Attaque à Notre-Dame : "Tant que je n'aurai pas vu cette vidéo d'allégeance à Daech, je ne pourrai pas y croire", confie le neveu de Farid Ikken

Propos recueillis par Aurélie Sarrot
Publié le 8 juin 2017 à 0h02, mis à jour le 8 juin 2017 à 10h04
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Source : Sujet JT LCI

ENQUETE - L’agresseur présumé d’un policier sur le parvis de Notre-Dame à Paris mardi a été interpellé après avoir été blessé par balles par les fonctionnaires. Mercredi matin, Farid Ikken, 40 ans, a été placé en garde à vue. Joint par LCI dans la soirée, son neveu, Sofiane Ikken, avocat en Algérie, ne peut croire que son oncle a commis un tel acte.

L’attaque a été perpétrée sous l’œil de nombreux témoins. Mardi, sur le parvis de la cathédrale Notre-Dame à Paris, un policier a  été agressé par un individu muni d’un marteau. Le fonctionnaire, et l’un des deux collègues avec qui il se trouvait, ont fait feu. Blessé, l’assaillant a été maîtrisé puis hospitalisé. 

Au lendemain des faits, le policier blessé âgé de 22 ans a pu quitter l’hôpital où il avait été admis. Farid Ikken, agresseur présumé, a été lui placé en garde à vue en début de matinée. Son neveu, Sofiane Ikken, avocat à Akbou, en Algérie, se dit "sidéré". 

LCI : Comment avez-vous appris l’interpellation de Farid Ikken ? 

Sofiane Ikken : Je l’ai appris par les médias français, notamment sur votre site, LCI.fr. Au départ, j’ai pensé qu’il y avait eu une usurpation d’identité. Je me suis dit : "Ça n’est pas possible que ce soit lui. Farid, il ne peut pas commettre ce genre d’acte". Le ministre de l’Intérieur français a d’ailleurs dit mardi que les enquêteurs avaient retrouvé une carte d’étudiant sur les lieux du crime mais qu’il fallait vérifier son authenticité....

Attaque à Notre-Dame : l'assaillant a crié "c'est pour la Syrie" lors de l'agression du policierSource : Sujet JT LCI
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 LCI : A quel moment avez-vous su qu’il s’agissait bien de votre oncle, Farid Ikken ? 

Sofiane Ikken : Nous avons essayé de le joindre à plusieurs reprises mardi, à partir de 20 heures environ, quand son nom a été donné. Il n’a jamais répondu. Malheureusement, j’ai fini par réaliser, par comprendre qu’il s’agissait de Farid, de notre Farid. Je n’arrive pas à comprendre depuis. Je n’arrive pas à croire qu’il ait pu commettre cet acte, acte qu’il aurait dit avoir commis au nom d’une cause : la Syrie. S’il a fait ça, c’est qu’il souffre de troubles psychiques. Pour moi, il n'y a pas d'autre explication. 

LCI : Farid Ikken est venu l’été dernier en Algérie. Vous avez passé une semaine ensemble. Aviez-vous parlé de la Syrie pendant son séjour ? 

Sofiane Ikken : Nous avions parlé de beaucoup de choses à l’époque. Parmi les sujets que nous avons abordés : l’Etat islamique et le fait que cette organisation terroriste commençait vraiment à faire des ravages au Proche-Orient et en Occident. On a parlé des vidéos montrant des exécutions, des attaques chimiques... Farid m’a alors dit que pour lui l’Etat islamique était une force occulte. Il m’a dit qu’il ne croyait pas du tout à cette organisation. Il a même dit que Abou Bakr Al-Baghdadi (calife autoproclamé de Daech, ndlr) était un abruti. Maintenant, la Syrie n’était pas un sujet omniprésent dans sa bouche, loin de là. Le reste de nos conversations tournait autour de la situation de l’Algérie et des projets de Farid. Il m’avait dit alors qu’il terminait ses études en France et qu’il rentrerait ensuite en Algérie pour faire son boulot de journaliste. 

LCI : Farid Ikken a-t-il, à un moment ou à un autre, dans les discussions que vous avez pu avoir en Algérie ou sur Skype, évoqué les différents attentats survenus depuis 2015 en France notamment ? 

Sofiane Ikken : Nous n’avons jamais évoqué les attentats sur Skype. Même au cours de notre dernier échange, qui date d’il y a une vingtaine de jours environ. Sur Skype, il me parlait de l’Algérie et de la situation ici. Il disait qu’il fallait aller vers un changement qui ne soit pas à la syrienne ou à la libyenne. Il voulait un changement dans la tranquillité. Il ne voulait pas de violence. La seule et unique fois que nous avons parlé de l’Etat islamique, c’est quand il est venu en Algérie l’été dernier.

LCI : Farid Ikken est en garde à vue depuis ce mercredi matin. Vous vous dites quoi maintenant ? 

Sofiane Ikken : S’il a commis l’acte qu’on lui reproche aujourd’hui, c’est vraiment contradictoire. Nous sommes tous sidérés ici, choqués. Comme son directeur de thèse qui a témoigné. Nous ne nous attendions pas du tout à cela. Rien ne laissait présager un tel acte. Pour moi, les seuls et uniques soucis qu'avait Farid, c’était ses problèmes familiaux, des problèmes d’héritage et de partage avec ses frères notamment d’une maison et d’un jardin suite au décès de leurs parents. Financièrement, je sais que ça n’était pas facile pour lui, mais c'est tout. 

Notre-Dame : témoignage du directeur de thèseSource : Sujet JT LCI
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LCI : Quelles étaient les fréquentations de votre oncle ? 

Sofiane Ikken : Je ne sais pas trop. Farid Ikken était marié. Il a divorcé en 2005. Depuis, il n’avait pas de compagne. Jusqu’en 2010-2011, il était sociable, puis il est devenu de plus en plus solitaire. Mais personnellement, je n’ai pas remarqué de phénomène de radicalisation chez lui. Il n'avait rien du terroriste ... 

LCI : Mardi à Paris, l’assaillant a utilisé un marteau pour attaquer un policier… 

Sofiane Ikken : Je suis ce que rapportent les médias quand ils parlent d’un attentat terroriste. Je pense que la personne qui a attaqué le policier mardi, si elle voulait vraiment commettre un attentat, elle ne l’aurait pas fait avec un marteau. On ne fait pas un attentat avec un marteau… 

Les forces de l’ordre et les monuments, cibles des attaques terroristesSource : JT 20h Semaine
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LCI : Dans le studio de Farid Ikken à Cercy-Pontoise, les enquêteurs ont retrouvé une vidéo dans laquelle il prête allégeance à Daech…

Sofiane Ikken : Je n’ai pas vu cette vidéo d'allégeance à Daech et j’aimerais bien la regarder, car tant que je ne l’aurais pas vue, je ne pourrai jamais croire à cette histoire. Nous habitons une région, ici en Algérie, qui n’a rien à voir avec l’islamisme. Farid priait, mais il n’était pas radicalisé, pas que je sache en tout cas. Tout ceci est pour nous, sa famille, impossible. 


Propos recueillis par Aurélie Sarrot

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