Gel des salaires chez Valeo contre zéro licenciement : "On commence comme ça mais jusqu'où ça peut aller ?"

par Hamza HIZZIR
Publié le 2 octobre 2020 à 11h50

Source : JT 20h Semaine

CRISE - L'équipementier automobile Valeo s'est engagé à ne procéder à aucun plan social en France pendant deux ans, en échange d'un gel des salaires. Une décision prise en accord avec les partenaires sociaux mais qui ne convainc pas tous les salariés.

L'accord ne mettra pas tout le monde d'accord. Le 29 septembre, les syndicats CFE-CGC et FO de l'équipementier automobile Valeo ont annoncé qu'ils avaient signé l'accord négocié avec la direction, où elle s'engage à ne procéder à aucun plan social en France pendant deux ans, en échange d'un gel des salaires. C'est la signature de ces deux organisations, qui détiennent ensemble plus de 50% de représentativité syndicale, qui a validé cet accord. Mais la CGT et la CFDT ont, elles, refusé de signer. Malgré une perte nette de 1,21 milliard d'euros sur les six premiers mois de l'année pour le groupe, due à la crise sanitaire.

C'est un engrenage, les anciens se sont battus pour acquérir ces avantages et on est en train de tous les perdre, c'est une catastrophe.
Un salarié de Valeo

La plupart des salariés interrogés devant l'usine d'Angers témoignent en effet d'une déception, après avoir appris que leurs rémunérations seraient gelées durant deux ans, et leurs primes d'intéressement suspendues. "Il y aura un gros trou dans le porte-monnaie, dans le train de vie... Qu'est-ce qu'on va devenir ? Le coût de la vie va encore augmenter pendant ce temps", confie l'un. "On commence comme ça mais on ne sait pas jusqu'où ça peut aller, appuie un autre. C'est un engrenage, les anciens se sont battus pour acquérir ces avantages et on est en train de tous les perdre, c'est une catastrophe."

De son côté, la direction affirme qu'il s'agit d'un mal pour un bien. "Il n'y aura pas de départs contraints, pas de fermetures d'usines, pas de baisses de salaires, tout cela est garanti, détaille Bruno Guillemet, directeur des ressources humaines de Valeo, l'accord de performance collective en main. Par rapport à d'autres méthodes, où des licenciements massifs sont annoncés dans la précipitation, on assure de la compétitivité à nos activités françaises, on préserve les emplois, tout le monde s'y retrouve." Le gel des salaires permettra au groupe d'économiser 100 millions d'euros par an.

4 entreprises sur 10 envisagent de geler les salaires

Valéo, dans le contexte actuel, est loin d'être un cas isolé. En février, les bons résultats du groupe Michelin avaient conduit à la conclusion d’un accord d’augmentation des salaires de 2 à 3%, selon les postes. Mais deux mois de confinement ont ensuite poussé la direction à suspendre ces augmentations jusqu’au retour, d'ici à 2023, du résultat de l’entreprise à son niveau de 2019. De son côté, BNP Paribas a ouvert la semaine dernière des négociations salariales pour geler les augmentations collectives. Alors qu'Alstom avait annoncé, dès le mois de mai, le gel de tous les salaires pour l'année 2020...

Selon une étude du cabinet d'audit Deloitte, publiée en juin, 30% des entreprises comptent réduire leur enveloppe dédiée aux augmentations générales des salaires, et 40% envisagent sérieusement de geler les salaires cette année. En parallèle, le 15 juin dernier, le président Emmanuel Macron avait affirmé que, pour redresser l'économie, il faudra "travailler et produire davantage", et ce, "alors même que notre pays va connaître des faillites et des plans sociaux multiples en raison de l'arrêt de l'économie mondiale", appelant alors les entreprises à négocier des "accords de performance collective"... Rendus possibles par les ordonnances de 2017 réformant le Code du travail, au tout début de son quinquennat.


Hamza HIZZIR

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