EXCLUSIF – Télétravail : les cadres traînent des pieds pour revenir au bureau

par Sibylle LAURENT
Publié le 19 mai 2020 à 17h34, mis à jour le 20 mai 2020 à 12h04
EXCLUSIF – Télétravail : les cadres traînent des pieds pour revenir au bureau
Source : iStock

ETUDE – Cadremploi a scruté le retour au travail des cadres après le 11 mai. Et si un peu plus d’un cadre sur trois est retourné dans son entreprise, le télétravail, qui a fait ses preuves les deux derniers mois, reste la norme... et l'envie première.

36%, tout de même. Quelques jours après le 11 mai, date officielle du déconfinement, c’est plus d’un salarié sur trois qui est retourné sur son lieu de travail, indique une étude menée par Cadremploi que nous révélons en exclusivité. Quant aux 64% de cadres qui sont restés chez eux, la norme reste le télétravail : 70% sont en télétravail, 19% en mélange de télétravail et d’activité partielle, et 11% en chômage partiel.

Rompre l'isolement

Pour les premiers, 39% des cas n’ont pas eu le choix : cela a été imposé par l’employeur. C’est aussi, pour 37% d’entre eux, parce que l’entreprise a rouvert. Pour d’autres enfin, ça a été un choix : parce qu’ils voulaient reprendre un rythme de travail "normal" (34% des sondés), ou rompre l’isolement (14%). "Retrouver du lien social, un rythme 'normal', rompre l’isolement, était aussi important pour une part de cadres qui se sont parfois retrouvés confinés chez eux, seuls", détaille auprès de LCI Elodie Franco Da Cruz, responsable des études chez Cadremploi. 

Intéressant de noter que c'est en voiture que les cadres sont retournés travailler. Et largement. 87% en voiture contre 4% en métro et 4% à la marche. Et une fois sur place, comment cela s'est passé ? "Malgré un peu d’appréhension et de stress, la première journée s’est plutôt assez bien déroulée", note la responsable des études. "Les cadres se montrent satisfaits de ce qui a été mis en place par les entreprises que ce soit en terme sanitaire, mais également en terme organisationnel."

Mélange de sentiments

Et en effet, dans leur grande majorité, les entreprises ont multiplié les mesures de sécurité pour rassurer les salariés et assurer leur sécurité. 94% ont ainsi mis à disposition du gel hydroalcoolique, 85% des masques ; mais aussi, dans 71% des cas, limité les effectifs au sein des locaux, et dans les open-space (à 51%), limité les réunions ( 49%), rendu le port du masque obligatoire (45%), organisé des gestions de flux de circulation (parcours fléchés, sens unique). Roulements des effectifs (27%), et prise de température à l'entrée au sein des locaux (19%) ont aussi, quoique dans une moindre mesure été déployés. 

Beaucoup de précautions donc mais les cadres les ont-ils observées ? 40% ont porté un masque toute la journée car c'était obligatoire mais presque autant (37%) ne l'ont pas porté du tout.  "Au final, le retour, même s’il a été appréhendé, est source de soulagement et de joie", précise Elodie Franco Da Cruz. Une minorité cependant, (14%), pointe des problèmes : distanciation sociale pas respectée dans l’open-space, restauration du midi compliquée , trop de salariés présents dans les locaux, et 31% des mécontents avancent le fait que rien n'a été mis en place pour assurer un retour en sécurité au sein des locaux. 

Et pour ces derniers, les sentiments observés sont le stress, l'anxiété voire la colère ou la peur. "Par exemple dans secteur de la construction, les règles peuvent s’avérer compliquées à respecter. Donc forcément, on est davantage en situation de stress et l’appréhension peut être plus importante."

80% des cadres affirment très bien vivre la situation de télétravail imposée
Elodie Da Cruz, responsable ds études chez Cadremploi

Autre enseignement de l'étude : un appétit nouveau et vorace pour le télétravail – et donc d’une envie somme toute assez modérée de revenir sur le lieu de travail. "Une précédente étude menée deux jours avant la date du déconfinement nous montrait que 6 cadres sur 10 déclaraient ne pas souhaiter retourner sur leur lieu de travail dans l’immédiat", raconte Elodie Franco Da Cruz. "Contrairement à ce qu’on aurait pu penser,- notamment que c’était pour des raisons de santé, qu’ils ne souhaitaient pas prendre de risques -, c’était plutôt le fait que l’organisation en télétravail fonctionne très bien."

Le télétravail s’est largement imposé. "Une précédente vague montrait que jusqu'à 80% de cadres affirmaient très bien vivre la situation de télétravail imposée et une majorité pense que le télétravail va s’installer durablement dans les organisations."

Télétravail : entre avenir et inquiétudeSource : La Matinale LCI Week-end

Des réponses satisfaisantes à une situation exceptionnelle

Globalement, les cadres sont très satisfaits de la gestion de la crise par leur entreprise. Mais les 17% d’insatisfaits pointent le manque de transparence et de communication, un manque d’empathie de la direction, voire un manque d’accompagnement et le peu de flexibilité de la part de la direction. 

"Encore une fois, il ne faut pas oublier que la situation a été exceptionnelle : les entreprises ont dû s’adapter très rapidement et mettre en place des organisations nouvelles en très peu de temps. Cela a suscité le besoin d’un grand partage d’informations et de transparence", analyse la responsable d'études. "C’est d’ailleurs la principale difficulté qui remontait des managers lors de première semaine du confinement : celle de partager au mieux l’information avec leurs collaborateurs. Cela a diminué au fur et à mesure, et après un mois de confinement, la principale difficulté a été de maintenir le lien avec les collaborateurs. Et c’est compréhensible : au début, chacun a été surpris, sidéré face à la situation, a eu besoin de beaucoup échanger les uns avec les autres. Et au fur et à mesure, en se rendant compte que cela allait durer longtemps, chacun s’y est habitué et les échanges, en tout cas sur ce sujet, ont diminué."


Sibylle LAURENT

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