Perpétuité requise contre Sofiane Rasmouk, ce "violeur qui ne bande pas"

Publié le 30 mai 2016 à 14h28
Perpétuité requise contre Sofiane Rasmouk, ce "violeur qui ne bande pas"

COMPTE RENDU D’AUDIENCE - Alors que l’avocat général a requis ce lundi la réclusion à perpétuité contre Sofiane Rasmouk, accusé de viols et de tentative de meurtre sur deux jeunes femmes, à Colombes, en 2013, son avocat Francis Terquem a livré une plaidoirie saisissante malgré le fait… qu’il avait été récusé par son client.

Il s’est avancé à la barre sans trop savoir si on le laisserait parler. En ce dernier jour du procès de Sofiane Rasmouk aux assises de Nanterre, la parole est à la défense. Maître Francis Terquem a pour devoir de représenter celui que la presse a longtemps surnommé "le monstre de Colombes", pour avoir, à l’été 2013, violé et tenté de violer puis passé à tabac deux jeunes femmes, dans cette ville des Hauts-de-Seine. Un devoir bien mis à mal par l’accusé, tout au long de cette audience pour le moins mouvementée, qui a révoqué plusieurs de ses conseils - dont Francis Terquem - avant qu’il ne lui soit finalement imposé, commis d’office par la présidente.

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Alors Francis Terquem, lentement, quitte cette place d’où il s’est fait houspiller, harceler pendant huit jours par un Sofiane Rasmouk ingérable, assis dans son dos. Il se déplace lentement, comme s’il marchait sur des œufs. C’est qu’il se souvient, comme tout le monde, de la raison pour laquelle l’accusé l’a révoqué. "Parce qu’on ne partage pas la même ligne de défense" avait lancé Sofiane Rasmouk, demandant à se faire représenter par l’avocat David-Olivier Kaminski… qui n’est jamais venu.

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"L'intelligence d'un mouton qui rentre à l'abattoir"

Ils ne partagent pas la même ligne de défense, c’est bien vrai. Et dans sa plaidoirie, Francis Terquem ne revient pas sur ses positions. Là où Rasmouk nie, Terquem affirme. Là où Rasmouk se dit "violent, cogneur, bagarreur", son avocat l’appelle "violeur". "Les deux crimes que vous avez à juger aujourd’hui sont d’ordre sexuel", rappelle-t-il aux jurés. Et tournant le dos à ce client malgré lui, poursuivi aujourd’hui pour "tentative de meurtre, tentative de viol et viol", il explique : "Priscillia, il la laisse agonisante, mais il n’a pas voulu la tuer. Il a voulu la violer, oui. Il n’exige de n’être qu’un tueur mais c’est un violeur, Sofiane Rasmouk. Un violeur qui ne bande pas, ou si mal. Un violeur qui ne jouit pas. Et s’il n’est pas débile, il a l’intelligence instinctive du mouton qui rentre à l’abattoir. Il ne peut pas reconnaître la dimension sexuelle de ses crimes."

Pourquoi ce refus d’admettre ce que l’ADN a permis de prouver ? Selon Francis Terquem, il y'a bien une raison : la prison. La prison qui ne laisse guère d’espoir à ses détenus "pointeurs", contraints, souvent, de réclamer d’eux-mêmes l’isolement. "Cet isolement qui pour le coup, rend fou!" assène l’avocat. Contre toute attente, Rasmouk ne cherche pas à l’interrompre. Il reste coi dans son box, la tête levée, les yeux inexpressifs, lui qui s'abandonnait à la fureur il y a encore quelques jours, bombant le torse, envoyant valser les micros du tribunal, à la simple évocation des viols dont on l’accuse.

"C'est notre frère"

Devant ce silence qui ressemblerait bien à un assentiment, Francis Terquem se ragaillardit, s’autorise même des envolées. Et pêle-mêle, accuse la mère de Sofiane Rasmouk, absente du procès, absente de sa vie. Les institutions qui n’ont pas su garder à l’école cet adolescent, diagnostiqué psychopathe, dont tout le monde voulait se débarrasser. "Il m’a écrit un mot, vous voulez que je vous le montre ? Il est analphabète! Analphabète! En France, au XXIeme siècle, et personne ne s’en est inquiété!". "Sofiane Rasmouk, poursuit-il, c’était l’histoire d’un désastre annoncé". Pour qui, selon lui, il faut encore éviter le pire.

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Et c’est dans un sursaut d’audace, presque une bravade qu’il tente alors le tout pour le tout, appelant désormais "victime" celui qui a fait preuve de bien peu d’humanité lors de ce procès hors-norme. "Sofiane Rasmouk est la première victime de Sofiane Rasmouk. Et c’est une victime tellement négligée". "Ça nous ferait du bien de ne le considérer que comme un étron, et d’avoir simplement à tirer la chasse. Mais vous êtes là pour juger un homme. Et ce n’est pas tant qu’il est homme, c’est que nous en sommes. Sofiane Rasmouk doit vivre, nous devons tous vivre avec lui. C’est notre frère." A cette phrase, la mère de Priscillia, sur le banc des parties civiles, secoue la tête, dit "non". Et alors que les derniers mots lui reviennent, alors qu’il a si souvent volé une parole qu’on ne lui avait pas donnée, Sofiane Rasmouk, imprédictible, choisit de se taire. Un peu plus tôt dans la matinée, l’avocat général Dominique Borron a requis la perpétuité à son encontre. Verdict attendu ce lundi.


La rédaction de TF1info

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