Marée noire au large de la Corse : comment les navires pollueurs sont traqués

MM
Publié le 14 juin 2021 à 10h22

Source : TF1 Info

"DÉLINQUANCE ÉCOLOGIQUE" - Si la nappe d'hydrocarbures qui menaçait l'île de Beauté s'est éloignée de ses côtes, la question de la responsabilité de cette marée noire continue de se poser. Les auteurs sont passibles d'une lourde peine.

Plages fermées, pêche interdite... Depuis la nuit de vendredi 11 à samedi 12 juin, la Corse se préparait avec inquiétude à l'arrivée d'hydrocarbures lourds sur les plages de sable de sa côte orientale. Mais dimanche soir, la nappe d'hydrocarbures s'est éloignée vers le large, où des navires de la marine effectuent des opérations de récupération. "Nous sommes plus rassurés à ce stade parce que la dérive éloigne la pollution de la côte. On a une pollution très morcelée qui est maintenant à une dizaine de kilomètres au large", avait indiqué samedi soir à l'AFP la capitaine de frégate Christine Ribbe, porte-parole de la préfecture maritime de Méditerranée.

Reste que les autorités sont toujours à pied d'œuvre pour limiter les dégâts que pourrait causer cette marée noire. Deux bateaux dépollueurs ont ainsi déjà récupéré quatre tonnes d'hydrocarbures. Dans un second temps, l'objectif sera aussi de déterminer les auteurs de ce dégazage sauvage, un procédé illégal consistant à vider et nettoyer les cuves des navires en pleine mer. Sur ce point, une enquête a été ouverte et confiée à la gendarmerie maritime. Viendra ensuite le temps de la justice et des sanctions.

"Dégazer des hydrocarbures en mer est un pur acte de délinquance écologique", a dénoncé la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, qui s'est rendue sur place avec la ministre de la Mer, Annick Girardin. Et cette seconde d'ajouter : "Nous sommes arrivées ici bien déterminées à trouver ceux qui ont dégazé sauvagement. Je le disais tout à l’heure ce sont des voyous et ils devront être traités comme des voyous". Selon la gendarmerie maritime, il s'agit d'une des pollutions par dégazage parmi les plus significatives constatées au cours des trois dernières années, dans cette zone méditerranéenne.

Pour l'heure, une enquête a été ouverte par le parquet de Marseille, compétent pour les affaires de pollution maritime sur le littoral méditerranéen français. Elle a été confiée à la gendarmerie maritime qui devra notamment tenter de retrouver le bateau à l'origine du dégazage sauvage. À Toulon, onze officiers du groupement de la gendarmerie maritime de la Méditerranée traquent le moindre indice. En exploitant les données radar, ils sont capables d'identifier les navires présents au large de la Corse ces derniers jours. 

On peut savoir de quel bateau ça vient
Corinne Lepage

"Pour le moment, on définit trois navires, mais nous continuons nos recherches et il y en aura peut-être d'autres. Ces navires ne sont pas suspects, ils étaient dans la zone considérée, dans le cadre que nous avons définie pour nos recherches pour le moment", explique pour TF1, dans la vidéo en tête de cet article, le colonel Jean-Guillaume Rémy, commandant du groupement Méditerranée et directeur interrégional de la gendarmerie maritime. 

Autre outil indispensable : les échantillons de pétrole prélevés et en cours d'analyse. Comme une signature ADN, ils permettront de retrouver les responsables et de les juger en France. "Les hydrocarbures laissent des traces qui sont repérables donc on peut savoir de quel bateau ça vient", explique à Franceinfo Corinne Lepage, avocate et coprésidente du parti Cap écologie.

Pour ce qui est des suites judiciaires, l'ancienne ministre de l'Environnement précise à TF1 que "dans la Manche, grâce au travail qu'a effectué le tribunal des affaires maritimes, il y a eu des sanctions très graves et il n'y a quasiment plus de dégazage." 

Pour autant, l'ancienne ministre précise à Franceinfo qu'"il faut savoir si ça vient d'un bateau français ou d'un bateau étranger, parce que si c'est un bateau étranger, il peut y avoir la possibilité qu'il soit poursuivi ailleurs que chez nous". Si seule l'eau de la mer est touchée, "que ça reste éloigné des côtes, et que le bateau n'est pas français, le capitaine et l'armateur peuvent essayer de s'exonérer de leurs responsabilités en se faisant juger ailleurs", poursuit l'avocate.

En Méditerranée, les dégazages sont plus rares que dans la Manche. Mais les pollueurs s'y exposent tout autant à dix ans d'emprisonnement et quinze millions d'euros d'amende.


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