Militaires, Comédie-Française, SNCF... ces régimes de retraite très spéciaux auxquels Macron veut mettre fin

Publié le 11 septembre 2017 à 11h50, mis à jour le 11 septembre 2017 à 11h58
Militaires, Comédie-Française, SNCF... ces régimes de retraite très spéciaux auxquels Macron veut mettre fin

REFORME - Le gouvernement lancera au premier semestre 2018 le chantier de la réforme des retraites. Emmanuel Macron entend substituer aux 37 régimes un "système universel" censé garantir plus d'équité pour les Français. Un dossier explosif tant les exceptions sont nombreuses en France. Chaque corporation ayant son avantage historique. Petit passage en revue.

C'est l'un de ses grands engagements de campagne : Emmanuel Macron lancera, au premier semestre 2018, la chantier de la réforme des retraites afin de rendre le système français "plus juste" et "plus transparent". Au menu : rien moins que la fusion des 37 régimes existants... En un seul,  avec une harmonisation progressive des règles "qui seront les mêmes pour tous les régimes" et une "vraie fin des inégalités entre fonctionnaires et salariés du privé". Une gageure ? Possible, tant ils ont été nombreux avant lui à s'y casser les dents. Le chantier le plus sensible étant de mettre fin aux régimes spéciaux de retraites - un domaine où Alain Juppé avait échoué en 1995.

Les militaires, champion du départ précoce

Qu'en est-il de ces fameux "régimes spéciaux de retraite" (qui concernent seulement 2% des cotisants) ? Evoquez ce thème lors d'un dîner qui s'enlise et immédiatement, SNCF et RATP sont montrés du doigt. Leur tort :  se mettre tout le temps en grève, et surtout partir à la retraite à 50 ans. Ce qui n'est pas tout à fait vrai.  Les réformes de 2008 et 2010 sont passées par là. Résultat, selon un rapport du conseil d’Orientation des Retraites (COR), en 2012, l'âge moyen du départ en retraite était de 55 ans et 10 mois à la SNCF et de 54 ans à la RATP, au lieu de 62 ans pour le régime général. Pourtant, les agents des deux entreprises publiques ne sont pas les seuls à bénéficier d'un traitement particulier qui s'explique notamment par la pénibilité de leur métier.

Nombre d'autres professions disposent aussi de régimes spéciaux  : comme les marins (leur régime est d'ailleurs considéré comme l'ancêtre des régimes de retraite puisqu'il a vu le jour en 1670). Pour eux, l'âge légal de départ est de 50 ans après 25 ans de service, 52 ans et demi après 37 ans et 5 mois de cotisations, comme l'indique l'Enim, le régime social des marins. Les militaires, eux, sont les champions du départ précoce avec un âge moyen de 43 ans : les sous-officiers peuvent partir en retraite après 17 ans dans la profession et les officiers, au bout de 27 années, le plus souvent pour entamer une seconde carrière, dixit la Cour des comptes.

Les retraités des mines sont également concernés. Même si ce régime est en voie de disparition : il n'accepte plus de nouveaux affiliés (la dernière mine française de charbon ayant fermé en avril 2004 en Lorraine), du coup il est presque entièrement financé par l'Etat. Vu ce qu'était la pénibilité de leur travail, les spécificités de leur régime spécial de retraite concernent avant tout l'âge légal de départ : 55 ans, avec des possibilités de retraite anticipée, en particulier pour ceux qui ont passé une partie de leur carrière "au fond". Selon La Croix, un mineur qui aura passé 80 trimestres au fond pourra partir à la retraite à 50 ans. Celui qui n'y aura effectué "que" 16 trimestres ne pourra bénéficier d'une pension qu'à 54 ans.

Les contribuables payent 52 millions pour la retraite des parlementaires chaque année

Il est toutefois d'autres régimes très spéciaux que les politiques dénonçaient moins souvent jusqu'ici, celui des... parlementaires (députés et sénateurs). Sous l'impulsion du chef de l'Etat, l'Assemblée nationale a ouvert le chantier de sa suppression, avec le passage prévu des parlementaires au régime général. 

Voici comment fonctionnait jusqu'ici le régime de retraite des députés. Le système de la double cotisation obligatoire avait bien été supprimé en 2010 (un mandat parlementaire comptait double pour la retraite), mais les parlementaires continuent de jouir de réels avantages : il leur suffit de cotiser 30 ans (contre 41,5 ans pour le régime général), pour toucher une retraite à taux plein. Résultat, ils perçoivent 6 euros de pension... Pour un euro de cotisation. 

Autre incongruité, la pension moyenne pour un député est actuellement de 2.700 euros nets par mois. Mais la caisse de retraite des députés n’est financée qu’à 12% par les cotisations des députés, le reste étant payé par l’Etat sur une subvention votée par les parlementaires. L'association Sauvegarde retraites calculait en 2010 que les contribuables payent 52 millions pour la retraite des parlementaires chaque année. 

EDF... une retraite financée par les abonnés

Autre système très lucratif, le régime spécial des retraites de la Banque de France créé par Napoléon 1er en 1806. Il a longtemps été considéré comme le plus avantageux de France. En cause, le mode de calcul. Comme l'indique l'association Sauvegarde retraites, un retraité de la Banque de France perçoit 75 à 80% du montant de son traitement calculé en référence aux six dernier mois d'activité alors que le retraité du privé doit se contenter, en moyenne, de 50% de son salaire calculé sur les 25 meilleures années d'activité. Sans compter le  principe des "bénévolences", sortes d'allocations spéciales obtenues sans cotisation.

Du côté des salariés des entreprises de production et de distribution de gaz et d'électricité qui disposent d'un régime spécial de retraite depuis 1946. Une taxe est payée par l'ensemble des consommateurs pour financer leur régime de retraite : il s'agit de la contribution tarifaire d'acheminement (CTA). Elle figure sur toutes les factures d'électricité et de gaz.

Plus confidentiel (vu le peu de personnes concernées), depuis 1873, les personnels du port autonome de Strasbourg bénéficient d'un régime spécial de retraite. Une exception au régime général qui ne concerne aujourd'hui plus que 200 personnes. Parmi les spécificités, le taux de la cotisation patronale est de 33%, soit 4 fois plus que pour un salarié lambda.

Un régime spécial pour l'Opéra de Paris mais pas celui de Lyon

Plus étrange encore, comme en rendait compte L'Obs, les salariés de l'Opéra de Paris et ceux de la Comédie-Française bénéficient d'un régime spécial, mais pas ceux de l'Opéra de Lyon ou de Marseille et ceux des autres théâtres. A l'Opéra de Paris, l'âge légal de départ à la retraite varie de 40 à 60 ans selon la catégorie socioprofessionnelle. 

SNCF : Macron évoque l'ouverture à la concurrence et la fin des régimes spéciaux de retraiteSource : JT 20h Semaine

Du côté de la Comédie-Française, la caisse de retraite du personnel gère très peu d’assurés : on y recence environ 403 retraités. Et la particularité de ce régime spécial, ce sont les possibilités de départ anticipé : à 55 ans pour les personnels techniques et les agents de sécurité. Enfin, il existe une pension minimale : un peu plus de 12.000 euros par an.


Virginie FAUROUX

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