"Still the Water" : Naomi Kawase soulève une vague d'ennui

Mehdi Omaïs
Publié le 20 mai 2014 à 10h03
"Still the Water" : Naomi Kawase soulève une vague d'ennui

CRITIQUE - Avec "Still the Water", la japonaise Naomi Kawase pourrait bien enchanter le jury présidé par Jane Campion. Son drame onirique et interminable suit le parcours émotionnel de deux adolescents. Le tout au coeur d'une nature sauvage.

Elle la veut corps et âme sa Palme d’Or. Après avoir concouru trois fois en compétition et remporté le Grand Prix en 2007 pour La Forêt de Mogari, Naomi Kawase entend bien séduire la féministe Jane Campion avec son drame psychologique Still the water. Pour l’occasion, la cinéaste japonaise de 44 ans retourne sur l’île de sa chair : Amami. Un coin de paradis où les habitants vivent paisiblement en célébrant la nature, en l’écoutant et en la respectant. C’est là que deux ados se tournent autour : Kaito, traumatisé par la découverte d’un corps flottant dans la mer, et Kyoko, une jeune fille dont la mère est à l’article de la mort.

Inéluctablement, Kawase va réunir ces deux personnages fragiles, les prendre par la main pour les amener, une fois guéris de toutes plaies, vers l’âge adulte. Ce parcours initiatique est raconté à travers les humeurs de dame nature. Pour illustrer chaque état d’esprit de ses jeunes héros, la réalisatrice va piocher dans le mouvement des arbres, le soupir de l’écume ou le cri d’un oiseau. Si la recette poético-onirique fait mouche dans les premières minutes, cet océan de chlorophylle noie petit à petit le spectateur dans un puissant courant d’ennui.

Sensoriel mais soporifique

Still the water, c’est comme un exemplaire du symbolisme pour les nuls. Pour illustrer les tourments qui habitent Kaito, on a droit à des vagues qui se déchaînent sur fond crépusculaire. Pour faire comprendre que Kyoko accepte enfin la mortalité des choses, on a droit à un égorgement animal et à l’agonie qu’il implique. Et ainsi de suite, jusqu’à la dernière image. Si les intentions de Kawase s’avèrent honnêtes (elle a perdu sa mère adoptive avant l’entame du tournage), elles sont néanmoins complètement neutralisées par une mise en scène artificielle sous couvert de naturalisme.

Au final, ce long métrage, loin de démériter, ne s’apprécie réellement qu’à la condition sine qua none de percer sa bulle. Nul doute que l’expérience sensorielle doit clairement en valoir le détour pour ceux qui sont parvenus à nager sur le sillage des personnages. Pour les autres, difficile de ne pas réprimer un bâillement devant les incessants silences, porteurs a priori de vertus exceptionnelles. Par ailleurs, l’asthénie de ces jeunots amoureux est telle qu’une colonie d’anges a le temps de passer le temps que l’un réponde aux avances de l’autre. Dans l’entre deux, le spectateur aura coulé jusqu’à l’épave du Titanic.
 


Mehdi Omaïs

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