Le président d'un club turc interdit le port de la barbe à ses joueurs

par Hamza HIZZIR
Publié le 16 novembre 2014 à 22h53
Le président d'un club turc interdit le port de la barbe à ses joueurs

FOOTBALL - Ilhan Cavcav, le président du Gençlerbirligi Ankara, a décidé d'interdire à ses joueurs de se présenter barbus sur les terrains sous peine d'amende. Au nom de la laïcité.

Ils y penseront tous les matins en se rasant. Parce qu'on les y a contraint. Eux, ce sont les joueurs du Gençlerbirligi Ankara, actuel 9e du Championnat de Turquie, qui ont découvert avec stupéfaction les propos tenus ce dimanche par leur président, Ilhan Cavcav. "Alors quoi ? On est dans un lycée religieux ? Vous êtes des sportifs, vous devez être des exemples pour la jeunesse. J'ai 80 ans et je me rase tous les matins", a tempêté le dirigeant dans un entretien accordé à l'agence de presse Dogan. Puis d'annoncer que ceux qui se présenteront barbus sur les terrains devront s'acquitter d'une amende de 25 000 livres turques (environ 9 000 euros). Rien que ça.

Pourquoi cette croisade pileuse ? La référence au "lycée religieux" est une attaque à peine voilée contre le gouvernement islamo-conservateur de Recep Tayyip Erdogan, aux commandes du pays depuis 2002 et que de nombreuses voies accusent d'islamiser la République laïque fondée en 1923 par Mustafa Kemal Atatürk. Aux yeux de l'impétueux octogénaire, arborer une barbe revient donc à exhiber un signe religieux.

Andrea Pirlo est-il musulman ?

"J'ai demandé au président de la Fédération turque, Yildirim Demirören, d'interdire aux joueurs le port de la barbe dans tout le pays. Mais il m'a dit qu'il ne pouvait pas imposer une telle restriction parce que l'UEFA ne le permettrait pas, a poursuivi Cavcav. J'en ai marre de l'UEFA, si seulement nous pouvions jouer ailleurs que sous son autorité !"

Il va sans dire que les médias turcs s'en sont donné à cœur joie. Car, du légendaire Socrates à Andrea Pirlo, en passant par Franck Ribéry depuis quelques mois, de nombreux joueurs laissent pousser leur barbe, souvent motivés par de simples considérations esthétiques. Dans un foot mondialisé, en Turquie comme ailleurs, il paraît donc incongru, aux yeux de nombreuses personnes, de voir le débat sur la place de la religion dans la société s'inviter dans la sphère sportive.

Si l'on se fie aux photos officielles sur le site du Gençlerbirligi Ankara , ils sont en tout cas au moins une demi-douzaine à s'être sentis visés par la saillie présidentielle. Et à se demander quel comportement adopter. Les moins jeunes d'entre eux se rappellent peut-être qu'en 1998, le sélectionneur argentin Daniel Passarella avait interdit à ses joueurs de disputer la Coupe du monde en France avec des cheveux longs. Un seul avait alors osé se rebeller, le milieu de terrain Fernando Redondo, qui l'avait payé en regardant la compétition à la télévision. Mais pas sûr qu'il ait regretté son choix pour autant.


Hamza HIZZIR

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