle les électeurs à revenir à gauche" en brandissant le spectre d'un programme réactionnaire et de la montée du FN. 

Bref, le candidat François Fillon a de quoi intéresser toute la gauche. A condition que celle-ci soit suffisamment solide pour passer le premier tour de l'élection présidentielle, ce qui est loin d'être acquis. 

Les programmes de François Fillon et Alain Juppé passés au cribleSource : Sujet JT LCI
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Vincent MICHELON

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