Qu’est-ce que l’éco-anxiété, ce mal qui touche en particulier les jeunes générations ?

Publié le 6 novembre 2021 à 9h50

Source : TF1 Info

SYNDROME - Symbolisé par une angoisse importante et un sentiment d’impuissance face au changement climatique qui s’accélère, le concept d’éco-anxiété prend de plus en plus de place dans le débat public.

75% des jeunes de 16 à  25 ans jugent l’avenir "effrayant" et la moitié d’entre elles n’ont tout simplement plus foi en l’humanité. Ces chiffres loin d’être optimistes sont été rapportés dans une vaste étude menée auprès de 10.000 sondés originaires de dix pays et publiée dans The Lancet Planetary Health. Face à la crise climatique qui s’amplifie, la désillusion est grande chez les adolescents et les jeunes adultes. Elle se symbolise aujourd’hui par le concept d’éco-anxiété, qui parle à de plus en plus de personnes, aussi bien en France qu’ailleurs. 

À quoi renvoie l’éco-anxiété ?

Importé en France en 2019, notamment par la médecin de santé publique Alice Desbiolles dans son livre L’éco-anxiété : vivre sereinement dans un monde abîmé, ce concept désigne l’angoisse de voir l’état du monde empirer avec la hausse des températures, la montée des eaux, ou encore le déclin de la biodiversité. "L’éco-anxiété est quelque chose de normal", nous précise Alice Desbiolles, "mais cela peut devenir une pathologie si cela provoque un retentissement trop important sur la vie de l’individu".

Ce mal se manifeste de différentes manières, décrit l’étude du Lancet. Par de l’inquiétude et de la peur, de la colère souvent, du chagrin, du désespoir, voire de la culpabilité ou de la honte. Parfois, une forme d’espoir peut également émerger de cette angoisse, avec la perspective d’un monde meilleur. Il ne doit pas être confondu avec la solastalgie, concept désignant une "détresse rétrospective" et non "prospective", analysait la thérapeute Charline Schmerber sur France Inter. Autrement dit, une angoisse renvoyant au passé et à la perte d’un environnement sain plutôt qu'à un futur dégradé.

Qui sont les plus touchés ?

L'étude publiée dans le Lancet l'appuie de manière frappante, les plus jeunes sont les premiers sujets à être éco-anxieux. "Des recherches qualitatives menées depuis 2010 ont révélé que de nombreux enfants ont une vision pessimiste de l’avenir climatique", soulignent les chercheurs en préambule. "Nous avons tous un potentiel d’être éco-anxieux, nous sommes tous concernés par ces enjeux-là", nuance Alice Desbiolles. "Néanmoins, on observe que certains jeunes semblent particulièrement impactés par cet affect. De manière assez logique, puisqu’ils seront adultes, en tout cas dans la force de l’âge, au moment où les prévisions du GIEC doivent se réaliser."

Un facteur de mobilisation ?

L’éco-anxiété peut provoquer de l’espoir chez les personnes qui se sent touchées par ce mal. "Il y a une dimension existentielle et comportementale dans l’éco-anxiété. Ces personnes qui ressentent ces émotions vont vouloir se mettre en mouvement pour pallier ces états d’âme", décrypte Alice Desbiolles. "La suite de cette conscience-là va souvent être une volonté d’agir, au niveau individuel mais aussi collectif."

Greta Thunberg en est le symbole. En effet, la jeune activiste suédoise a décidé d’agir après une dépression à l’âge de 11 ans. Si sa maladie a permis de diagnostiquer chez elle le syndrome d’Asperger, elle lui a également donné la force de se mobiliser contre sa plus grande peur, le réchauffement climatique. "Ça m’a permis de me relever", confiait la militante aux caméras d’"Envoyé Spécial", en janvier 2020. Après son appel mondial à la jeunesse, des milliers de collégiens et lycéens se sont mis en grève durant de longs mois et prouvé leur résilience face au réchauffement climatique.

Le mal du siècle ?

L’expression a été consacrée par la docteure Alice Desbiolles, dans une tribune parue en 2019 dans La Croix. "En réalité, le mal du siècle est, comme le rappelle l’OMS, le réchauffement climatique et plus globalement la crise écologique d’origine humaine. C’est la principale menace pour la santé humaine, mais aussi la principale opportunité", souligne la médecin, qui considère que "s’il y a un sursaut populationnel, politique, nous avons les clefs pour offrir un monde plus positif et respectueux de la santé dans toutes ses dimensions".

Dernièrement, le lien entre les dangers environnements et les risques sur la santé est directement établi, aussi bien par des revues médicales que par les experts de l’OMS. Dans un récent communiqué, Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur de l’organisation, a alerté sur le fait qu’à terme, "les risques du changement climatique pourraient éclipser ceux de n’importe quelle maladie". Et de prévenir qu’"il n’existe aucun vaccin contre la crise du climat". 


Caroline QUEVRAIN

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